Politique

Bouteflika, Toufik, l’armée, la religion, le Maroc, la France… Ce qu’a dit Ali Ghediri

Ali Ghediri s’est exprimé, ce mardi 5 février, sur TSA Direct. Le candidat a répondu à nos questions sur plusieurs dossiers. Nous vous proposons un résumé de ce qu’il a dit.

Le bilan de Bouteflika

« Je reviens à son slogan, une Algérie forte et digne. Où est l’Algérie forte et digne ? Sur le plan économique, je pense qu’il n’y a pas de commentaires à faire là-dessus, c’est la planche à billet qui fait fonctionner le pays. Y a-t-il eu de grandes réalisations économiques ? Sommes-nous sortis de l’économie de la rente ? A-t-on produit et exporté autre chose que le pétrole ? ».

Les réactions à ses écrits

« Il n’y a pas pire que de susciter de l’indifférence. Si je les ai fait réagir, c’est que j’ai fait de l’effet. S’ils ont réagi c’est qu’ils ont estimé qu’il y avait des choses à dire. Il n’y a pas de monopole de l’ambition ».

Le général Toufik

« Il était responsable d’un appareil et moi directeur central, on devait nécessairement avoir des relations fonctionnelles. On s’appelle à l’occasion de l’Aïd, lui ou d’autres. Ce serait de l’impolitesse de ne pas garder les relations. Vous pensez par exemple que je n’irai pas à l’enterrement du général Guenaizia qui était mon commandant ? Ils parlent de Toufik, pourquoi ils ne parlent pas des autres généraux ? Et puis, Toufik, c’est eux qui l’ont utilisé. Quand il était à la tête du DRS, c’est lui qui contribuait avec eux dans la politique pas moi. Maintenant qu’ils l’ont jeté, qu’est-ce qu’il peut m’apporter ? Quand il pouvait être utile, c’est eux qui l’ont pris ».

Son départ à la retraite

« En ma qualité de directeur central des ressources humaines au MDN, j’étais parmi ceux qui ont élaboré le statut des personnels militaires dans lequel on a fixé l’âge de départ à la retraite, qu’on a lié au grade. Quand j’ai atteint l’âge, il était inconcevable que je reste alors que j’avais moi-même élaboré cette loi. Je pensais à la réaction de mes subordonnés. Et puis, je pense que l’alternance a commencé dans l’armée. Moralement, je ne pouvais pas continuer. Quant à la longévité de Gaïd-Salah dans son poste, je pense qu’il faudra lui poser la question à lui et au président de la République ».

L’armée

« Je viens pour réformer et aucun secteur n’échappera aux réformes, y compris l’armée. Je suis bien placé pour en parler et je suis bien outillé pour le faire. Concernant le service national, je peux dire aux jeunes que les mesures qui seront prises seront dans leur intérêt et je pense qu’elles dépasseront leurs espérances. (…) L’armée doit être une institution au service de la nation, du peuple, de la sécurité et de la défense du pays, pas au service d’un régime politique ».

La rupture

« La rupture c’est avec la corruption, les institutions non démocratiques, avec les pratiques qui rétrécissent les libertés individuelles, avec le contrôle de toute chose, dont l’appareil judiciaire, avec tout ce qui entrave l’Algérie et sème le désespoir chez les Algériens. Je ne suis pas un procureur pour mettre les gens en prison ou demander des comptes. Je viens pour régler les problèmes du pays, pour répondre aux préoccupations du citoyen et à son aspiration à une vie meilleure afin de réduire ce fossé entre le peuple et le gouvernement ».

