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Fait accompli constitutionnel et retour de la répression : faut-il s’inquiéter ?

Fait accompli constitutionnel et retour de la répression : faut-il s’inquiéter ?

Quelles conclusions faut-il tirer des événements de cette journée du 9 avril ? Au moment même où Abdelkader Bensalah héritait de la présidence par intérim au Palais de nations, les étudiants se faisaient matraquer au centre d’Alger par la police.

Le premier événement entrait dans le cadre de la solution « constitutionnelle » voulue par le commandement de l’ANP. Contre l’avis du peuple ? On peut bien le penser puisque les manifestants ont réitéré vendredi passé leur refus de voir la transition, de laquelle dépendra le futur du pays, confiée à des personnages très peu crédibles car étant de purs produits du système qui les a façonnés et qu’ils ont accompagné et défendu.

Or, le cadre constitutionnel sur lequel a tant insisté le chef d’état-major de l’ANP ne prévoit rien d’autre que la remise des clés du pouvoir, momentanément certes, au président du Sénat sans possibilité de changement du Premier ministre, des membres de son gouvernement et du président du Conseil constitutionnel.

Avec Abdelkader Bensalah, Noureddine Bedoui et Tayeb Belaïz aux commandes, le peuple sait que le changement rêvé ne sera jamais au rendez-vous. Il l’a crié très fort dans la rue et le chef de l’armée a dit le comprendre.

L’appel d’Ahmed Gaïd Salah à l’application des clauses de la Constitution disposant que la souveraineté appartient exclusivement au peuple (articles 7 et 8 notamment), avait laissé entrevoir l’espoir d’une prise en compte de l’avis des manifestants avec la mise en place d’une instance présidentielle composée de figures consensuelles et crédibles.

Mais ce mardi 9 avril, soit une semaine après l’annonce officielle de la démission de Bouteflika, ceux qui ont tenté de faire dire à l’article 102 autre chose que ce qui est stipulé dans sa lettre, ont dû déchanter. Abdelkader Bensalah est le nouveau chef de l’État pour les trois prochains mois, Noureddine Bedoui, le fidèle ministre de l’Intérieur de Bouteflika, dirigera le gouvernement pendant la même période et Tayeb Belaïz est celui qui aura le dernier mot dans toutes les étapes du processus électoral à venir.

Il va sans dire que ce fait accompli n’aurait pas pu se produire sans l’aval du commandement de l’ANP. Pour une institution qui a tant insisté sur la légalité et le respect du cadre constitutionnel, il sera maintenant difficile, quand bien même elle en aurait la disposition et la volonté, de plaider autre chose que le processus enclenché ce mardi au Palais des nations.

La démission du président intérimaire n’est prévue par aucun texte, encore moins sa destitution. Dans les communiqués du ministère de la Défense du 30 mars et du 2 avril, Ahmed Gaïd Salah avait explicitement appelé à l’application des articles 7 et 8 de la constitution, mais après le pas franchi ce mardi, il devient certain qu’il n’entendait pas la remise immédiate des clés de la transition à des instances issues du peuple.

L’idée d’une présidence collégiale est comme définitivement enterrée et il est à craindre maintenant que l’armée soit tentée par la manière forte pour imposer aux Algériens une option qu’ils ont rejetée unanimement et sans équivoque.

Ce qui s’est passé au moment même où les parlementaires intronisaient Bensalah n’aide pas à évacuer de telles appréhensions. Pour la première fois depuis le début du mouvement populaire, les étudiants ont été empêchés de manifester dans le centre d’Alger.

Certains diront que la police n’a fait que les dissuader de se diriger vers le Palais du gouvernement comme elle le faisait pour ceux qui tentaient de rallier la présidence chaque vendredi, mais il reste que l’usage abusif de la matraque et du canon à eau est un signe inquiétant, d’autant plus que cela survient au moment où un choix politique capital semble acté.

Qu’en sera-t-il ce vendredi et ceux qui suivront lorsque les Algériens sortiront encore par millions exiger une vraie transition ? Le chef de l’armée peut toujours évacuer la suspicion et les appréhensions avec un discours franc et surtout des garanties solides. S’il ne le fait pas, il est à craindre que la crise, la vraie, ne fait que commencer…

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