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Alger-centre se fait belle pour accueillir Macron

Alger-centre se fait belle pour accueillir Macron

Alger-centre se fait belle pour accueillir, ce mercredi 6 décembre, le président français Emmanuel Macron pour « une visite de travail » de quelques heures. Le centre-ville s’est transformé, en moins d’une semaine, en un vaste chantier. La place Audin, juste en face du siège d’Air Algérie, est l’un des centres de gravité de ce « relifting ».

Plus aucun gobelet de café ou de paquet de cigarette vide ne trainent par terre. Mieux, des pots de fleurs ont été installés avec plantation d’œillets orange et jaunes, des œillets d’automne.

En face, à côté de l’agence d’Egypt Air, un espace vert a été « inventé » avec plantation de fleurs et d’un arbuste. Le carrelage du trottoir qui mène du Tunnel des Facultés à l’université Benyoucef Benkheda (Fac centrale) a été partiellement refait des deux côtés de la chaussée.

Les nombreux trous ont été bouchés avec du béton, parfois avec du ciment gris à l’état brut. Faute de carrelages, des carrés ont été dessinés dans le béton, pour faire semblant… « Nous faisons quelques rectifications. C’est notre travail. Les gens disent que c’est pour le président français. Ce n’est pas vrai », lance un ouvrier d’Asrout, l’entreprise de la wilaya d’Alger qui s’occupe de la maintenance des réseaux routiers et de l’assainissement.

Chargés de sacs de ciment et d’outils de travail, plusieurs véhicules d’Asrout sont stationnés du milieu de la rue de la Didouche Mourad et jusqu’à la place de l’Emir Abdelkader, point de chute du parcours du président français.

L’entrée latérale de la Fac centrale, non loin du café « À la bonne heure », a été ouverte aux étudiants après des années de fermeture. « Cette porte est ouverte de temps à autre », précise un jeune agent de sécurité qui tient à vérifier les cartes des étudiants.

En haut des escaliers, la plaque commémorative de Benyoucef Benkheda, habituellement abandonnée, a été nettoyée à grand eau. Les piquets de protection ont été repeints en noir et or. L’université d’Alger centre a été rebaptisée au nom du président du GPRA (Gouvernement provisoire de la République algérienne) en juillet 2004.

Des travaux sous la pluie

A l’intérieur de la Fac, de grandes opérations de nettoyage sont menées par les travailleurs de Net Com conduisant des balayeuses. «Nous n’avons jamais vu de tels travaux à l’université. C’est tellement propre », remarque une étudiante.

Certains de ses camarades s’amusent à prendre des photos pour immortaliser « l’événement ». Vers 10h 20, une ambulance arrive sur les lieux pour transporter un ouvrier blessé. Des responsables supervisent les opérations au niveau de la Fac centrale mettant une grosse pression sur les ouvriers.

Samedi et dimanche soir, les travaux de réfection et de peinture ont été menés sous la pluie ! Même les vitres de la façade extérieure de la Fac centrale ont été refaites. Des vitres qui étaient abandonnées à leur saleté et à leurs fissures pendant des années !

Les ouvriers de l’ERMA (Établissement de réalisation et de maintenance d’éclairage) s’affairent, de leur côté, à remplacer toutes les lampes grillées de la zone allant de la place Audin à la Grande poste. Portant de petits pots de fleurs, les ouvriers de l’Edeva (Établissement de développement des espaces verts d’Alger) se chargent d’embellir les espaces à côté de la Grande poste et du Centre des chèques postaux. Ici, on se marche presque sur les pieds tant le mouvement est dense avec une forte présence policière. Les aspirateurs de Net Com sont à l’assaut du moindre bout de papier avec une incroyable vigilance.

Un chemin déjà balisé

Les camions d’APC d’Alger Centre et de l’APC de Sidi M’hamed transportent les balises, installées à partir de la Grande Poste et jusqu’à place de l’Emir Abdelkader, des deux côtés de la chaussée.