L’économie

« Un pays avec les capacités de l’Algérie n’aurait jamais dû se retrouver dans une telle situation. Je pense que le problème est avant tout politique. Si on réussit à réformer les institutions et à revoir la philosophie de la gouvernance, l’Algérie sortira de la crise la tête haute. (…) Dans ma conception, l’économie ce n’est pas des entreprises publiques ou privées. Ni les unes ni les autres ne peuvent nous sortir seules de la crise. Pour moi le capital public ou privé doit être productif et régi par les lois de l’État, payer ses impôts, créer de la valeur ajoutée et des emplois. Il n’y a pas de différence entre les secteurs public et privé. (…) Il faut cesser d’exporter un seul produit, à l’état brut d’ailleurs. Il faut mettre en place une industrie de transformation et une économie de la connaissance qui dégage une plus-value conséquente. (…) Nous allons mettre en place des mécanismes pour réduire la part de l’informel dans l’économie. (…) Le pouvoir parle de la politique sociale comme d’une faveur, alors que l’État social a été acté dans la déclaration de Novembre ».

La corruption

« On ne peut pas combattre la corruption si le citoyen n’a pas sa place dans l’équation politique. C’est le citoyen qui commence à montrer du doigt les corrompus. On ne peut pas combattre la corruption si la justice attend les injonctions par téléphone ou si les instances créées à cet effet sont gelées et attendent des décisions. La corruption est aujourd’hui une menace pour la sécurité nationale. Pour la combattre il faut mettre en place des mécanismes dont le premier c’est la séparation des pouvoirs. Lorsque le juge n’attendra pas d’ordre du politique, je pense que les choses irons mieux ».

La religion

« Nous sommes un pays musulman. L’islam a été érigé en principe dans la déclaration de Novembre. Avec l’islam nous nous sommes libérés et avec l’islam nous nous développerons. Pas l’islam politique, mais un islam qui sert le pays et les gens. L’islam est une partie intégrante du fonds national, il a sa place, mais il ne faut pas laisser les uns ou les autres l’instrumentaliser. Il doit rester le socle de cette nation. La religion doit rester à sa place et la politique à la sienne, mais on ne peut pas négliger ce segment important de notre personnalité et de notre civilisation ».

La culture

« Il y a un système d’accaparement qui a fait la spécificité du système politique algérien. On s’est accaparé de l’histoire, de l’identité, des richesses, de la religion, chacun à sa manière, et la culture fait partie de ces espaces d’accaparement. Il faut rendre la culture au peuple, à travers la promotion de l’art, des langues, et de tout ce qui touche à la culture pour qu’elle rayonne, en premier lieu, sur le territoire national. Nous avons les moyens de le faire. Culturellement nous sommes une mosaïque, on peut donc faire rayonner notre culture sur l’espace qui nous est proche ».

L’Afrique et le Monde arabe

« Je ne vois pas l’Algérie sans force, je la perçois comme puissance régionale et j’œuvrerai pour qu’elle le soit. C’est sur cette base-là que sera basée notre politique extérieure. Pour la notion de puissance, les gens ont tendance à focaliser sur le canon et l’avion. Ça ce n’est qu’un aspect. Quelle puissance on a si on importe son blé, son médicament, 90% de nos besoins ? (…) Je ne vois pas une Algérie qui tourne le dos à l’Afrique, car jusque-là elle l’a assez tourné. On fait partie de cet ensemble qu’est le monde arabo-musulman, qu’on le veuille ou pas. Nous restons dans cet ensemble, mais en tant que puissance. Un million et demi de martyrs ne sont pas morts pour que l’Algérie attende sur un strapontin qu’on lui donne la parole. Nous avons des atouts qui nous permettent de faire entendre notre voix au sein de la Ligue arabe et ailleurs ».

Le Maroc

« L’ouverture des frontières avec le Maroc, ce n’est pas le point le plus important. L’important c’est d’édifier le grand Maghreb. Les grands ensembles géopolitiques ne peuvent pas se construire autour du vide. Il faut un noyau dur. Notre position et nos atouts font de nous un pays qui jouera en cela un rôle essentiel, et on le jouera ».

La France

« Il faut dépassionner le débat avec la France et fermer la porte devant ceux qui font de notre histoire commune un fonds de commerce pour leur politique intérieure. On doit être forts pour lui imposer notre point de vue. Cela fait vingt ans qu’on réclame des excuses, en vain. On répond aux puissants pas aux faibles. Si on était puissants, nos enfants n’iraient pas chez eux sur des barques de fortune ».

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