Économie

Commerce Algérie – Espagne : le flou persiste

Le gel par l’Algérie du Traité d’amitié avec l’Espagne s’est traduit par la suspension du commerce extérieur entre les deux pays. Mais l’application de la mesure demeure floue dans certains de ses aspects, y compris pour les services des douanes algériennes.

L’Algérie a décidé le 8 juin dernier de suspendre le Traité d’amitié, de bon voisinage et de coopération signé avec l’Espagne en 2002, en réaction à la persistance du gouvernement espagnol dans la défense de son revirement historique du 18 mars sur la question du Sahara occidental.

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Simultanément, une note de l’Association des banques et établissements financiers (ABEF) enjoignait aux banques de ne plus accepter la domiciliation des opérations commerciales de et vers l’Espagne.

Le gouvernement espagnol s’en est remis à Bruxelles dénonçant un manquement aux clauses de l’accord d’association entre l’Algérie et l’UE et celle-ci a apporté son soutien à Madrid.

“L’UE est prête à s’opposer à tout type de mesures coercitives appliquées à un État membre de l’Union européenne », ont déclaré le 10 juin Josep Borrell, plus haut représentant de l’UE pour les Affaires étrangères et Valdis Dombrovskis, vice-président de la Commission européenne.

Ce à quoi la représentation algérienne à Bruxelles a rétorqué en indiquant notamment que « la prétendue mesure d’arrêt par le gouvernement des transactions courantes avec un partenaire européen, elle n’existe en fait que dans l’esprit de ceux qui la revendiquent et de ceux qui se sont empressés de la stigmatiser ».

Éclaircissements

Plusieurs semaines après, il semble que certains aspects de la question n’ont pas fait l’objet d’une explicitation suffisante aux services concernés. C’est du moins ce que l’on déduit à la lecture d’une correspondance des Douanes algériennes, sollicitant des éclaircissements du gouvernement.

Le document daté du 23 juin dernier fait part de « difficultés » rencontrées « quant à l’interprétation et l’application d’une note du ministère des Finances se rapportant à la suspension immédiate du Traité d’amitié, de bon voisinage et de coopération avec l’Espagne.

Selon le document, les services des Douanes n’ont pas encore les modalités d’application liées à l’application de la mesure relative à la suspension du Traité d’amitié avec l’Espagne dans son volet commercial.

Il cite le cas des produits ayant fait « l’objet de domiciliation ou d’expédition » vers l’Algérie avant la date de suspension du Traité d’amitié, les produits d’origine espagnole mais en provenance d’autres pays que l’Espagne et ceux en provenance d’Espagne mais originaires d’autres pays que l’Espagne.

Selon nos sources, les Douanes algériennes n’ont pas encore reçu de réponse de la part du gouvernement sur les modalités d’application de la mesure de suspension du Traité d’amitié avec l’Espagne.

Une situation qui met les entreprises algériennes qui ont des liens économiques avec l’Espagne dans le flou total.

Le gouvernement espagnol est très critiqué en interne pour sa décision unilatérale d’appuyer le plan d’autonomie marocain au Sahara occidental et surtout pour avoir mis en péril les relations avec l’Algérie, un partenaire économique important de l’Espagne.

L’Algérie était historiquement le premier fournisseur de gaz de l’Espagne. Même en reculant à la troisième place derrière les États-Unis et la Russie, elle fournit toujours plus de 20 % de ses besoins.

Avant la crise sanitaire liée au Covid-19, l’Espagne expédiait vers l’Algérie pour près de 3 milliards de dollars de marchandises. Les entreprises espagnoles ont décroché d’importants contrats dans le BTP durant les années 2000 en Algérie.

Le gouvernement de Pedro Sanchez est décrié simultanément par l’opposition politique et les opérateurs économiques. Fin juin, le Parlement (congrès des députés) a adopté une motion non contraignante appelant au retour à la neutralité historique de l’Espagne vis-à-vis de  la question sahraouie et à des relations normales avec l’Algérie.

A la même période, l’ancien président du gouvernement José Maria Aznar a prévenu que l’Espagne va « payer cher » la crise en cours avec l’Algérie.

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