Après une décennie de sommeil, quelques opérations récentes semblent traduire un réveil timide du département obligataire de la Bourse d’Alger.
La Société de refinancement hypothécaire (SRH) a annoncé qu’elle vient de réussir l’opération d’émission d’un emprunt obligataire de 5 milliards de DA sur le marché financier. Le taux d’intérêt associé à cet emprunt est de 5,2% sur une période de cinq ans, a indiqué la société dans un communiqué.
Le produit de l’émission aura vocation à être affecté aux besoins de financement de la société notamment au refinancement des crédits hypothécaires destinés au logement et le financement du leasing immobilier (crédit-bail), a précisé la SRH. L’émission a été réalisée conjointement par le Crédit populaire d’Algérie en tant que chef de file, plusieurs banques publiques ainsi que Société générale Algérie , BNP-Paribas el Djazair et Tell market, a précisé le communiqué.
En octobre dernier, c’est Nafaâ Arbous président du directoire de Maghreb leasing Algérie (MLA) qui annonçait le succès d’un emprunt obligataire d’une valeur de 2 milliards de dinars assorti de taux d’intérêt variant entre 4 et 6% sur une période de 5 ans . « Dans le prolongement de ce lancement réussi, MLA ambitionne de lancer annuellement un emprunt à hauteur de 1 à 4 milliards de dinars, et ce dans l’optique de pérenniser cette stratégie de financement », avait souligné M. Arbous .
Le marché obligataire détruit par la politique de subvention du crédit
Ces deux opérations seraient-elles annonciatrices d’une relance du marché obligataire algérien ? Les spécialistes évoquent un « âge d’or » du département des obligations de la Bourse d’Alger entre 2003 et 2010 avec les premières émissions réalisées par des acteurs économiques publics et privés de premier plan.
Sonatrach, Sonelgaz, Air Algérie ou Algérie Télécom mais aussi des entreprises privées parmi les plus dynamiques comme Cevital. Des émetteurs qui s’étaient lancés dans des opérations jugées à l’époque très volontaristes, mais qui avaient également bénéficié de conditions de financement avantageuses.
Selon l’expert financier Hachemi Siagh, le coût de l’émission réalisée par Cevital n’avait pas dépassé, tous frais compris, un taux de 3,8% alors que les taux d’intérêt bancaires étaient voisins de 7% ».
Une dynamique qui malheureusement a été rapidement enrayée en raison de la politique mise en œuvre par les autorités financières algériennes elles-mêmes.
Explication : à partir de janvier 2010, les cours pétroliers sont en hausse très sensible et les banques algériennes se retrouvent rapidement en situation de surliquidité.
Le ministère des Finances décide alors de mettre en place un système de subvention des taux d’intérêt basé sur des bonifications très nombreuses et généralisées. Cette subvention massive du crédit va provoquer d’abord une réduction sensible du programme d’émission obligataire de la place d’Alger « prévu en 2003 à 32 émissions et ramené rapidement à seulement une quinzaine ».
Un programme qui n’a pas cessé de se rétrécir depuis cette date avant d’être réduit à sa plus simple expression dès le début de la décennie en cours .
Une nouvelle conjoncture favorable à la relance du marché financier
Les conditions macroéconomiques semblent désormais favorables à la relance du marché financier algérien. La surliquidité des banques algériennes appartient au passé et les ressources du budget de l’État sont en forte réduction, ce qui devrait conduire à une remise en cause rapide des politiques de subvention du crédit.
La voie serait alors libre pour les retours sur le marché obligataire des entreprises algériennes publiques et privées les plus performantes.
On attends cependant toujours le recours au marché obligataire de plusieurs groupe publics, Sonelgaz en tête, évoqué au cours des derniers mois par les responsables économiques algériens.
Le financement non conventionnel est passé par là. Deux des entreprises potentiellement candidates au financement par le marché obligataire, Sonatrach et Sonelgaz, ont été les premières bénéficiaires, pour des montants considérables (on parle de respectivement 900 et 600 milliards de dinars ), de la mise en route de la planche à billet dès le dernier trimestre de 2017.
Le rôle du FNI en question
Dans la nouvelle conjoncture financière marquée par la raréfaction des ressources budgétaires, le rôle du Fonds National d’Investissement (FNI) est également sur la sellette.
Le fonctionnement du FNI depuis sa création a en effet largement contribué à la quasi extinction du marché financier auquel il s’est substitué partiellement en accordant des prêts à long terme et très fortement bonifiés à de nombreuses entreprises publiques potentiellement candidates au financement par le marché.
De nombreux experts estiment que le FNI devrait être transformé complètement pour acheter des actions et des obligations à la manière d’institutions financières comme la Caisse des dépôts et consignation française ou la CDG marocaine dans le but de permettre à de nombreuses entreprises publiques comme privées de grandir et se développer en contribuant à la dynamisation du marché financier. Ce n’est pas non plus l’orientation retenue récemment par les autorités algériennes qui semblent également avoir décidé de faire du FNI un des bénéficiaires du financement non conventionnel.