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Gaïd Salah et les Bouteflika, du pacte de fidélité à la séparation brutale

Gaïd Salah et les Bouteflika, du pacte de fidélité à la séparation brutale

Entre Saïd Bouteflika et Gaïd Salah la cohabitation au sein du clan n’était pas facile. Face au frère conseiller, le militaire est devenu l’ami qui compte aux yeux du président. En convalescence à Paris après son AVC, le président Bouteflika avait reçu un serment de fidélité du chef de l’état-major.

Jusqu’à la mort, avait juré le général Ahmed-Gaïd Salah, venu le retrouver à hôtel des Invalides à Paris dans un contexte d’incertitude à un an du 4e mandat. Il s’en est montré un fervent défenseur alors que le patron des services de renseignement (ex-DRS) le général Mohamed Medienne dit Toufik n’excluait pas un plan B en raison de la maladie du chef de l’État.

En fait, le chef de l’état-major trouvait là l’occasion de remercier celui qui l’avait promu à cette fonction au moment où sa carrière devait s’arrêter en 2004 au poste de commandant des forces terrestres, avec un départ à la retraite que ses adversaires avaient préparé de longue date.

Depuis, le pacte de confiance a continué de se consolider et le vice-ministre de la Défense a même été un partisan du 5e mandat. Jusqu’au 26 mars. Ce jour-là, après une inflexion de sa ligne penchée de plus en plus vers le hirak au détriment d’une prolongation du 4e mandat, il s’est délié de son serment.

Il a appelé à la mise en œuvre de l’article 102 de la Constitution auquel il n’avait pas cessé de faire obstacle. Faute d’être immédiatement entendu, il réunit le 30 mars le haut commandement de l’armée et somme le président de rendre les clés du pouvoir. La réunion fut suivie d’une menace à peine voilée de descente sur la résidence de Zéralda squattée par des forces anticonstitutionnelles qui ont aussi confisqué le sceau de la présidence.

Le vieux général s’est-il révélé dans le rôle de Brutus trahissant sa promesse? « Non », diront ses défenseurs puisqu’il s’était engagé auprès d’un homme qui n’était plus en situation d’assumer ses fonctions présidentielles. Le pacte ne le liait pas au conseiller spécial qui s’était substitué au président pour tenter de mettre fin à ses fonctions de chef d’état-major de l’ANP.

Les révélations de Khaled Nezzar confirment ce projet de Saïd Bouteflika. Il fut matérialisé par une décision enregistrée pour être annoncée au JT de la télé officielle. Une sorte de fait-accompli en prenant à témoin tous les Algériens. Informé semble-t-il par hasard, le général eut juste le temps de stopper l’annonce. Le nouveau DG de l’ENTV se souviendra certainement de ce jour.

Pourquoi le « président de fait » avait-choisi de limoger le chef de l’état-major? Saïd Bouteflika a fini par prendre conscience que la restructuration du DRS avait en fait consolidée la prédominance des Tagarins sur El-Mouradia. La restructuration a été menée sous la conduite d’Ahmed Gaïd Salah et non de la présidence. Elle fut décidée dès l’été 2013 lors d’une réunion en présence d’un général Toufik déjà dépassé à l’époque.

Happé par le business de ses protégés à l’ombre d’un président absent, Saïd Bouteflika n’a pas senti le pouvoir filer vers un vice-ministre de la Défense qui s’est rapproché de la troupe, sans se priver de nommer ses hommes de confiance.

Quand il est revenu de ses égarements, le conseiller spécial a tenté de reprendre l’initiative. Il aurait même étudié des scénarios opérationnels pour « neutraliser » le général qui ne le tenait pas en haute estime. Pour se mettre à l’abri, le chef de l’état-major a inspiré les changements effectués au cœur de l’été à la tête de son institution. Les généraux Said Bey et Habib Chentouf, avaient été pressentis pour le remplacer.

Abdelghani Hamel captait la lumière d’un présidentiable. Tous les trois sont traînés aujourd’hui devant la Justice. Bey est au fond d’une cellule. Chentouf en fuite. Et Hamel en possession d’une nouvelle convocation pour une autre enquête.

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