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À Tunis, Abdelkader Hadjar évoque « la farouche opposition » à l’arabisation en Algérie

À Tunis, Abdelkader Hadjar évoque « la farouche opposition » à l’arabisation en Algérie

La France et le courant francophone en Algérie ont « actionné » la question berbère, à la fin des années 1970, pour freiner le projet de l’arabisation. C’est ce qu’a laissé entendre Abdelkader Hadjar, ambassadeur d’Algérie à Tunis et ancien président de la Commission d’arabisation, installée par Houari Boumediène en mars 1972, d’après un compte rendu publié par Echourouk.

Intervenant lors d’une conférence, organisée à Tunis par la Fondation Temimi pour la recherche scientifique, à l’occasion de la célébration de la journée internationale de la langue arabe, qui coïncide avec le 18 décembre, Abdelkader Hadjar a précisé que « le printemps amazigh » (début des années 1980) a éclaté à Tizi Ouzou après la décision, prise en décembre 1979, d’arabiser l’école fondamentale (créée par ordonnance en 1976) et les sciences sociales à l’université.

À l’époque, Abdelkader Hadjar était membre du comité Culture et éducation du FLN. Les membres du comité ont, selon lui, fait une tournée dans les wilayas pour expliquer un projet d’arabisation de l’administration dans tous les secteurs. Présidé par Chadli Bendjedid, qui a succédé à Houari Boumediène, le FLN avait décidé de créer un Haut conseil à la langue arabe que devait diriger Abdelhamid Mehri. Le Conseil devait remplacer le Comité d’arabisation.

Les événements de Tizi Ouzou ont, selon Abdelkader Hadjar, amené le pouvoir à ne prendre aucune décision par rapport à l’arabisation de l’administration.

Arabisation des commerces et des entreprises

Le projet est resté gelé jusqu’à 1991. A cette date, l’APN, présidé par Abdelaziz Belkhadem, a décidé de promulguer le texte portant généralisation de l’utilisation de la langue arabe (qui devait s’achever en juillet 1992). Membre du comité politique du FLN, Abdelkader Hadjar a fait passer des recommandations, lors du quatrième congrès du parti, pour faire « appliquer sur le terrain » les décisions prise par la conférence sur l’arabisation, organisée en mai 1975.

La conférence a décidé d’arabiser l’environnement (rues, frontons de ministères, de wilayas, d’administrations publiques et entreprises). Les noms européens et français ont été remplacés par des noms de martyrs algériens dans les rues des villes. À Alger, seule la rue Pasteur a gardé son appellation « parce que le savant avait apporté une grande contribution pour l’humanité ».

Les gérants des boutiques, cafés et restaurants ont été destinataires de décision d’arabisation de leurs vitrines, plaques et frontons. « L’opération a réussi malgré la farouche opposition des adversaires dont certains avaient des postes influents au sein du pouvoir. Ils avaient tenté de faire échouer l’arabisation », a-t-il dit.

Selon lui, la lutte était féroce entre « les défenseurs de la langue arabe » et ceux « qui s’accrochaient à la langue française ». « Mais, finalement, les partisans de l’arabisation avaient gagné parce qu’ils étaient soutenus par Houari Boumediène », a-t-il noté.

Mostefa Lacheraf attaqué par Mohamed Salah Yahiaoui

Le gouvernement nommé par Boumediène en 1977 comptait, d’après lui, des défenseurs du français. Il a fait ralentir l’opération. Il faisait allusion à Mostefa Lacheraf, nommé dans ce gouvernement ministre de l’Education, à Reda Malek, désigné ministre de la Culture et de l’Information (dans sa conférence Hadjar n’a pas cité ces noms). Il a rappelé que Mohamed Salah Yahiaoui, alors à la tête du FLN, avait attaqué frontalement, lors d’une réunion, le ministre de l’Education, hostile à l’arabisation. Après la mort de Boumediène, Abdelkader Hadjar avec Boualem Benhamouda ont engagé des actions, à travers le FLN, alors parti unique, pour concrétiser l’arabisation totale des sciences sociales à l’université et tous les paliers de l’enseignement scolaire y compris les filières scientifiques.

La loi sur l’arabisation bloquée par Ghozali

La loi portant généralisation de la langue arabe, selon Abdelkader Hadjar, a été bloquée par le gouvernement de Sid Ahmed Ghozali.

« Ils ont fait comprendre au président Boudiaf que cette loi était dangereuse et qu’elle pouvait entraînée une paralysie du pays », a-t-il dit. Le débat sur le gel de la loi a commencé le 29 juin 1992 à Alger au niveau Conseil consultatif national (CCN, qualifié de Conseil des Janissaires par Hadjar). Le jour même Mohamed Boudiaf fut assassiné à Annaba.

« Malgré cela, le débat sur le gel la loi sur la généralisation de la langue arabe s’est poursuivi. Le gel a eu lieu. Le pays entrait dans une phase difficile et la question de l’arabisation était devenue secondaire », a souligné Hadjar.

La levée du gel de la loi a eu lieu en 1996 sur décision du président Liamine Zeroual. Cela n’a pas empêché, d’après lui, un retour graduel du français dans l’administration, les ministères et dans les devantures des commerces et les entreprises privées. Les ennemis de l’arabe, d’après lui, prétendaient que cette langue n’était pas celle des sciences, mais celle des lettres, et que le français est celle du progrès.

« Le comité sur l’arabisation a apporté les preuves soutenant le contraire et montrant que tout ce qui est dit sur l’arabe est faux », a-t-il noté disant que les membres du comité n’ont pas cessé d’être la cible d’attaques des partisans du français en Algérie.

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