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EN : pourquoi Madjer ferait mieux de partir

Cette fois, ce n’est pas face à un mondialiste que les Verts se sont inclinés, mais devant une modeste équipe africaine, le Cap-Vert, reparti vendredi soir d’Alger avec une belle victoire (2-3).

L’équipe d’Algérie ne sait plus gagner et pour le public et la presse, le coupable est identifié et il doit payer sans tarder : le sélectionneur Rabah Madjer. Les rares présents au stade du 5-Juillet le lui ont fait entendre de vive voix, mais en conférence de presse d’après-match, l’homme ne s’est pas montré ébranlé.

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Un climat malsain

« Non je ne démissionnerai pas », a-t-il tranché, avançant des explications qui, de prime abord, tiennent la route : on ne peut pas juger un sélectionneur après seulement sept mois d’exercice, on ne démissionne pas après une défaite en match amical, la rencontre face au Cap-Vert a été perdue sur des erreurs individuelles, un changement de staff à ce moment précis plongerait l’équipe dans la crise, l’EN a plus besoin de stabilité que d’autre chose…

Tout cela est vrai et ce sont des arguments qui tiennent la route mais qui, hélas, ne sauraient éclipser les éléments qui, au contraire, plaident pour un changement immédiat du staff technique. Immédiat, c’est-à-dire juste après le match face au Portugal, jeudi prochain à Lisbonne. Au-delà, chaque journée supplémentaire que restera Madjer à la tête des Verts enfoncera davantage l’équipe, quand bien même tout ce qui se dit sur le manque d’expérience et l’incompétence de l’ex-joueur de Porto ne serait pas fondé.

D’abord, l’équipe nationale ne peut plus continuer à évoluer dans un tel climat malsain, sans doute l’une des principales raisons du recul de ses résultats ces derniers mois. Jamais un sélectionneur national, peut-être pas seulement en Algérie, n’a été décrié comme l’est Madjer depuis sa nomination à la tête des Verts en novembre dernier.

Il est tout de même ahurissant de constater que sur toutes les pages sur les réseaux sociaux, tous les forums de discussion, les avis vont tous, parfois sans la moindre exception, dans le même sens : on ne veut pas de Madjer. C’est la quasi-unanimité.

L’équipe nationale, qui jouait à domicile à guichets fermés, évolue désormais devant des gradins vides, avec le même topo pour les résultats, c’est-à-dire une équipe qui était imprenable chez elle et qui se retrouve maintenant à se faire battre par le premier venu. Ne serait-ce que pour le principe, on ne peut imposer à tout un peuple un homme qu’il ne veut pas, pour des raisons qui lui sont propres, voir à la tête de sa sélection nationale.

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Hostilité, confrontation et rapports conflictuels

Mais au-delà du principe, on ne peut laisser l’équipe évoluer dans un climat d’hostilité et de confrontation quasi-permanentes et espérer des résultats au bout. Cette situation affecte particulièrement les joueurs qui, avant même d’entrer sur le terrain et de constater que le public n’est pas venu en nombre les soutenir, assistent pendant la semaine à des critiques acerbes envers l’équipe et le coach, à des appels au changement du staff technique lancés parfois par des personnalités influentes. Ils sont déstabilisés, ne savent plus à quoi s’en tenir et le jour du match, ils n’ont pas leurs moyens. L’aspect psychologique, si important dans la préparation des équipes de haut niveau, est de fait réduit à néant.

On l’a vu, face au Cap-Vert, les coéquipiers de Mahrez étaient tétanisés, d’où leurs incroyables erreurs individuelles qui ont fini par donner la victoire à l’adversaire.

Pire : l’équipe nationale ne joue pas seulement sans supporters, mais les rares qui font encore le déplacement au stade sifflent et malmènent les joueurs à la moindre balle perdue, quand ils ne se mettent pas carrément à supporter l’adversaire, comme on l’a vu vendredi soir.

Aussi, les rapports conflictuels avec certains joueurs, la mise à l’écart de cadres qui ont rendus par le passé d’énormes services au groupe, les déclarations maladroites des uns et des autres ont fini par pourrir définitivement l’atmosphère.

L’équipe est même entrée dans une spirale de défaites après avoir fait illusion lors des premiers matchs de Madjer à la barre technique. Trois défaites de rang, c’est beaucoup pour un groupe qui compte dans son effectif  des joueurs de niveau mondial comme Mahrez qui devrait signer incessamment pour Manchester City, ou encore Yacine Brahimi, récent champion du Portugal.

L’EN ne gagne plus, ce n’est peut-être pas à cause de l’incompétence de Madjer et de son staff, mais leur responsabilité est entièrement engagée en restant en poste contre l’avis du public, pas dans sa majorité, mais dans sa quasi-totalité.

Une chose est sûre, on ne peut laisser une telle situation perdurer et prendre le risque de jouer dans des conditions similaires la suite des éliminatoires de la CAN 2019 qui reprennent dans un peu plus de deux mois.

La décision est entre les mains de deux hommes : Rabah Madjer et Kheireddine Zetchi, le président de la FAF. Le premier aura tout à gagner à déposer sa démission et partir dignement. Le public qui le décrie tant retiendrait alors qu’il a privilégié l’intérêt de la sélection et qu’il n’a pas choisi de se faire limoger pour partir avec un gros pactole, comme on le soupçonne déjà sur les réseaux sociaux.

Quant au second, il est le premier responsable de la sélection et il doit comprendre que la situation ne peut s’accommoder des demi-mesures. Il devra trancher sans tergiverser. Zetchi est appelé à convaincre le sélectionneur de rendre le tablier ou à défaut, mettre fin à ses fonctions unilatéralement, quitte à l’indemniser fortement lui et son staff. L’intérêt de l’Équipe nationale n’a pas de prix.

Une décision d’autant plus facile à prendre pour Zetchi qu’il se murmure qu’il n’a jamais été fan de Madjer qui lui aurait été imposé plus qu’il ne l’a choisi…

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