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Gestion du covid en Algérie : des décisions incompréhensibles

Gestion du covid en Algérie : des décisions incompréhensibles

La propagation du virus de covid-19 met l’Algérie au bord de la catastrophe sanitaire. La barre des 1500 cas journaliers est dépassée lundi 26 juillet et ce n’est que la partie visible de l’immense iceberg de la pandémie.

La situation est nettement aggravée par l’inadaptation des structures de santé, dépourvues de moyens de prise en charge de la maladie, en tout cas pas suffisamment outillées pour faire face à un afflux important de personnes atteintes. Dans les hôpitaux, c’est la panique et les images qui y parviennent sont insupportables.

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Dimanche 25 juillet, le gouvernement a décrété des mesures supplémentaires qui peuvent se résumer au rétablissement du confinement dans les wilayas les plus touchées, au nombre de 35, et à la fermeture de certains lieux et établissements publics dans les mêmes zones. Le lendemain, la fermeture des mosquées pendant les heures de confinement est décrétée.

Des mesures tardives

Des mesures salutaires, mais hélas tardives. Cela fait quelques semaines que la situation se détériore et que les spécialistes appellent au durcissement du dispositif de prévention.

Le gouvernement a trop tergiversé avant d’agir. La semaine passée déjà, la situation était alarmante dans plusieurs wilayas et des décisions urgentes s’imposaient, mais on a préféré privilégier les formes et attendre la réunion du conseil des ministres pour décréter les mesures que tout le monde réclamait.

En situation d’urgence, les formes et procédures importent peu et les décisions à même d’atténuer l’intensité de la catastrophe pouvaient être prises à n’importe quel niveau, même à celui des walis et des maires.

Autre lenteur incompréhensible, ce n’est que ce mardi 27 juillet, alors que la pénurie d’oxygène étouffe hôpitaux et malades depuis plusieurs semaines, que le ministère de l’Industrie pharmaceutique a levé l’obligation d’autorisation préalable pour l’importation par les particuliers de concentrateurs d’oxygène et autre matériel destiné à la lutte contre le covid.

« A titre d’exception, l’importation de concentrateurs d’oxygène ou tout autre dispositif médical utilisé en riposte à la pandémie du coronavirus (Covid-19) par des particuliers et à usage personnel, n’est pas soumise à une autorisation délivrée par les services compétents du ministère de l’Industrie pharmaceutique », a annoncé le ministère dans un communiqué.

L’importation de ces appareils par les entreprises, les établissements, les associations à titre de dons, est toujours soumise à une autorisation « pour pouvoir bénéficier de l’exonération des droits et taxes ».

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Une enquête commodo pour un réservoir d’oxygène

L’institution de l’autorisation, entrant dans le cadre de la politique globale de restrictions des importations pour préserver les réserves de change, n’était déjà pas opportune en ce sens qu’on ne fait pas d’économies au détriment de la santé publique. La maintenir pendant plusieurs jours, voire des semaines, alors que des gens meurent faute de ces équipements, c’est incompréhensible.

Toujours concernant l’oxygène et les aberrations procédurales, le maire de Tigzirt (Tizi-Ouzou), a lancé récemment l’avis d’une enquête commodo-incommodo pour la réalisation d’un réservoir d’oxygène au profit de l’hôpital de la ville.

Les riverains auront tout leur temps (15 jours) pour donner leur avis, puis ce sera sans doute l’appel d’offres et les autres procédures. Les internautes n’ont pas manqué de noter que d’ici la réalisation du réservoir, le covid et la pénurie d’oxygène auront causé une hécatombe.

Le nombre de morts dus à cette situation est déjà très élevé. Des scènes choquantes sont filmées dans de grands hôpitaux du pays. Dans ces conditions, s’en tenir aux procédures au détriment de l’efficacité relève de l’irresponsabilité.

La même chose peut être dite de la décision de l’usine d’oxygène de Ouled Moussa (Boumerdès) qui, semble-t-il, ne serve que les clients « conventionnés ».

Un citoyen venu d’Azazga (Tizi-Ouzou), a témoigné sur les réseaux sociaux qu’il a attendu toute la nuit devant l’usine pour s’entendre signifier que l’hôpital d’Azazga n’était pas « conventionné » et que, de ce fait, il ne peut être fourni en oxygène. Il s’agit pourtant d’une question de vie ou de mort pour des dizaines de malades.

Enfin, le gouvernement a pris tout son temps pour acquérir des concentrateurs d’oxygène dont manquent terriblement les hôpitaux pour traiter les malades. Sur ce point, soit il a manqué d’anticipation ou bien il a préféré attendre, puisque les problèmes d’oxygène ont été posés durant la 2e vague en novembre 2020. Le gouvernement aurait pu profiter de l’accalmie qui a suivi cette vague pour équiper les hôpitaux. Il ne l’a pas fait pour des raisons incompréhensibles.

Des plages fermées, d’autres non

A plus haut niveau, les aberrations dans la gestion de la crise ne manquent pas non plus. Deux au moins sautent aux yeux dans les dernières décisions arrêtées par le conseil des ministres.

D’abord, l’imposition d’un couvre-feu nocturne, comme si le virus ne circule que la nuit. Pour de nombreux spécialistes, il est inutile parce que les villes algériennes n’ont pas de traditions de vie nocturne.

Même en temps normal les gens ne sortent pas la nuit et la majorité des commerces ferment tôt. Pendant le jour, les gens peuvent prendre d’assaut les supermarchés et autres établissements et circuler librement, le virus aussi.

La plus incompréhensible des décisions du gouvernement, c’est celle de fermer les plages uniquement dans les wilayas concernées par le couvre-feu. Celles de quatre wilayas côtières (Chlef, Annaba, Skikda et El Tarf) ont été laissées ouvertes.

Une décision qui risque de créer de nouveaux clusters puisque rien n’empêchera les citoyens des wilayas dont les plages sont fermées, donc qui connaissent une forte propagation du virus, de se rendre dans celles relativement épargnées pour se baigner dans leurs plages ouvertes.

Les responsables des wilayas de Chlef, Annaba et El Tarf, non concernées par le couvre-feu, se sont rendu compte du risque et ont décidé de fermer toutes les plages de la côte de leurs wilayas respectives.

Le risque était de voir les estivants de tout le pays affluer, et le virus avec, sur les plages laissées ouvertes. Ceux qui les ont épargnées dans un premier temps de la décision de fermeture ont manqué de discernement.

Il y a également cette décision du ministère des Affaires religieuses de suspendre les prières collectives dans les mosquées pendant le couvre-feu. C’est-à-dire les prières du Fajr, d’Al Îcha, et d’El Maghreb dans certaines wilayas. Dans la journée, les prières collectives sont autorisées.

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