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L’Algérie, pacifique et exemplaire dans la rue, agressive et vulgaire sur les réseaux sociaux

L’Algérie, pacifique et exemplaire dans la rue, agressive et vulgaire sur les réseaux sociaux

Depuis quelques semaines, le débat politique est revenu en force en Algérie. Il est présent dans la rue, les cafés, les jardins publics, les stations de bus, dans les grandes surfaces et ailleurs.

La volonté féroce des Algériens de changer le système politique, exprimée notamment à travers les marches hebdomadaires depuis le 22 février 2019, a libéré la parole. Chaque vendredi, les Algériens manifestent pacifiquement dans le respect et dans le calme. Des analystes ont appelé ce mouvement de contestation « Révolution blanche », d’autres de « Révolution du sourire ».

Dans la rue, la règle est simple : « pacifique ». Les slogans politiques, parfois humoristiques, sont critiques mais jamais insultants.

Cette Algérie qui manifeste dans la joie et dans la communion depuis six semaines n’est pas forcément celle qui est présente dans les réseaux sociaux. Facebook et Twitter sont devenus des territoires où tous les coups sont permis parfois dans l’anonymat du pseudonyme et du faux profil. Si certains débattent en s’appuyant sur des arguments et des idées, d’autres usent d’un langage ordurier qui n’a rien à voir avec le débat serein qu’impose la conjoncture politique actuelle.

Il n’y a qu’à lire certains commentaires, postes ou tweets dans plusieurs pages et les comptes. Au lieu de répondre à l’idée par un autre, un contre-argument, on verse dans l’insulte, dans les attaques inutiles et dans le règlement de comptes. Des exemples.

« Bâtards », « Harkis », « Clowns »….

Sur la page de Dzair TV, une vidéo montrant un jeune manifestant, appelant le général de corps d’armée Ahmed Gaid Salah à dissoudre le Conseil de la Nation et le Conseil constitutionnel, est suivi d’un commentaire qualifiant les algériens de « peuple idiot ».

Dans la même page, Dzair TV est attaqué de rouler pour « les cachiristes » parce qu’elle a diffusé un reportage sur les aspects festifs des marches. Certains commentateurs n’ont pas hésité de recourir aux « gros mots » pour s’en prendre à la chaine.

Echrourouk News a publié, sur sa page Facebook, un texte présentant des excuses au chef de l’État après avoir diffusé « une image dégradante du président de la République » durant le live de vendredi, cela a suffi pour que la chaîne soit attaquée et ses journalistes traités de « chiyatine de merde », de « bâtards » et de « harkis ». « J’ai l’impression qu’Echourouk TV a rejoint la chaine Zigou dans la consommation de cachir », écrit un internaute.

D’autres ont, par contre, salué la position professionnelle de la chaîne. Des intervenants dans les débats politiques organisés par Numidia TV sont traités de « clowns ». On se moque de leurs aspects physiques aussi.

Des articles de TSA sont souvent suivis de commentaires incendiaires dans la page officielle du site. L’article « Ni Zeroual ni Bensalah, l’Algérie a besoin d’une vraie transition avec de nouvelles figures », mis en ligne le 29 mars 2019, a par exemple été beaucoup commenté. Le pro et les anti-Zeroual se sont affrontés en termes peu élégants en critiquant l’auteur de l’article et le site.

Les articles et les vidéos politiques suscitent beaucoup d’irritation sur les réseaux sociaux, cela peut se comprendre en période d’instabilité, mais ce qui se comprend le moins, ce sont les propos injurieux et les critiques sans fondements qui ciblent tout le monde sans aucune nuance, remise en cause ou retenue.

Il y a des internautes qui tirent sur tout ce qui bouge à partir de la posture de « Monsieur sait tout » qui, installé sur la colline de « la bien-pensance », verse dans la calomnie. Il est évident que les grands « commentateurs » des réseaux sociaux, certains en sont devenus des professionnels, ne sont pas forcément ceux qui sont sortis manifester d’une manière civilisée dans les rues des villes algériennes dans un esprit de famille. Bien au contraire : c’est au moment où les Algériens marchent par millions que d’autres sont installés confortablement derrière leurs écrans pour insulter les autres.

La société réelle est plus avancée et plus courageuse que la société virtuelle dans une Algérie qui aspire à consolider le vivre ensemble dans la pluralité.

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