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Comment l’Algérie est passée du statut de pays importateur à celui d’exportateur de ciment

Comment l’Algérie est passée du statut de pays importateur à celui d’exportateur de ciment

New Press

La production nationale de ciment devrait dépasser la barre des 25 millions de tonnes en 2017, révèle un document du ministère de l’Industrie et des Mines sur la situation de la filière de production de ciment en Algérie, dont TSA détient une copie. La production nationale s’établissait à 17.5 millions de tonnes en 2010 et à 22 millions de tonnes en 2016.

Plus 96% des capacités de production de ciment en Algérie sont le fait de deux grands groupes, GICA (public) et Lafarge-Holcim. Ces derniers produisent respectivement 13.5 millions de tonnes et 11.1 millions de tonnes.

Hausse de la capacité de production

La capacité de production de l’Algérie, qui compte 17 cimenteries en service, est passée de 20 à 25 millions de tonnes entre de 2015 et 2017 grâce à la réception de plusieurs projets d’extension ou de nouvelles cimenteries. Parmi ces projets figurent l’extension depuis janvier 2017 de la cimenterie d’Ain El Kebira à Sétif, du Groupe GICA, d’une capacité de 2 millions de tonnes par an, la réception de la cimenterie CILAS à Biskra avec une capacité additionnelle de 2.7 millions de tonnes en 2017. Ou encore la réception de nouvelles cimenteries d’opérateurs privés comme celle du Groupe Lamouri à Biskra ou celle de l’Entreprise Hamel à Adrar dont la capacité de production est d’un million de tonnes chacune.

Hausse de la demande nationale

Si la production nationale a augmenté, la demande a suivi la même courbe ces dernières années. Celle-ci est en effet passée de 20 millions de tonnes en 2010 à 26 millions de tonnes en 2016. Pour couvrir cette demande supérieure à la production nationale, l’Algérie a été dans l’obligation d’importer 6 millions de tonnes de ciment en 2015 et 3.5 millions de tonnes en 2016.

La baisse entre les deux années s’explique notamment par l’instauration du régime des licences d’importations ayant bloqué les importations de ciment. Les 3.5 millions de tonnes de ciment importées en 2016 ont coûté 260 millions de dollars, contre 448 millions de dollars d’importation de 6 millions de tonnes de ciment en 2015.

Il est à noter que les importations de clinker (constituant du ciment) ont doublé entre 2015 et 2016, passant de 601 109 tonnes pour 35,42 millions de dollars à 1,24 million de tonnes, pour un montant de près de 59,51 millions de dollars.

Cette hausse spectaculaire « serait vraisemblablement due à des problèmes techniques intervenus au niveau de la cimenterie CILAS (Lafarge-Souakri) pour la production du clinker », avance le rapport du ministère de l’Industrie.

Nouvelles cimenteries

Plusieurs projets de nouvelles lignes de productions ou de nouvelles cimenteries sont en cours de réalisation. À Chlef, le projet de réalisation d’une nouvelle ligne de production de 2 millions de tonnes de ciment par an dispose d’un taux d’avancement global actuel estimé à 81%, et devrait entrer en production en 2019.

À Zahana, le taux d’avancement du projet de réalisation d’une nouvelle ligne de production de 1,5 million de tonnes n’est qu’à 18%, et ne devrait entrer en production qu’à l’horizon 2020. Deux cimenteries sont également en cours de réalisation, une à Béchar avec une capacité de production d’un million de tonnes annuel et une à Segus avec une capacité de production prévue de 2 millions de tonnes. Les deux cimenteries devraient entrer en service en 2020.

Ces différents projets de nouvelles lignes de production ou de nouvelles cimenteries devraient ainsi propulser la capacité de production de l’Algérie à 40.6 millions de tonnes en 2020, dont 20 millions de tonnes de capacité au Groupe GICA. Le groupe Lafarge devrait pour sa part atteindre les 11.1 millions de tonnes de production en 2020.

La capacité de production des autres opérateurs privés dont les projets ont été lancés devrait quant à elle se situer à 9.5 millions de tonnes de ciment par an en 2020. Il s’agit de trois cimenteries : à Biskra par la « SPA Biskria » d’une capacité de 4.5 millions de tonnes par an et actuellement mis partiellement en exploitation, à Adrar par la « Sarl Sidi Moussa Travaux Généraux et Promotion Immobilière » d’une capacité de 3 millions de tonnes annuels et actuellement en phase d’essais, et une cimenterie à Laghouat du « Groupement Amouda Engeneerig [sic] » d’une capacité de près de 2.1 millions de tonnes par an et en cours de réalisation.

