Politique

Élection de Chenine à la présidence de l’APN : le malaise persiste

Contre toute attente, les députés de l’ex-majorité présidentielle ont jeté leur dévolu sur Slimane Chenine, pour devenir président de l’Assemblée populaire nationale. Une première dans l’histoire de cette institution, dominée par le FLN et le RND.

Avant son élection, Chenine dirigeait le groupe parlementaire de l’alliance Nahda-Adala-Bina, trois partis islamistes dont un est dirigé par Abdellah Djaballah, une personnalité respectée au sein de l’opposition.

Un opposant à la tête de l’APN. En plein mouvement populaire, le scénario a tout pour séduire. Les partis de l’ex-alliance présidentielle ont défendu leur choix, en affirmant qu’ils ont voulu répondre aux aspirations du peuple. Mais, hormis ces formations qui ont soutenu Bouteflika et son propre parti El Bina, personne n’a applaudi ce plébiscite.

Le MSP a qualifié cette élection d’opération de relooking ratée. Le plébiscite de Slimane Chenine ne reflète, selon le MSP, en aucune façon une « situation démocratique ». Son accès au perchoir de la Chambre basse est une « donation accordée, sur injonction, par une majorité parlementaire issue de la fraude et totalement rejetée par le peuple algérien », a ajouté le parti islamiste.

Le parti El Adala, un allié du parti de M. Chenine au parlement, a clairement pris ses distances. « L’élection de Slimane Chenine ne reflète pas forcément la position officielle de notre parti », a réagi El Adala, dirigé par Abdallah Djaballah.

« Cette affaire ne nous concerne pas. Nous ne sommes ni avec (Chenine) ni contre lui », a déclaré Abdallah Djaballah, dont les propos ont été rapportés par le député Hassan Laribi.

Les autres partis de l’opposition n’ont pas encore commenté ce changement. Sur les réseaux sociaux, les commentaires sont majoritairement négatifs.

Une désignation par le « sommet »

Cette élection, une désignation par le « sommet », selon les confidences de certains parlementaires, que très peu avaient vu venir, constitue sans aucun doute un fait inédit dans les annales de l’Assemblée. Qui aurait, en effet, imaginé un jour que la chambre basse du parlement reviendrait à un député, en dehors du FLN et de surcroit à un parti dont la naissance remonte à 2013.

Car si l’on en croit les déclarations de certains députés, même la coalition au nom de laquelle il s’est présenté ne lui a pas apporté sa caution majoritairement. Son intronisation au perchoir, il la doit essentiellement aux partis de l’ex-alliance présidentielle, en l’occurrence le FLN, le RND, TAJ, MPA, aux indépendants ainsi qu’à certains députés islamistes qui ont voté individuellement.

Dès lors la question est de savoir pourquoi le choix a été porté sur ce député considéré comme un « islamiste modéré ». A priori, aux yeux des instigateurs de cette nomination, il était exclu de confier les rênes de l’assemblée à une figure de l’ex-alliance.

Non seulement, ces partis, rejetés par la population, ont vu leurs responsables incarcérés, mais un forcing au profit du FLN aurait été interprété comme un nouveau coup de force au profit des puissants du moment. Cela sans compter que l’ex-parti unique est en proie à une grave crise interne et fragilisé par des appels issus de la famille révolutionnaire recommandant sa mise au « musée ».

En choisissant Slimane Chenine, les promoteurs de sa candidature ont visiblement cherché à faire coup double : « placer » un homme qui ne ferait pas de vagues, puisque issu d’un parti microscopique qui épouse globalement les idées du pouvoir en place, notamment la nécessité de l’organisation de l’élection présidentielle dans les plus brefs délais, d’une part, vendre l’idée que la contestation populaire a été entendue, d’où la délégation du pouvoir à une figure comptable sur le compte de « l’opposition », d’autre part.

Il n’est pas exclu que le choix soit dicté également par le souci de ratisser dans les rangs des islamistes en perspective du « dialogue » souhaité pour l’organisation du prochain scrutin.

Reste que ce choix est handicapé par l’incertitude qui pèse désormais sur la discipline des partis qui lui ont apporté leur soutien, dans la mesure qu’ils sont confrontés à des crises internes, mais également au désaveu de la population au parlement dont le crédit s’est érodé depuis longtemps.

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