Économie

2019, une année sans planche à billets ?

Mise en place fin 2017 pour financer le déficit budgétaire et faire face à la dégradation de la situation des finances publiques, la planche à billets pourrait ne pas être sollicitée dès l’année prochaine. Lundi, devant la Commission des finances et du budget de l’APN, Fayçal Tadinit, Directeur général du Trésor, a pour la première fois évoqué cette éventualité : renoncer au recours du financement conventionnel, à partir de 2019, « ou d’y recourir dans une moindre mesure par rapport à 2018 ».

Selon l’agence officielle, Fayçal Tadinit a mis en avant « les nouvelles données économiques et l’amélioration de plusieurs indicateurs économiques, parmi lesquelles il fait état de la hausse des recettes fiscales pétrolières et ordinaires ». Le Trésor public est dans l’attente des chiffres et les indicateurs économiques, pour les mois de novembre et décembre 2018, avant de prendre ses décisions vis à vis du financement non conventionnel, a précisé M. Tadinit.

Cet objectif est-il réaliste ? La réponse est oui, mais les raisons avancées par le Directeur général du Trésor pour expliquer cette éventualité ne sont pas exactes. Si l’Algérie peut espérer pouvoir se passer de la planche à billets en 2019, c’est essentiellement grâce à deux facteurs indépendants de la politique économique du gouvernement.

Le premier concerne les prix du pétrole. Le projet de Loi de finances 2019 a été élaboré sur la base d’un baril à 50 dollars et un déficit budgétaire de 2000 milliards de dinars. Or, actuellement le prix moyen du baril algérien se situe à 75 dollars. Avec le même prix en 2019, l’Etat va engranger des recettes fiscales supplémentaires de 1000 milliards de dinars, ce qui ramènera le déficit à 1000 milliards.

Le gouvernement devra alors trouver les 1000 milliards de dinars manquants pour combler le déficit. En réalité, cette somme est déjà disponible dans les comptes du Trésor qui affiche à la fin juillet un solde positif de 1 246 milliards de dinars, selon la situation de la Banque d’Algérie publiée cette semaine au Journal officiel. Sauf en cas d’imprévu en novembre ou décembre, cette somme sera toujours disponible sur le compte du Trésor public au 1er janvier 2019. Elle pourra alors servir à éponger le déficit de 2019.

Ces 1 200 milliards de dinars proviennent de la planche à billets. Depuis la mise en place du financement non-conventionnel en octobre 2017 et jusqu’à mars 2018, la Banque d’Algérie a imprimé au total 3 585 dinars. « Ils ont effectué un gros tirage en un temps très court », explique un économiste. Dans le même temps, la hausse des prix du baril depuis le début de l’année en cours a permis d’engranger des recettes fiscales supplémentaires, ce qui a réduit mécaniquement le déficit de 2018. D’où la situation excédentaire du Trésor public.

Il reste toutefois deux inconnues pour 2019. La première est le prix du baril. Les analystes anticipent un maintien à un niveau supérieur à 75 dollars, voire une forte hausse dans le sillage des sanctions contre l’Iran. Mais la mort du journaliste Jamal Khashoggi a créé une nouvelle donne. Soumise à de fortes pressions, l’Arabie saoudite pourrait être amenée à accepter d’inonder le marché de sa production pour réduire l’impact des sanctions contre l’Iran. Un tel scénario pourrait ramener le baril à des niveaux inférieurs à 70 dollars.

L’autre inconnue concerne le rôle du Fonds national d’investissements (FNI) en 2019. Si comme le souhaite le gouvernement, le FNI est appelé à financer les programmes de logements et le déficit de la Caisse des retraites, le recours à la planche à billets pourrait s’avérer indispensable, quel que soit le prix du baril. 

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