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Le pouvoir joue la carte de l’apaisement et mise sur l’essoufflement de la contestation

Le pouvoir joue la carte de l’apaisement et mise sur l’essoufflement de la contestation

Ahmed Ouyahia s’est exprimé pour la première fois sur les marches contre le cinquième mandat de Bouteflika. La première chose à retenir de ses propos, c’est le fait qu’il tranche avec l’arrogance affichée au début du mois lorsqu’il fut interpellé sur l’éventualité d’assister à ce genre d’actions.

« L’État a prouvé par le passé qu’il sait maîtriser la rue », avait-il déclaré le 2 février en conférence de presse, sous la casquette de secrétaire général du RND.

Ce lundi, devant l’APN, il s’est exprimé en tant que Premier ministre, venu présenter la déclaration de politique générale de son gouvernement. Il a tenu un discours nettement différent.

« La Constitution garantit aux citoyens le droit au rassemblement pacifique dans le cadre de la loi. Dieu merci, toutes les marches ont été pacifiques (…) J’espère que l’expression continuera à se faire pacifiquement et que la démocratie algérienne en sortira victorieuse ».

Le revirement d’Ouyahia exprime en fait la nouvelle stratégie du pouvoir, pris de court par l’ampleur des contestations. L’apaisement, c’est la carte pour laquelle il semble qu’on ait opté en haut lieu. La partition est exécutée jusque-là avec harmonie, si l’on excepte la fausse note que constitue la sortie hasardeuse de Mouad Bouchareb, le coordinateur provisoire du FLN qui, dès le lendemain des imposantes marches de vendredi, a souhaité de « beaux rêves » à ceux qui espèrent le changement. L’inexpérimenté président de l’APN aurait été mal conseillé, nous dit-on et, à en croire des sources proches de la direction de campagne du président-candidat, il a été vertement tancé lors d’une réunion tenue le soir même de son incartade.

Chez les partisans du président, on mise sur l’essoufflement du mouvement de contestation avec, comme feuille de route, éviter les propos provocateurs et mettre en exergue la volonté de réformes affichée par Bouteflika dans sa lettre-programme du 10 février. Mis à part donc le trop plein de zèle de Bouchareb, tous ceux qui se sont exprimés jusque-là ont tenté d’éviter d’exacerber la colère populaire.

D’abord en chœur. « Nous enregistrons avec satisfaction le caractère pacifique des dernières marches et nous appelons tout le monde à la sagesse et nous exprimons notre haute appréciation du professionnalisme des services de sécurité dans l’encadrement de ces marches", a indiqué un communiqué des partis de l’Alliance réunis dimanche soir au siège de TAJ. Puis en solo. « J’ai déjà évoqué le rêve de Bouteflika en Algérie et ce rêve s’est concrétisé. Nous sommes arrivés à une étape où des Algériens, qui ne sont pas d’accord avec nous, ont exprimé leur position, dans de bonnes conditions, sans aucun incident. Il n’y a eu ni casse, ni rien du tout. C’est cela la vraie démocratie dont rêvait le président de la République et ça s’est concrétisée », a déclaré Abdelmalek Sellal sur Amel TV, la chaîne fondée par Hichem Aboud.

Même propos mielleux chez Seddik Chihab, porte-parole du RND lundi sur TSA : « Il faut saluer la qualité de ces manifestations. Le civisme a prévalu. Nous sommes contents qu’il y ait ce bond qualitatif dans la revendication sociale et démocratique ». Ou encore chez Amar Ghoul qui a parlé de « climat de liberté et de démocratie ayant permis de telles manifestations ».

Le « consensus » des partisans de Bouteflika ne s’arrête pas là. Le président demeure pour eux « une ligne rouge », malgré la clarté du message de la rue. Un message qu’ils ont unanimement tenté de dévoyer en évoquant le « changement » et les « réformes » au lieu du rejet du cinquième mandat.

En plus clair, on croit encore que le président sera réélu le 18 avril prochain. Sur ce point, l’heure ne semble pas aux concessions. Les « vertus de la continuité », soulignées par Bouteflika dans son message aux travailleurs le 24 février, sont reprises fidèlement par Ouyahia, Sellal et les autres.

L’offre du pouvoir ressemble à peu près à ceci : le changement sortira de la conférence nationale mais il faudra d’abord réélire Bouteflika. Mais qu’en pensera la rue ? Première réponse ce vendredi 1er mars.


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