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À bord du Coradia de la SNTF : entre les promesses et la réalité

À bord du Coradia de la SNTF : entre les promesses et la réalité

La SNTF a lancé, le 3 mars, l’exploitation commerciale du Coradia, son nouveau train moderne et rapide. L’acquisition du train et la livraison du premier exemplaire à Alger, fin janvier, ont été annoncées en grande pompe et accompagnées de nombreuses promesses: gain de temps, confort, amélioration du service à bord…

Pour avoir une idée précise de ce qu’il en est réellement, nous avons pris le Coradia  à Alger ce lundi 5 mars. Direction Oran, première destination desservie par ce nouveau modèle de train, en attendant le déploiement des 16 autres prévus sur les autres grandes lignes.

Alger – Oran en 4 heures ?

Avec le lancement du Coradia, beaucoup s’attendaient à un raccourcissement de la durée du voyage d’Alger à Oran. La SNTF annonce une durée de voyage de 4 heures, le train qui part d’Alger à 8h00 arrive « normalement » à midi pile à Oran. Au retour, le même train est censé repartir d’Oran à 15h00 pour arriver à Alger à 19h00.

Ce lundi, le train est parti à l’heure exacte, sans même une minute de retard, chose à laquelle sont peu habitués les voyageurs de la SNTF.

Mais durant le trajet, le train a dû s’arrêter à plusieurs reprises, des arrêts « techniques », selon l’équipage. Ajoutés à la vitesse de croisière qui n’avait rien d’extraordinaire et qui était, selon les voyageurs habitués, la même que celle des « trains confort », plus anciens. Les arrêts ont eu raison de l’objectif plus qu’ambitieux que s’est fixé la SNTF de réduire à quatre heures la durée du voyage entre la capitale et la grande métropole de l’ouest du pays.

Le train n’arrivera à la gare d’Oran qu’à 13h20, soit avec un retard de plus d’une heure et 20 minutes. Énorme.

Au retour d’Oran, le Coradia ne fera pas mieux, il partira même avec 5 minutes de retard, à 15h05, pour arriver à la gare Agha d’Alger à 20h25. Soit une heure et 25 minutes de retard.

Si le nouveau « bijou » de la SNTF n’est ni ponctuel, ni rapide, il aura au moins eu le mérite d’être extrêmement précis et régulier, puisqu’il aura fait l’aller et le retour en exactement la même durée de 5 heures et 20 minutes.

Le Coradia n’est certes pas un TGV, sa vitesse maximale est de 160 km/h, tel qu’annoncé sur le site de la SNTF et il n’est qu’à sa troisième rotation mais, au vu de l’expérience de ce lundi, la durée de quatre heures pour le trajet  Alger – Oran promise par la SNTF parait trop optimiste.

On pourrait s’attendre à un raccourcissement de ce temps de trajet avec le temps et avec le « rodage » du train, mais le même optimisme exagéré a été constaté chez la SNTF à la veille du lancement de la ligne Alger-Tizi Ouzou, en avril 2017.

La compagnie ferroviaire nationale avait annoncé une durée de trajet de 40 à 50 minutes mais depuis, il faut au moins une heure et quart, pour rallier la capitale par train à partir de Tizi Ouzou.

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Un confort amélioré ?

L’autre grande promesse faite par la SNTF concernant le Coradia était l’amélioration du confort. Le train est certes beau, avec un profil élancé qui change des trains vieux parfois de plusieurs décennies que la compagnie utilise pour ses grandes lignes, mais pour ce qui est du confort, les avis des voyageurs restent mitigés.

Si certains apprécient l’esthétique intérieure du train, son aménagement résolument moderne, d’autres estiment que le nouveau train n’apporte pas de grandes améliorations.

Samir, un passager du Coradia parti d’Alger remarque que « les sièges des trains confort sont plus larges, mieux rembourrés, moins fatigants et offrent plus d’espace pour les jambes ».

D’autres voyageurs se sont même étonnés que le Coradia soit moins large que les anciens trains, ce qui crée selon eux, une sensation oppressante de confinement.

La SNTF propose deux formules pour les passagers de son nouveau train : une première classe à 2000 dinars pour un adulte et une deuxième classe à 1700 dinars.

En déboursant 300 dinars de plus, les passagers de la première classe ne bénéficient, apparemment, que de trois avantages : des sièges en imitation de cuir de qualité alors que ceux de la deuxième classe sont en tissu, des éclairages individuels et des prises de courant sous les sièges.

Pour ce qui est des services, de l’espacement des sièges ou de leur confort, aucune différence notable entre les deux classes, y compris pour le repas offert aux passagers durant le trajet.

Fourni par Air Algérie Catering, celui-ci n’a rien de particulier : salade de riz ou de pâtes, pâté de viande, pain, eau, chocolat. Ni bon, ni mauvais, le « snack » permet tout juste de calmer une fringale.

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Un équipage aux petits soins

S’il y a un point positif à signaler, c’est bien l’équipage du train qui a été durant tout le trajet aux petits soins avec les passagers.

Les hôtesses et les stewards sont la grande nouveauté introduite par la SNTF sur son nouveau train. Ceux-ci, tous jeunes et aimables, ont été à l’écoute et ont rendu des services précieux aux passagers.

Des agents d’entretien ont également fait partie du staff. Ceux-ci se chargeaient de nettoyer la moindre tache ou éclaboussure sur les sièges ou sur le plancher et ont fait le nécessaire pour garder le train parfaitement propre et son air frais et parfumé.

Malgré quelques couacs, tels qu’une orientation inefficace des passagers de la première classe aux sièges qui leur ont été assignés, ou les annonces sonores hésitantes et peu compréhensibles, faites seulement en arabe et en français alors que Tamazight, langue nationale et officielle est oubliée par la SNTF, l’équipage a su apporter un petit plus qui a séduit les passagers. Reste à savoir si ça va durer.

Toutefois, de l’avis de nombreux usagers ayant voyagé en Coradia ce lundi, ces améliorations ne justifient pas l’augmentation du prix du billet de train pour le trajet Alger – Oran.

Celui-ci est passé de 900 dinars, sur les anciens trains, à 1700 dinars pour la deuxième classe et de 1200 dinars à 2000 dinars pour la première classe, sans pour autant que la durée du trajet ne soit raccourcie ou que le confort ne soit amélioré de façon spectaculaire.

« Payer 800 dinars de plus pour une prise de courant et un repas froid tout en faisant le trajet en la même durée qu’avant n’est pas justifié à mes yeux, surtout que je préfère les paninis au thon des anciens trains, même s’ils n’étaient pas gratuits », regrette Abdelkader, jeune ingénieur d’Oran travaillant pour une entreprise publique à Alger et habitué à faire le trajet entre Alger et Oran en train.

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