Économie

Commerce extérieur : les voyants sont au rouge

En dépit des annonces très nombreuses de l’Exécutif au cours des derniers mois concernant la promotion des exportations et des mesures souvent draconiennes en matière de contrôle et de contingentement des importations, le déficit du commerce extérieur algérien est encore en hausse au premier semestre 2019.

Rendus publics hier mardi, les résultats du commerce extérieur pour les six premiers mois de l’année confirment la dégradation de la situation économique de notre pays et n’augurent rien de bon pour la suite de l’année 2019.

Les exportations en baisse sensible

La plupart des voyants concernant notre commerce extérieur sont au rouge. Avec un peu moins de 19 milliards de dollars, les exportations sont globalement en baisse de près de 7 % en dépit de prix pétroliers plutôt élevés jusqu’à la fin juin. Les hydrocarbures ont encore représenté l’essentiel des ventes algériennes à l’étranger au cours du 1er semestre (93,10% du volume global des exportations) en s’établissant à 17,6 milliards de dollars, contre 18,8 milliards à la même période 2018, en baisse de -6,3%.

Les résultats publiés par les douanes algériennes ne permettent pas de distinguer la part du recul des prix du baril et celle de la réduction des quantités exportées dans la baisse des exportations. Il est cependant probable que les deux phénomènes se sont conjugués au cours des 6 premiers mois de l’année.

La stratégie d’exportation hors hydrocarbures en échec

Mauvaise nouvelle également du côté des exportations hors hydrocarbures qui sont en baisse de 10 %. Ce qui constitue pour l’instant un constat d’échec pour la « stratégie nationale d’exportation » (SNE) annoncée en grande pompe depuis près d’une année par le gouvernement.

Cette ambitieuse démarche s’appuie sur la mise en place d’une feuille de route comportant les axes essentiels de la promotion des exportations et le choix de quatre secteurs stratégiques pilotes à « fort potentiel d’exportation ». Les secteurs mentionnés sont ceux des produits agroalimentaires et boissons, les produits pharmaceutiques, les pièces et composantes automobiles et électroniques, ainsi que les Technologies de l’Information et de la Communication (TIC).

Concrètement, elle cible à moyen terme, un potentiel de 7 milliards de dollars d’exportations algériennes hors hydrocarbures. Il est question aussi d’étoffer l’offre exportable d’au moins une vingtaine de nouveaux produits qui n’ont jamais fait l’objet d’exportation auparavant.

La stratégie ambitionne aussi de pénétrer une quinzaine de nouveaux marchés avec une déclinaison par zones, soit cinq en Afrique subsaharienne, cinq en Union Européenne et cinq autres en Asie et en Amériques.

Pour l’instant, en dépit de ces nombreux effets d’annonces, on est très loin du compte et les résultats sont exactement à l’opposé des ambitions affichées avec des exportations hors hydrocarbures qui risquent fort de reculer en 2019 en restant obstinément collées à la barre des 2 milliards de dollars. Un objectif affiché depuis plus de 20 ans par les autorités algériennes.

Des résultats plus que modestes pour le contrôle des importations

La démarche du gouvernement, très riche également au cours des derniers mois en annonces diverses en matière de contrôle des importations, n’enregistre pas de résultats significatifs dans ce domaine.

Même si les importations sont en baisse d’environ 4% au cours des 6 premiers mois de l’année, elles ont encore atteint 22,14 milliards de dollar de janvier à juin dernier. Ce qui les place encore sur une trajectoire de près de 45 milliards de dollars pour l’ensemble de l’année en cours.

L’essentiel du léger recul des importations est imputable à la très forte réduction de la facture d’importation des carburants qui a chuté de 62 %. Les importations de biens alimentaires sont également en baisse de 10 %, selon les Douanes.

Le reste des importations étant globalement stable, on peut légitimement s’interroger sur l’efficacité d’une politique économique qui était censée s’attaquer au phénomène de la surfacturation à laquelle plusieurs sources n’ont pas hésité à attribuer 30 voire 40% de la valeur de nos exportations. Pour l’instant force est de constater que les résultats des mesures de contrôle renforcées, annoncées dans ce domaine par les autorités algériennes sont proches de zéro.

On peut exprimer la même perplexité à propos des résultats des mesures de contingentement des importations. Au cours des derniers mois ce sont successivement les activités du montage automobile, de l’électroménager, de l’électronique grand public ainsi que, tout récemment, les minoteries qui se sont vus imposer des quotas d’importation en forte baisse et qui ont fortement réduit leur niveau d’activité en contraignant beaucoup d’entreprises à prendre des mesures de chômage technique.

Pour l’instant, le résultat de ces mesures très pénalisantes pour l’appareil de production n’est pas visible en clair dans les statistiques du commerce extérieur puisque les importations de demis produits sont encore en hausse de plus de 7% au premier semestre.

Forte inquiétude sur les prix pétroliers

Les performances de notre commerce extérieur au premier semestre n’annoncent rien de bon pour l’ensemble de l’année. On sait déjà que la chute des prix du baril s’est accélérée depuis le début du mois d’août en passant nettement sous la barre des 60 dollars. Ce qui devrait contribuer à creuser notre déficit commercial sur l’ensemble de l’année.

Les perspectives dans ce domaine sont en outre assez inquiétantes. Hier encore la presse internationale évoquait des analyses de Bank of America selon lesquelles le baril pourrait tomber à 30 dollars dans les mois qui viennent si la guerre commerciale entre les USA et la Chine se poursuit et que la Chine décide de racheter du pétrole iranien. Le quotidien français Le Monde évoquait, pour sa part, à la une « un marché pétrolier au bord d’une nouvelle crise ».

Rien donc de très réjouissant en perspective pour nos réserves de change internationales qui devraient continuer à fondre de près de 20 milliards de dollars sur l’ensemble de l’année 2019 même en cas de maintien des prix du baril à leur niveau actuel.

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