Quatre projets ont par ailleurs été approuvés par le Conseil National de l’Investissement mais n’ont pas encore été lancés ou sont à l’arrêt. Parmi eux, le projet de cimenterie du « Groupe ETRHB Haddad » à Relizane, validé en mars 2016 et dont la capacité de production est de 6 millions de tonnes par an, le projet de la Hodna Cement company d’une capacité à M’sila (2,6 millions de tonnes par an), et de l’Asec ciment à Djelfa (1,5 million de tonnes) et de la Briqueterie moderne de Said (1 million de tonnes).

Surplus de production

Selon le rapport, un surplus de production, de 12,5 millions à 13,5 millions de tonnes par an, sera enregistré en 2020. Deux hypothèses sont avancées par le ministère de l’Industrie et des Mines. La première table sur « une baisse de la demande nationale en 2018 à 23,6 millions de tonnes », suivie d’ « une tendance haussière en 2020 à 24,7 millions de tonnes ».

La seconde hypothèse est basée sur « une hausse de la demande nationale au cours des trois prochaines années (26,8 millions de tonnes en 2018, 27,6 en 2019 et 28 en 2020 ». « Ce niveau de surplus prévisionnel (12,5 à 13,5 millions de tonnes par an ) ne tient pas compte des capacités additionnelles des projets non lancés, ce qui pourrait porter le surplus à plus de 23 millions de tonnes par an », note le rapport.

Comment écouler le surplus de ciment

La hausse des capacités de l’Algérie dans la production de ciment créera inévitablement une situation de surplus, que le ministère de l’Industrie et des Mines espère « pouvoir écouler sur les marchés internationaux ». Le ministère de l’Industrie et des Mines estime en outre qu’« une partie de ce surplus pourrait être également destinée à la réalisation de routes et plateformes en substitution aux produits pétroliers. Dans ce sens, Lafarge vient de conclure un contrat avec l’APC d’Alger pour le revêtement de trottoirs en utilisant du ciment (opération lancée) », avance le rapport.

La problématique de l’exportation du ciment algérien est d’ailleurs clairement posée dans le rapport du ministère de l’Industrie et des Mines, qui fait part des préoccupations des principaux cimentiers en Algérie. Le groupe Lafarge estime notamment que « le recours aux exportations pour écouler les excédents comme limité. Au vu de la compétitivité du ciment algérien et la faiblesse des marchés à l’export, un volume de 2 millions de tonnes serait un plafond et cela nonobstant les conditions logistiques et le savoir-faire nécessaire ».

Le Groupe GICA s’inquiète quant à lui des « risques de surdimensionnement en raison des investissements inscrits par les différents investisseurs. Toutes les régions risquent d’être inondées par les nouvelles capacités. La conséquence de ce déséquilibre serait un taux d’utilisation des capacités ne dépassant pas 50% à l’Ouest et à l’Est et à un peu plus de 70% au Centre. L’intensité concurrentielle devrait être rude et portera sur la conquête des parts de marché », affirme le groupe GICA.

Le groupe GICA estime toutefois que d’une marge d’exportation supérieure aux 2 millions de tonnes annuelles estimées par Lafarge est possible avec des marchés accessibles à l’Algérie, à l’exemple de la Mauritanie, le Mali, le Niger, le Tchad et la Libye. « Ces marchés devraient dans les dix années à venir tripler de volume en raison des besoins liés aux travaux d’urbanisation, de logements et d’infrastructures de base », écrit le rapport du ministère de l’Industrie et des Mines, citant le FMI et la Banque Mondiale.

Des efforts devront néanmoins être accomplis afin d’exporter le ciment dans ces régions, prévient le rapport. La première des conditions « réside dans le niveau compétitif du ciment (prix, qualité, normes et standards internationaux), tandis que « la logistique constitue l’autre condition pour l’exportation ». Pour ce faire, « des actions appropriées » doivent être mises en place pour faciliter le transport du ciment « par route, rail ou bateau, voire par voie multimodale ».

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