Macron aura visiblement droit à un bain de foule algérois sous le soleil de décembre, sur presque 400 mètres de parcours. Il est prévu que le chef d’État français s’installe au Milk Bar pour y prendre un thé ou un café avant de marcher quelques pas pour visiter la librairie du Tiers monde, située plus bas, en face de la statue imposante de l’Emir Abdelkader.

Le trottoir à côté de la librairie a été refait. « Nous avons eu une inondation, ces derniers jours. Nous sommes en train de nettoyer », a expliqué un employé de la librairie, fermée au public à titre exceptionnel. Un jeune homme est occupé à faire briller le fronton de cet endroit culturel, l’un des plus fréquentés d’Alger. Ici, personne ne sait encore si Macron va prendre une photo à côté de la statue de l’Emir Abdelkader, fondateur de l’État algérien moderne.

« En attendant, la venue de Trump ! »

Les passants commentent, certains avec ironie, le mouvement inédit dans une ville, traditionnellement laissée à son triste sort. « Mais, pourquoi ils nettoient pas la ville le reste de l’année ? Qu’en est-il des autres villes du pays ? », s’interroge Salima, ingénieur.

« Qu’ils nous disent que nous sommes toujours colonisés. Un français m’a dit hier : « le président français devrait venir chaque jour à Alger pour avoir une ville propre ». « Je me suis senti humilié », a confié Réda, serveur dans une terrasse.« Je pense que le président Trump devrait lui aussi venir en Algérie, comme ça il vont tout refaire et tout nettoyer. Donc, patientons en attendant, la venue de Trump », lâche, le ton amusé, Mohamed, cadre. « Vous vous rendez compte, ils sont entrain de goudronner et de retaper les trottoirs pour le président français ? Mais, où va-t-on ? Cela veut dire quoi ? », se demande Younes, banquier.

Younes fait une lecture politique de la préparation de l’accueil. « Ils doivent négocier quelque chose », dit-il. Sur les réseaux sociaux, c’est le déchaînement. « Alerte à Alger, Macron arrive. Nettoyage avec effet rétroactif ! », écrit Abdelmadjid sur Facebook.

« Juste de petites retouches »

Hakim Bettache, fraichement réélu président de l’APC d’Alger centre, trouve tout à fait normal de bien préparer la visite d’un chef d’État. « Ce n’est pas un embellissement. Il s’agit de petites retouches. Nous avons renforcé la main d’œuvre. En France, lorsqu’un président visite le pays, c’est la même chose. Nous ne faisons pas exception par rapport à d’autres pays. Cela se passe partout. On essaie de rattraper quelque peu l’environnement par rapport à la venue du président de la République française, c’est tout. Cela ne coûte pas grand-chose», nous a-t-il déclaré.

Les gens disent que ces travaux ne sont pas faits à longueur d’année, pourquoi ? « Non. Nous effectuons ces travaux toute l’année avec des programmes de la wilaya d’Alger et de l’APC d’Alger centre, le plus normalement possible », a-t-il répondu.

Il a démenti avoir demandé aux cafés et aux restaurants de lever les terrasses (les gérants de ces établissement ont reçu l’instruction de dénuder les espaces extérieurs).

« Ceux qui ont demandé aux cafés et restaurants d’enlever leurs terrasses doivent assumer leurs responsabilités. Nous avons reçu beaucoup de présidents. Les terrasses n’ont pas bougé. Pour nous, l’activité doit se poursuivre le plus normalement possible. Nous sommes dans un pays sûr, nous n’enlevons pas les terrasses. Il n’y a aucune alerte générale sur le plan sécuritaire», assure Hakim Bettache.

Interrogé sur sa décision de rejoindre le parti de Djamel Ould Abbès, il a eu une brève réponse : « Le FLN appartient à tous ». Bettache préfère ne pas s’étaler sur la question. Il est évident que le maire d’Alger ne peut pas parler du FLN et de Macron en même temps….

 

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