Économie

Crise économique et sociale : les faibles réponses du gouvernement

L’Algérie traverse une conjoncture économique et sociale difficile, avec notamment un investissement à l’arrêt, une inflation galopante et des services publics qui se dégradent.

Pendant que la pandémie de Covid-19 est toujours là malgré l’accalmie actuelle, le pays connait une grave pénurie d’eau qui a nécessité le retour au rationnement depuis le printemps dernier, la crise de liquidités dans les banques, des tensions sont enregistrées successivement sur plusieurs produits depuis l’année passée et les prix, entraînés par l’érosion continue de la monnaie nationale, connaissent une augmentation généralisée qui n’est pas près de s’estomper.

| LIRE AUSSI : L’incroyable dégradation du pouvoir d’achat des Algériens en dix ans

Face à la hausse des prix, le gouvernement semble désarmer, comme en témoignent les récentes tensions sur les prix du poulet qui a atteint les 500 dinars le kilogramme.

En plus des hausses des prix, les Algériens sont confrontés à la hantise des pénuries de différents produits : véhicules, médicaments, pièces détachées automobile…

Parallèlement, l’activité économique est fortement impactée par plusieurs facteurs, dont la crise sanitaire et la réticence des investisseurs, de l’aveu même du gouvernement.

En l’absence de statistiques fiables, on ne peut parler de paupérisation des Algériens, mais les temps sont difficiles et l’avenir est incertain pour de larges franges de la société algérienne. La classe moyenne qui s’est constituée durant les années du pétrole cher est en train de s’effriter dangereusement.

 Selon une étude effectuée par l’Apoce, la valeur du salaire a été divisée par deux en dix ans en Algérie, alors que durant cette période, les prix des produits de consommation ont connu des hausses fulgurantes.

La remontée actuelle des prix du pétrole doit s’accentuer et s’inscrire dans la durée pour espérer voir l’État retrouver ses niveaux de dépense de la première moitié de la dernière décennie, qui avaient permis, par la très forte commande publique, de maintenir des niveaux de croissance acceptables et de booster l’activité de plusieurs secteurs.

En juillet dernier, un nouveau gouvernement a été nommé et on connait désormais son plan d’action, présenté devant l’APN et adopté la semaine passée. L’Exécutif était très attendu sur les questions sociales et les réponses à apporter aux problèmes posés, notamment économiques.

La relance économique par l’encouragement de l’investissement productif est l’unique solution durable pour l’amélioration du niveau de vie de la population.

Le plan d’action consacre un chapitre entier –le plus consistant– à ce volet. En résumé, le gouvernement envisage de lever les contraintes bureaucratiques qui bloquent l’investissement et de revoir le cadre législatif pour rendre attractif le climat des affaires algérien. Il a aussi défini les secteurs potentiellement porteurs plus que d’autres de croissance comme l’agriculture, le tourisme, les start-up et certaines filières industrielles.

Des promesses trop vagues

En attendant, la situation sociale appelle des solutions urgentes, notamment pour cette question du pouvoir d’achat qui ne cesse de s’étioler.

Dans le chapitre intitulé « pour un développement humain et une politique sociale renforcée », il est question entre autres de « l’accroissement et consolidation du pouvoir d’achat du citoyen » et la mise en œuvre de l’allocation chômage décidée par le président de la République.

« Le gouvernement engagera une évaluation des niveaux de salaires dans le secteur économique et la fonction publique, afin d’améliorer le pouvoir d’achat des citoyens. Pour ce faire, l’accent sera mis sur la réalisation d’études et de recherches visant la mise en place d’indicateurs pertinents sur la détermination des rémunérations et analyser les enjeux en vue de permettre au gouvernement de mener une politique salariale conciliant les dimensions sociales et économiques et orientée vers l’efficience, l’efficacité, la cohésion sociale et l’égalité des chances », lit-on dans le plan d’action du gouvernement.

Les impératifs mis en avant sont compréhensibles, mais l’énoncé reste trop général, et aucune échéance n’est fixée pour les réaliser.

Les critiques entendues concernant le chapitre de la relance économique valent aussi pour la politique sociale : le plan d’action pèche par le manque d’échéances, d’objectifs chiffrés et d’actions concrètes à mener.

Face à des fonctionnaires et des travailleurs du secteur économique qui peinent à joindre les deux bouts, le gouvernement s’engage à revoir les salaires, mais il ne dit pas quand, dans quelle proportion et qui sera concerné. La question de l’emploi, notamment dans le secteur public et les unités privées impactées par les procès anti-corruption, est complètement éludée.

Pour la crise de l’eau, le gouvernement déterre les vagues promesses faites par tous ses prédécesseurs : réhabilitation des réseaux, lutte contre le gaspillage…

Dans son plan d’action et dans son activité ordinaire, l’Exécutif ne renvoie pas l’impression de s’empresser d’apporter les réponses fortes et urgentes qu’appelle la complexité de la situation.

Il se contente à dresser en permanence des constats, connus de tous, alors qu’il est attendu sur les réponses à apporter à une crise économique qui a mis à genoux des dizaines de milliers d’entreprises, et provoqué des dizaines de milliers de pertes d’emploi.

Dans le BTP par exemple, 150.000 emplois ont été perdus en 2020 à cause de la crise sanitaire et le manque d’investissement, selon le président de l’Association générale des entrepreneurs algériens (AGEA), Mouloud Khelloufi.

Pourtant, lors de sa nomination le 30 juin dernier, le président de la République a fixé les priorités à son premier ministre. « Pour l’avenir, c’est l’économie et le social, donc financier et vous êtes au courant de tous les dossiers financiers », a dit Abdelmadjid Tebboune à Aïmene Benabderrahmane.

Les plus lus