Politique

12e vendredi : la formidable leçon de courage des Algériens

Le ramadhan s’est installé depuis maintenant cinq jours, la chaleur commence aussi à se faire pesante, mais la mobilisation des Algériens pour faire aboutir leurs revendications est intacte.

Plus que tous les vendredis précédents, même ceux qui ont vu 20 ou 25 millions de citoyens sortir simultanément dans la rue, ce qui s’est passé ce 10 mai 2019, 12e vendredi de contestation contre le système, est hautement significatif.

Malgré le jeûne et la chaleur, les Algériens sont sortis en masse. Peu importe leur nombre, ils ont fait voler en éclats les illusions de ceux pour qui l’essoufflement du mouvement durant le ramadhan était une certitude.

C’est à peine croyable. À Alger, les places et rues habituelles de la protesta étaient noires de monde comme elles le furent chaque vendredi depuis le 22 février.

Comme d’habitude, les plus téméraires ont investi la place de la Grande poste dès les premières heures de la matinée. Comme d’habitude aussi, les marées humaines ont commencé à déferler vers 14h, soit au moment où le soleil se fait le plus brûlant et les effets du jeûne commencent à se faire insupportables.

Une telle mobilisation était presque inattendue, d’autant que, en plus des aléas cités, la gendarmerie a continué à bloquer les principaux axes routiers menant vers la capitale, faisant endurer un véritable enfer aux automobilistes et autres voyageurs, manifestants ou pas.

À Bordj Bou Aréridj, autre place forte du mouvement populaire, les citoyens sont sortis par centaines, peut-être des centaines de milliers, sous un soleil de plomb. Les mêmes scènes de bravoure et de détermination ont été vues partout ailleurs, à Béjaïa, Oran, Oum el Bouaghi, Tizi-Ouzou , Constantine, Relizane, Bouira, Tiaret, Saida, Annaba, Batna, Médea, Tlemcen, Mostaganem, Sidi Bel Abbès…

Les Algériens ont bravé la faim, la soif, la chaleur et les manœuvres du pouvoir. Le monde ne sera que plus émerveillé après cette belle démonstration de courage et de détermination.

Premier enseignement à tirer : rien, absolument rien, n’arrêtera ce peuple formidable, sinon la satisfaction totale de ses revendications. Ceux qui avaient la certitude de pouvoir imposer au peuple une élection dont il ne veut pas doivent maintenant revoir leurs calculs.

Après avoir tout essayé, division, diversion, répression, menaces, ce 12e vendredi est venu enterrer leurs dernières illusions. Les manifestants ont rejeté l’élection du 4 juillet que le pouvoir a maintenu contre tout bon sens, le dialogue auquel ont appelé Ahmed-Gaïd Salah et Abdelkader Bensalah et le maintien des hommes hérités de Bouteflika à la tête des institutions de la transition.

Ils ont aussi dit non à la dérive autoritaire du pouvoir, aux manœuvres de division et aux fausses solutions. Le pouvoir n’a plus d’autre choix que de les écouter. Après l’incroyable démonstration de ce 12e vendredi, continuer à nourrir l’espoir d’un essoufflement du mouvement, c’est faire preuve d’une cécité qui risque de mener le pays droit dans le mur.

Les plus lus