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Frontières, vaccination, rebond du Covid : entretien avec le Pr Mahyaoui

Frontières, vaccination, rebond du Covid : entretien avec le Pr Mahyaoui

Pr Riad Mahyaoui, membre du Comité scientifique.

Dans cet entretien, le Pr Riad Mahyaoui, membre du Comité scientifique s’exprime sur la fermeture des frontières, le rebond des contaminations au Covid-19 en Algérie, la campagne de vaccination qui tourne au ralenti, l’imam de Bouzareah…

Le nombre de contaminations au Covid-19 en Algérie connait un rebond ces derniers jours. La pression au niveau des structures de santé augmente. Que se passe-t-il ?

Pour la situation épidémiologique ces jours-ci, on remarque qu’il y a une tendance haussière du nombre de cas positifs. Bien que ça reste encore léger, on sent quand même un frémissement à la hausse. En réanimation, il y a quinze intubés-ventilés, des malades en soins intensifs. Et on remarque même au niveau de la fréquentation des consultations Covid que ça commence à évoluer un peu. Il faut donc vraiment se ressaisir.  La Covid-19 est encore parmi nous

Comment expliquez-vous cette augmentation des cas positifs de Covid -19 ?

Je vais commencer d’abord par la dynamique du virus et l’apparition des variants. Dans tous les pays du monde, il y a eu la troisième vague. En Algérie, on a été protégé et on est en décalage sur ce qui se passe dans le monde, notamment en Europe et en Amérique ainsi que dans les autres pays.

On sent quand même qu’il y a une augmentation. Il faut tirer la sonnette d’alarme. Il faut reprendre les choses en main, se ressaisir et être conscient que la situation commence à évoluer.

Il y a un relâchement sur les mesures barrières mais rien ne se fait pour lutter contre ce relâchement. Il y a pourtant des lois et des mesures prises par les hautes autorités du pays, mais elles ne sont pas respectées. Où sont les services de contrôle ? Il n’y a pas de rigueur dans l’application de ces lois.

Cela va de la responsabilité individuelle, collective et sectorielle. Chacun doit faire son travail et contrôler dans son secteur et les lois doivent être appliquées. C’est notre pays, il faut une solidarité nationale, ce n’est pas l’affaire d’une seule personne.

On voit au niveau des marchés, des magasins, personne ne porte le masque qui est pourtant obligatoire…

Le masque est obligatoire. C’est la loi qui le dit. Il y a un relâchement dans le respect des mesures barrières. On voit que le masque est pratiquement inexistant. Donc s’il vous plait, ressaisissez-vous un peu et appliquez les mesures barrières.

Seul le masque nous protège contre la maladie. Un peu de bon sens, un peu de raisonnement et un peu de rigueur. Je pense que les Algériens ont très bien répondu à toutes les mesures. Le résultat est bon jusqu’à présent, mais il ne faut pas relâcher.

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Dans ce contexte, vous tirez la sonnette d’alarme…

C’est normal qu’on tire la sonnette d’alarme et qu’on appelle à la responsabilité individuelle et collective. Il faudra réellement respecter les mesures barrières et de façon stricte.

La vaccination en Algérie tourne au ralenti. Le rythme de la campagne de vaccination est très lent. Que se passe-t-il ?

On sait très bien que la campagne de vaccination est tributaire de l’acheminement des lots de vaccins en Algérie. On sait qu’il y a une tension importante à l’échelle mondiale. L’Algérie en souffre de cette tension mondiale, ce qui impacte les réceptions des lots de vaccins qui étaient prévues soit dans un cadre bilatéral, soit par le biais du dispositif Covax.

Il y a des pays voisins qui ont vacciné des millions de personnes. En Algérie, on n’a même pas dépassé 100 000 personnes. Pourquoi ?

