Économie

Huawei réduit la voilure et se prépare à des temps difficiles

Après les sanctions américaines, le géant chinois des smartphones et des équipements télécoms a pris des mesures pour diminuer sa production.

Dans le monde des smartphones, Huawei a connu une insolente croissance ces dernières années. Au premier trimestre, le groupe de Shenzhen caracolait encore à la deuxième place des plus gros vendeurs de terminaux du globe. Avec 58,7 millions de smartphones écoulés, il se situe derrière Samsung (71,6 millions de smartphones vendus), mais largement devant Apple (44,5 millions). Il y a quelques mois, Huawei semblait encore en bonne voie de détrôner, comme il l’ambitionnait, son rival sud-coréen d’ici à la fin de l’année. Mais cet objectif n’est plus d’actualité. Impacté de plein fouet par des sanctions de Washington visant à lui fermer le robinet des technologies américaines, Huawei a indiqué qu’il n’espérait pas damer le pion à Samsung cette année.

Aujourd’hui, le groupe de Shenzhen est plutôt contraint de réduire drastiquement la voilure. Ce lundi, l’agence Bloomberg a indiqué que Huawei s’attendait à une baisse de 40% à 60% de ses livraisons de smartphones à l’étranger. Plusieurs options sont à l’étude, dont le retrait d’un de ses derniers bébés, le Honor 20. Le lancement de ce modèle, dont la commercialisation débutera en Grande-Bretagne et en France ce vendredi, pourrait être interrompu si les ventes ne sont pas au rendez-vous. Huawei a déjà indiqué qu’il misait sur le marché chinois pour compenser au moins partiellement les baisses de ventes anticipées sur le Vieux Continent.

A côté du Honor 20, Huawei a décidé de repousser de trois mois le lancement de son smartphone pliable, le Mate X. Véritable porte-étendard du savoir-faire de Huawei, ce terminal, qui coûte la bagatelle de 2.299 euros, a été dévoilé en février dernier au Mobile World Congress de Barcelone. Il faudra désormais attendre le mois de septembre, au mieux, pour passer commande.

Ce lundi, Ren Zhengfei, le fondateur et chef de file de Huawei, a admis sur le groupe essuyait de grosses difficultés. « Oui, (les ventes de smartphones) ont baissé de 40% », depuis la mi-mai et l’annonce des sanctions américaines, a-t-il déclaré lors d’un entretien au siège du groupe à Shenzhen. Le dirigeant a également indiqué qu’il allait très fortement réduire sa production d’environ 30 milliards de dollars cette année et en 2020. Une mesure particulièrement lourde au regard du chiffre d’affaires du groupe, qui a passé la barre des 100 milliards de dollars l’an dernier – sachant que les smartphones représentent environ la moitié de ces ventes.

D’après Ren Zhengfei, Huawei retrouvera « en 2021 », sa « vitalité afin de servir l’humanité ». A l’en croire, son groupe a sous-estimé l’impact des sanctions américaines. « Nous ne nous attendions pas à ce qu’ils nous attaquent sur autant d’aspects », a-t-il déclaré.

« Nous le pouvons pas nous approvisionner en composants, nous ne pouvons pas participer à de nombreuses organisations internationales, nous ne pouvons pas travailler en étroite collaboration avec de nombreuses universités, nous ne pouvons rien utiliser comportant des composants américains, et nous ne pouvons même pas établir de connexion avec des réseaux utilisant de tels composants », a-t-il égrené.

Huawei mise sur son propre système d’exploitation

Sur le front des smartphones, le groupe a déjà pris des mesures fortes pour se relancer. Prochainement privé d’Android, le système d’exploitation de Google, Huawei compte possiblement s’appuyer à terme sur le sien, baptisé « Hongmeng », en Europe. La semaine dernière, Huawei a demandé son enregistrement sur le Vieux Continent et dans neuf autres pays, selon les données de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI). Sachant qu’aujourd’hui, Hongmeng est encore en phase de test en Chine.

Dans les équipements de réseaux mobiles, où Huawei est désormais leader, le groupe attend encore de savoir dans quelle mesure certains importants pays européens (comme le Royaume-Uni ou la France) vont lui permettre de déployer ses infrastructures. L’enjeu est énorme pour le groupe chinois, qui compte énormément sur la 5G, qui commence à arriver sur le Vieux Continent, pour se développer. Sur ce créneau, le très fort lobbying de Washington, qui pousse l’Europe à bannir comme lui Huawei du marché de la 5G, l’inquiète.

Et pour cause : son rival Nokia, qui a pourtant admis récemment avoir du retard dans cette technologie, a indiqué au début du mois bénéficier des déboires du groupe chinois. D’après l’agence Reuters, Federico Guillen, à la tête de l’activité clients de l’équipementier finlandais, a affirmé qu’avec 42 commandes d’opérateurs, il se situait maintenant devant Huawei et le suédois Ericsson. Sachant que ces derniers totalisent respectivement, selon les estimations, 40 et 19 commandes. En pleine tempête, Huawei va devoir trouver des solutions, et vite, pour préserver ses principales activités.


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