search-form-close
Achat de sièges de député : Tliba plante le dernier clou dans le cercueil du Parlement

Achat de sièges de député : Tliba plante le dernier clou dans le cercueil du Parlement

Il suffisait pour le discrédit du Parlement actuel, avec ses deux chambres, d’avoir été élu sous le règne de l’ancien président de la République Abdelaziz Bouteflika, un régime dont de nombreuses têtes sont poursuivies et lourdement condamnées pour corruption.

Il va de soi que des responsables qui ont peu fait cas de la préservation des deniers publics puissent se soucier de la régularité des élections. Les fraudes qui ont entaché les scrutins de ces deux dernières décennies, et même ceux d’avant, furent du reste dénoncées en leur temps par toute la classe politique, exceptés les partis qui ont en tiré profit.

Si les suspicions de fraude sont toujours restées au stade des accusations sans suite, le fameux coup du « cadenas » qui a vu en octobre 2018 les députés de la majorité destitués par la force du président de l’APN, au mépris de la loi qui stipule qu’il est élu pour la durée de la législature, est, lui, un fait avéré qui a choqué l’opinion et conforté ceux qui contestaient au Parlement toute crédibilité.

Les révélations faites lors du procès qui a eu lieu mercredi dernier devant le tribunal de Sidi M’hamed (Alger) constituent en quelque sorte le coup de grâce.

Elles permettent aussi de mettre des chiffres sur une pratique que tout le monde savait courante au moins depuis les législatives de 2007, la chkara. Baha Eddine Tliba a donc, selon ses propres aveux devant le tribunal, payé cher sa place de député FLN : 7 milliards de centimes pour être tête de liste du parti à Annaba lors des législatives de 2017.

Si l’on tient pour vrai l’autre chiffre révélé à la même occasion, celui de 300 milliards de centimes comme montant glané par ceux qui confectionnaient les listes de l’ancien parti unique pour la même élection, on peut légitimement se demander si ce ne sont pas toutes les « bonnes places » sur les listes du parti qui ont été ainsi attribuées.

La révélation est d’une extrême gravité car tous ceux qui ont été portés sur les premières places ont fini par être élus, ont siégé et siègent encore à l’assemblée et voté des dizaines de lois. Surtout, ils s’apprêtent, conformément à la loi fondamentale en vigueur, à débattre et voter la nouvelle constitution, censée jeter les jalons du renouveau du pays.

La crédibilité du processus de changement en jeu

Le FLN avait remporté 220 des 462 sièges que compte l’APN, soit presque la majorité absolue. Qu’en est-il alors des autres formations politiques de la défunte alliance présidentielle qui comptait l’essentiel des soutiens du régime du président déchu Abdelaziz Bouteflika ?

À eux deux, le FLN et le RND détenaient au soir du scrutin, près de 300 sièges sur 462, un chiffre gonflé au fil des mois par le ralliement d’élus d’autres formations.

Si la régularité de l’élection d’une partie de l’assemblée est ainsi remise en cause, la légalité des lois qu’elle a votées le sera tout aussi, de même que la légitimité des ministres placés au gouvernement par ces partis dits de « la majorité ». La suspicion ne peut épargner également les assemblées communales et de wilayas, raflées par les mêmes partis.

Dès son élection en décembre dernier, le président de la République Abdelmadjid Tebboune avait mis l’adoption d’une nouvelle constitution et le renouvellement des assemblées élues en tête des priorités de son action.

Pour la révision constitutionnelle, les choses semblent avoir bien avancé et le référendum aura lieu dans moins de deux mois. Pour les élections locales et législatives anticipées, c’est le flou total. On sait juste qu’elles ne pourront pas avoir lieu avant le référendum sur la nouvelle constitution et qu’il sera techniquement difficile pour les autorités de les tenir avant la fin de l’année comme envisagé il y a quelques mois.

À moins que les révélations faites lors du procès Tliba-Ould Abbas fassent leur effet et accélèrent le processus de mise sur la touche d’assemblées qui, pour le moins, ont été élues dans des conditions discutables.

Le processus de changement gagnerait en crédibilité à ne pas soumettre les importants projets de réformes annoncés, censés changer le visage du pays et le débarrasser de pratiques qui l’on entravé dans sa marche vers le développement, à des députés qui ont payé leur siège.

| LIRE AUSSI :

Révision de la constitution : la dernière ligne droite

Ventes des sièges de députés : ce qu’a dit le fils d’Ould Abbès sur Saïd Bouteflika

  • Les derniers articles

close