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Algérie-Maroc : ce que révèle le dérapage du Consul marocain

Algérie-Maroc : ce que révèle le dérapage du Consul marocain

Nouvel épisode dans le long feuilleton des incidents diplomatiques entre l’Algérie et le Maroc. Cette fois, c’est un fonctionnaire de rang subalterne, le Consul du Maroc à Oran en l’occurrence, qui le déclenche.

Sciemment ou sans le vouloir, cela ne change rien à la gravité des propos qu’il a tenus devant des ressortissants de son pays dans la grande ville de l’ouest algérien.

« Nous sommes dans un État ennemi, je vous le dis franchement », a-t-il déclaré à ses concitoyens bloqués en Algérie depuis le début de la pandémie du coronavirus et venus réclamer leur rapatriement vers leur pays.

Ça ressemble bien à une tentative de se défausser d’un fonctionnaire défaillant et acculé. Quoi de mieux que de titiller la fibre patriotique pour calmer une foule de contestataires ? Si telle est la visée du diplomate marocain, cela signifie que ses graves propos n’ont rien d’un lapsus ou d’une glissade involontaire et que, surtout, il ignore l’état d’esprit de ses concitoyens, précisément par rapport à la relation avec l’Algérie et le peuple Algérien.

Les Marocains n’ont aucune animosité vis-à-vis des Algériens, qu’ils considèrent, à juste titre, comme un peuple frère par le sang, la géographie et bien d’autres facteurs. Et vice-versa. L’expression spontanée de ces liens forts se fait régulièrement à l’occasion de victoires sportives respectives (comme celle de l’Algérie à la dernière Can en Égypte), la musique, la solidarité dans l’émigration.

Comme elle s’est exprimée dans le feu de la guerre de Libération par le soutien apporté par le Maroc à la cause nationale et la tenue de la conférence de Tanger qui allait poser le premier jalon de la construction maghrébine.

Aujourd’hui encore, des images émouvantes de citoyens des deux pays échangeant des gestes affectueux de part et d’autre de la frontière fermée depuis un quart de siècle, sont régulièrement partagées sur les réseaux sociaux.

Les dirigeants des deux États ont des visions différentes, sur la question du Sahara occidental, considéré par le Maroc comme une partie intégrante de son territoire et par l’Algérie comme une question de décolonisation relevant des Nations-Unies.

C’est cette même divergence qui fait que les relations bilatérales ne sont pas ce qu’elles devaient être et que l’intégration maghrébine n’avance pas, trente ans après le lancement du processus.

Cette question du Sahara a beau empoisonné l’atmosphère dans la région et la relation entre les deux pays a beau passé par des périodes exécrables, le mot « ennemi » n’a jamais été utilisé, de part et d’autre.

En Algérie comme au Maroc, on a toujours parlé, en toutes circonstances et à tous les niveaux, de « peuple frère ». L’expression est devenue une constante dans les propos des diplomates et des politiques des deux pays même lorsque l’objet est la question qui fâche.

C’est une réalité historique, sociologique et géographique indéniable : ce qui unit les peuples algérien et marocain est plus fort et plus ancré que ce qui les sépare. C’est pourquoi les propos du Consul sont condamnables et appellent une ferme réaction, de sa hiérarchie d’abord.

En parlant de hiérarchie, il est regrettable de rappeler que la sortie du diplomate en poste à Oran intervient après une série d’attaques vis-à-vis de l’Algérie, à plus haut niveau du côté marocain. La dernière en date est celle de Nacer Bourita, ministre des Affaires étrangères du royaume, qui, début mai, accusait le voisin de l’Est d’ « alimenter le séparatisme ».

Le même responsable a multiplié les sorties similaires depuis le début de l’année, comme ses prédécesseurs. D’autres avaient réclamé –et continuent à le faire- une partie du territoire algérien. Les propos du Consul marocain trahissent en fait l’état d’esprit d’une partie des dirigeants du Makhzen dont l’hostilité à l’égard de l’Algérie frise l’obsession.

Quand on appuie sans modération sur l’accélérateur, le dérapage n’est pas loin.

Les autorités du royaume n’ont pas encore officiellement réagi à cette glissade verbale, mais la grande déception vient de la presse marocaine qui, ce jeudi, s’employait, à coup de « sources anonymes » à convaincre que le Consul a été victime d’un montage vidéo.

C’est cette même presse qui avait salué en 2017 l’attitude des journaux et sites électroniques algériens face aux accusations de Abdelkader Messahel, alors chef de la diplomatie algérienne, vis-à-vis de la compagnie aérienne marocaine.

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