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Gestion des devises : une situation de plus en plus intenable

Gestion des devises : une situation de plus en plus intenable

Coïncidence ou action concertée en vue de relancer le chantier des réformes structurelles de l’économie nationale ? Ce samedi 6 octobre, le sujet est revenu au-devant de la scène à la faveur de trois plaidoiries émanant de la Banque d’Algérie, du président du FCE et du Premier ministre.

Des responsables de la Banque d’Algérie, cités par l’agence officielle, ont mis à profit la persistance du déficit de la balance des paiements, chiffres à l’appui, pour rappeler à l’Exécutif la nécessité de faire des « efforts supplémentaires d’ajustement ». Ali Haddad, lui, appelait à partir de la ville d’El Oued à ouvrir tous les secteurs au privé.

Presque simultanément, le Premier ministre, même s’il s’exprimait sous la casquette de secrétaire général du RND, renouait avec son discours de fermeté et rappelait lui aussi le même impératif. « On ne va pas attendre de mettre un genou à terre et voir le FMI venir nous dicter ses conditions », déclare Ahmed Ouyahia lors d’une rencontre avec les femmes de son parti.

L’homme est allé plus loin, s’en prenant frontalement à ceux qui s’opposent aux réformes, les qualifiant de partisans de « l’immobilisme ». « Certaines voix ont fait de l’immobilisme de l’Algérie un registre de commerce. Rien ne doit bouger. Dès qu’on bouge, ils crient à l’abandon des droits des travailleurs. Quand tu dis ne réformes pas, ne privatises pas, c’est de la démagogie et du populisme. Il faut maintenir la solidarité nationale envers les pauvres et les démunis, mais il faut aussi faire avancer les choses tout en étant souverains dans notre pays. »

Enfin, pour ceux qui y verraient un simple point de vue du chef du RND, celui-ci sort l’arme infaillible : il s’agit aussi de la volonté du président Bouteflika « qui a appelé lors du dernier Conseil des ministres à poursuivre les réformes ». Bien entendu, dans son discours prononcé à Zéralda, ni lors de la conférence de presse qui a suivi, Ahmed Ouyahia n’a rien dévoilé de la nature des « réformes » qu’il a tant défendues.

Les « responsables » anonymes de la Banque d’Algérie n’ont pas été plus prolixes ni plus explicites. « Des efforts supplémentaires d’ajustement sont nécessaires pour rétablir les équilibres macroéconomiques afin d’assurer la viabilité de la balance des paiements et de limiter l’érosion des réserves officielles de change », soutiennent-ils.

Les « efforts » qu’ils réclament « devraient s’intégrer dans un vaste programme de réformes structurelles pour libérer le fort potentiel de croissance de l’économie nationale et diversifier l’offre locale et les exportations de biens et services ».

La situation, telle que traduite par les chiffres rendus publics à l’occasion, est intenable à terme : un déficit de près de 8 milliards de dollars du solde global de la balance des paiements au premier semestre 2018 sans perspective de le faire baisser sensiblement, « compte tenu de l’évolution attendue des prix du pétrole, des limites observées à la compression des importations, notamment des biens de consommation alimentaires et non alimentaires, et des perspectives d’évolution des exportations hors-hydrocarbures à moyen terme », précisent-ils.

Les responsables de la BA s’inquiètent aussi de l’érosion effrénée des réserves de change qui ne s’élevaient plus qu’à 88 milliards de dollars à la fin du premier semestre de l’année en cours, soit 18 milliards de moins en une année.

Décryptés, ces propos peuvent bien signifier que l’Exécutif fait fausse route en optant pour l’encadrement des importations et, surtout, en tablant sur une embellie durable des prix du pétrole pour rétablir les équilibres. La seule vraie solution que préconise la BA c’est donc de « diversifier l’offre locale et les exportations de biens et services », ce qui passe nécessairement par des réformes structurelles.

Le Premier ministre est du même avis et il semble bien que c’est ce à quoi s’attèlera son gouvernement dès les prochaines semaines ou mois, à en croire la teneur de son discours de ce samedi qui ressemble plus à une feuille de route qu’à un speech de circonstance.

Reste à savoir quelle sera sa marge de manœuvre dans une conjoncture sociale et politique tendue, de surcroît dans une année électorale. Quoi qu’il en soit, politiquement, toute mesure d’ajustement qu’Ouyahia -ou un autre- viendrait à prendre (à commencer par l’accélération des privatisations dans le cadre du partenariat public-privé qui vient d’être acté ?) passeront mieux maintenant que l’injonction ne vient pas du méchant FMI, mais de l’auguste Banque d’Algérie.

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