search-form-close
19e vendredi : vague de dénonciation des arrestations de manifestants

19e vendredi : vague de dénonciation des arrestations de manifestants

De nombreuses arrestations de militants politiques et des droits de l’homme ainsi que des citoyens ont émaillé les marches du 19e vendredi de la révolution citoyenne pacifique. Selon un décompte non exhaustif effectué par la Ligue algérienne des droits de l’homme (LADDH), environ une trentaine de personnes ont été arrêtées essentiellement pour port de l’emblème amazigh.

En effet, selon Saïd Salhi, vice-président de la LADDH, 13 citoyens portant drapeau amazigh à Bouira ont été arrêtés et emmenés au commissariat de police. « On ignore encore s’ils ont été relâchés ou pas », s’inquiète-t-il, ce samedi.

L’ONG déclare que le jeune citoyen Mourad Ikhlef Lebid, interpellé jeudi 27 juin à Oran « pour avoir accroché un drapeau amazigh sur son balcon », a été relâché et mis sous contrôle judiciaire.

M. Salhi annonce par ailleurs que la libération des avocats Tarik Mellah et Hafidh Tamart, interpelés à Alger centre, n’a pas été confirmée. Idem pour Chami Locif, Yehiaoui Bilal, Mohand Ameziane et trois de leurs amis et également Nour Zaoua « arrêtée pour port de robe kabyle ».

En revanche, trois citoyens arrêtés à Annaba, devant le siège de sûreté de la wilaya, ont été relâchés, précise encore Saïd Salhi.

De son côté, le chargé de communication au RCD, Mourad Biatour a confirmé que Samira Messouci jeune élue (27 ans) du parti à l’APW de Tizi Ouzou et six autres militants interpellés vendredi devant le siège régional du parti à Didouche Mourad à Alger, n’ont pas été relâchés et passeront, demain dimanche, devant le procureur du Tribunal Sidi M’hamed. Le président du RCD, Mohcine Belabbas, a annoncé sur sa page Facebook qu’il sera présent devant le tribunal pour apporter son soutien à ses militants.

« Nous nous battrons pour notre projet d’une Algérie meilleure »

La députée et avocate Fetta Sadat ainsi que d’autres militants, arrêtés vendredi devant le siège du parti, ont été relâchés dans la même journée, « parce que les policiers n’ont pas trouvé sur eux le drapeau amazigh », selon Mourad Biatour.

« Ces arrestations traduisent la nature violente du régime qui essaie de casser cette révolution citoyenne pacifique » dénonce M. Biatour qui souligne que ces tentatives de briser le mouvement révolutionnaire citoyen ne vont pas entamer la détermination des militants et citoyens. « Comme nous sommes sortis hier, nous sortirons demain, nous nous battrons pour notre projet d’une Algérie meilleure et pour un Etat démocratique garant de l’alternance au pouvoir », promet-il.

Le Parti des travailleurs (PT) parle, quant à lui, de « l’arrestation de centaines de manifestants à Alger et dans d’autres wilayas », et a dénoncé, dans un communiqué de secrétariat de son Bureau politique daté de ce samedi, « les développements dangereux que connaît la scène politique depuis peu, notamment les arrestations abusives des porteurs de drapeaux amazighs »

Pour Said Sadi, « ces arrestations concernent souvent des jeunes, garçons et filles, qui veulent vivre dans un pays libre, pluriel et tolérant et évoluer en intelligence et solidarité dans un voisinage apaisé. Ils sont la sève de notre société retrouvée. Ils connaîtront des moments difficiles mais ils savent que leurs souffrances sont le viatique de la dignité et de l’honneur que leur envient déjà leurs camarades. »

Et d’ajouter : « Vouloir asseoir son pouvoir en organisant la chasse aux Kabyles donne un relief particulier au slogan « pouvoir assassin » scandé par les manifestants. En effet, il apparaît clairement que ce qui est recherché à travers ces attaques, c’est la réouverture des fractures provoquées de longue date par le système FLN pour empêcher la cohésion de la Nation de se faire dans le respect général par et pour tout un chacun. Jusque-là, la maturité et la générosité du peuple ont fait échec à ces manœuvres criminelles. »

Pour les manifestants arrêtés et maintenus en détention, « les appels contre les ordonnances de mises en détention provisoires de toutes ces personnes par les juges d’instruction ont été formulés par le collectif d’avocats qui s’est constitué bénévolement pour les défendre », a indiqué à TSA Me Noureddine Benissad, président de la Laddh. Leurs affaires « seront incessamment programmées devant la chambre d’accusation », selon l’avocat qui a également indiqué que le collectif d’avocats pour la défense de ces détenus « sera renforcé ».

La Ligue des droits de l’homme a, dans un communiqué publié ce samedi, tiré la sonnette d’alarme à la suite de ces arrestations. « Au moment où l’opinion publique attend des signaux forts d’apaisement et de bonne volonté en vue d’une solution politique à la crise, le pouvoir politique procède à contrecourant, en privilégiant la solution de la force et la répression contre le peuple pacifique qui a montré beaucoup de de retenue et de responsabilité », estime la LADDH.

De son coté, Saïd Salhi prévient : « les choix du pouvoir ne feront qu’envenimer le climat au risque de mener le pays vers l’irréparable et le chaos ».

La LADDH, appelle par conséquent, « le parquet à l’abandon de toutes les poursuites judiciaires à l’encontre des manifestant-e-s pacifiques du mouvement-Hirak qui comparaîtrons demain dimanche devant les tribunaux. Elle appelle aussi à la libération de l’ensemble des détenus d’opinion et politiques et au respect des libertés publiques et individuelles: de manifestations pacifiques, d’opinion et d’expression ».

Pour l’organisation des droits de l’homme, la voie de la manifestation pacifique est irréversible. « La LADDH appelle la population à demeurer dans le strict cadre pacifique pour l’aboutissement de ses revendications, somme toutes légitimes, de changement du système », conclut le communiqué.

« Le chef d’inculpation pour lequel ces personnes sont poursuivies n’a aucun fondement légal. Aucune disposition pénale ne sanctionne le port d’un emblème autre que l’emblème national. Pas de peine sans textes, c’est un principe fondamental du droit pénal », estime Me Benissad. Pour lui, « toutes les personnes poursuivies ont réaffirmé leur attachement au drapeau national et que le port de l’emblème amazigh est aussi un attachement à leur appartenance identitaire, dimension, au demeurant, reconnue par la Constitution. Pour la plupart d’ailleurs, ils ont porté les deux emblèmes ».

« Tenter de diviser les Algériens et Algériennes autour de cette question me semble une manœuvre pour affaiblir le mouvement et le dévier de sa principale revendication, la rupture avec le système », a dénoncé le président de la LADDH.

  • Les derniers articles

close