Non, je pense qu’on a largement dépassé les 100.000 personnes. Ce qu’il y a de bien, c’est que la plateforme du ministère de la Santé fonctionne. Ils ont déjà vacciné et orienté 60 % des gens inscrits. J’appelle aussi la population à s’inscrire sur la plateforme, soit par le biais du site ou au niveau des polycliniques, pour ne pas arrêter cette campagne vaccinale qui est tributaire de la réception des lots de vaccins.

Le vaccin contre la Covid-19 d’AstraZeneca suscite des appréhensions. Le Danemark a décidé de l’abandonner définitivement à cause de ses effets secondaires « rares » mais « graves« . Quel est votre avis ?

Il est clair que les phénomènes de caillot sanguin existent même dans les autres vaccins. C’est à peu près la fréquence de vaccins que ce soit pour AstraZeneca ou pour Moderna, Pfizer ou même Johnson & Johnson qui a été mis en pause aux États-Unis.

Mais quand même le risque est minime par rapport au bénéfice. On voit bien qu’il y a des études qui sortent ces jours-ci et qui ne diffèrent pas entre les vaccins AstraZeneca, Moderna et Pfizer. La balance penche vers le bénéfice qui est important par rapport aux risques.

En Algérie, il y a quand même de la réticence, même de la part des personnels de santé, vis-à-vis du vaccin d’AstraZeneca…

Complètement, c’est une évidence. On le vit tous les jours. On rappelle qu’il y a plus de 200 millions de vaccin AstraZeneca qui ont été distribués dans le monde et aux États-Unis, et en France on continue de vacciner. Vu la nécessité de se faire vacciner et le bénéfice de la vaccination, le risque est vraiment minime et j’encourage les gens à faire le vaccin. Je dis toujours que le meilleur vaccin est le vaccin disponible.

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Au ministère de la Santé, surtout au niveau de la direction générale de la prévention, on constate qu’il n’y a pas de travail de communication et de sensibilisation sur le terrain sur la campagne de vaccination contre la Covid-19. Pourquoi ?

Je vous invite à vous rapprocher de la direction de la prévention pour leur poser cette question, je ne peux pas répondre à leur place. Tout ce que je sais, c’est que tous les intervenants dans cette campagne vaccinale font de leur mieux pour faire en sorte qu’elle se poursuive malgré la contrainte liée à la réception des vaccins.

Un imam d’une mosquée à Bouzaréah (Alger) a critiqué les restrictions sanitaires imposées aux mosquées par le Comité scientifique. Quelle est votre réponse et pourquoi avoir autorisé la prière des Tarawih ?

J’ai félicité à plusieurs reprises le secteur des Affaires religieuses et les imams avec qui je me suis réuni parce que dans les mosquées, le protocole sanitaire a été très bien appliqué, ce qui a encouragé la tenue des tarawih cette année, contrairement à l’année passée. C’est un acquis et un retour à la vie normale.

Il faudra quand même s’en tenir aux mesures barrières et ne pas critiquer quoi que ce soit.

Les frontières de l’Algérie sont fermées depuis plus d’une année. Des experts appellent à leur réouverture progressive pour permettre aux Algériens bloqués à l’étranger de rentrer au pays, pour passer le Ramadan et l’Aïd el fitr. Que dit le professeur Mahyaoui ?

Nous n’avons pas à rougir des mesures anti-Covid qui ont été prises au départ pour faire face à cette pandémie. La stratégie a été gagnante. Avec les mesures prises au mois de mars de l’année, on constate maintenant qu’elles ont donné des résultats puisque nous sommes en situation épidémique confortable. Nous avons fait les bons choix.

Cette pandémie a empêché les familles de se retrouver, de faire des deuils… L’impact sociologique est important. Néanmoins, l’ouverture des frontières, qui relève de la décision des hautes autorités du pays, n’est pas à l’ordre du jour. D’autant plus qu’on voit dans beaucoup de pays que les gens resserrent l’étau autour de l’ouverture des frontières.

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