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Coronavirus : « Il faut absolument augmenter le nombre de tests par jour »

Coronavirus : « Il faut absolument augmenter le nombre de tests par jour »

Quelle appréciation faites-vous des mesures prises pour contrer la pandémie du Covid-19 en Algérie ?

Professeur Mustapha Khiati, président de la Forem : Les mesures prises ont été relativement rationnelles, et certaines décisions ont même été anticipatives. Par exemple, des mesures ont été prises pour la phase 2 alors qu’on était en phase 1, des mesures de confinement ont été prises à Blida alors qu’on était en phase 2 alors que c’est une mesure de phase 3. Donc, ces mesures sont rationnelles dont l’objectif est d’essayer d’arrêter quelque peu la transmission du virus avant que la catastrophe n’atteigne le pays. D’autant qu’en face l’Europe qui constitue pour nous un modèle d’évolution et tous les cas nous sont venus pratiquement de ce continent. On s’est adapté en quelque sorte par des mesures énergiques pour essayer de limiter les dégâts.

Tout de même, certains pensent que le gouvernement a tardé pour fermer les frontières et suspendre les liaisons aériennes. Qu’en dites-vous ?

L’explication qui a été donnée par le Premier ministre à ce moment-là était qu’on ne pouvait pas abandonner nos concitoyens à l’étranger. C’est une idée tout à fait défendable. Cette position est honorable. Sauf qu’on aurait du procéder au confinement de 15 jours de toutes les personnes arrivant de l’étranger en Algérie, et ce à partir du premier cas.

Le confinement, total pour la wilaya de Blida, et partiel pour 10 autres wilayas, n’est pas totalement respecté par les habitants des régions concernées. Plusieurs voix se sont élevées pour appeler à un confinement total du pays. Etes-vous d’accord ?

Je pense que les dirigeants ont été sages de ne pas opter pour cette ultime décision, parce que le confinement total à des aspects positifs mais il a également des aspects négatifs qu’il faut savoir atténuer. Il faut savoir que la wilaya de Blida est le foyer le plus important du Covid-19 dans notre pays. Près des deux tiers des cas déclarés jusqu’à présent viennent de cette région. Donc, le confinement total de Blida est justifié amplement.

Comment évaluez-vous la situation épidémiologique en ce moment et comment prévoyez-vous son évolution ?

Le paysage épidémiologique est difficile à faire. Pourquoi ? Parce que nous procédons à très peu d’analyses par jour. Jusqu’à il y a une semaine, nous étions à 70-80 tests/jour. Aujourd’hui avec l’ouverture des antennes de l’Institut Pasteur à Oran et Constantine et ce matin à Tizi-Ouzou, nous serons peut-être autour de 200 à 250 tests/jour. Il faut monter à 1 000 – 2 000 tests par jour obligatoirement si on veut aller très vite. La Tunisie est passée à 5 000 tests par semaine, l’Allemagne à 500 000 tests par semaine et la Corée du Sud est à 25 000 tests par jour. Donc, il faut absolument augmenter le nombre de tests. C’est extrêmement important, car cela nous permettra de pallier aux insuffisances du confinement. Lorsque nous avons des cas positifs, on peut à ce moment-là imposer un confinement obligatoire, en utilisant la force publique s’il le faut.

Faudrait-il pour cela associer les laboratoires privés et d’autres structures pour augmenter la cadence des tests ?

En fait c’est plus compliqué que ça. Tout ce qui est analyses était confié à l’Institut Pasteur d’Algérie (IPA) qui décidait de tout. Or, l’IPA n’a pas une grande équipe de virologues, 2 ou 3 personnes. Le destin d’un pays ne peut pas être mis entre les mains de 3 personnes. Deuxièmement, l’IPA s’appuie généralement sur la technique du PCR (utilise l’ADN). Dans ce cas particulier, on sait que la technique PCR exige beaucoup de temps et au vu des demandes qui se font, les résultats tardent. Ce qui peut s’avérer catastrophique. Aussi, l’Institut Pasteur d’Algérie n’a pas validé les autres tests ; or, l’IPA n’a pas le monopole, puisque le chef de l’État a installé une commission et c’est à elle de faire le choix et de dire qu’on ne peut pas se suffire de ce test PCR qui, de toutes les façons et comme les autres tests, a une marge même minime de faux positifs ou de faux négatifs. Il y a lieu de faire appel à des tests rapides qui se font en un quart d’heure. Ils sont utilisés notamment en Russie, en Espagne, et en Turquie, etc. Si ces pays ont choisi sans problème ces tests, il n’y a pas de raison que nous ne les choisissions pas. Il s’agit d’une épidémie qui fait des ravages et on ne peut pas se permettre d’attendre inutilement. On peut donc faire des tests rapides n’importe où y compris dans les laboratoires privés. La technique PCR ne peut pas se faire dans les laboratoires actuels ni dans les laboratoires des hôpitaux, parce qu’elle demande un laboratoire de type P2 qui dispose d’un confinement particulier et d’un personnel spécialisé qui est déjà formé, ce qui n’existe pas aujourd’hui. D’ailleurs, pour Tizi-Ouzou, Constantine et Oran, on a utilisé des centres de recherche dépendant de la Direction générale de la recherche mais pas des hôpitaux, car c’est elle qui dispose de ce type de moyens.

Que pensez-vous du traitement à la Chloroquine adopté par l’Algérie pour soigner les patients atteints du Covid-19 ?

Il faut appliquer à la lettre la directive du ministère de la santé relative au traitement à l’hydroxychloroquine pour toutes les personnes présentant le moindre signe clinique. Ce traitement ne peut se faire que sous contrôle cardiologique. La décision du ministère de la Santé d’élargir le traitement à toutes les personnes qui présentent des signes est bonne. Ce traitement doit être appliqué au niveau de tous les hôpitaux.

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