
La Banque d’Algérie vient de publier son rapport d’évaluation sectorielle des risques de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme.
Le rapport définit les vecteurs du blanchiment et les secteurs les plus à risque. Les produits de plusieurs activités illicites finissent par être blanchis dans l’immobilier notamment.
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L’évaluation vise à renforcer l’approche de supervision fondée sur les risques adoptée par la Banque d’Algérie, conformément aux recommandations du GAFI, le Groupe d’action financière qui a placé l’Algérie sur sa “liste grise” en octobre 2024.
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L’économie informelle représente entre 30 et 35% du PIB de l’Algérie
L’économie informelle en Algérie représente entre 30 % et 35 % du PIB, rappelle le rapport. Elle génère un manque à gagner fiscal et une concurrence déloyale envers le secteur formel, mais elle est aussi “un vecteur de risques accrus de blanchiment d’argent et de financement du terrorisme”, écrit la Banque d’Algérie qui souligne que ce constat est appuyé par plusieurs rapports d’organisations internationales, comme le FMI et le GAFI.
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La corruption est aussi identifiée dans le rapport comme l’une des principales menaces, même si, signale la BA, ce fléau est désormais classé quatrième parmi les infractions sous-jacentes les plus préoccupantes, “après ajustement des effets des grandes affaires de 2021–2022”.
Le rapport a aussi identifié les formes que prennent les produits de la corruption. Il s’agit des espèces, les biens de valeur, l’immobilier et les véhicules. Ces produits de la corruption sont majoritairement générés en Algérie, puis blanchis localement ou transférés vers des juridictions à risque, indique-t-on.
Le fléau est concentré autour d’Alger, mais touche l’ensemble du pays. Il implique principalement des agents publics, des administrateurs et des entrepreneurs et industriels du secteur privé.
Les circuits bancaires sont peu utilisés pour le blanchiment direct des fonds, mais, explique la Banque d’Algérie, “le système financier est exposé indirectement, notamment via le secteur immobilier”.
Le rapport dévoile des achats de biens immobiliers via des promoteurs, dans lesquels les auteurs dissimulent leur profil pour contourner les contrôles. Aussi, plusieurs pays étrangers sont ciblés pour l’évasion et le blanchiment, accroissant le risque de flux financiers transfrontaliers illicites.
La première menace sous-jacente reste toutefois la fraude fiscale, qui a totalisé 35,1 % des saisies et confiscations entre 2019 et 2023. Cette pratique se manifeste par la sous-déclaration des revenus. Les secteurs les plus concernés sont l’importation, la construction et les travaux publics, l’immobilier et le commerce.
Blanchiment d’argent : le produit de plusieurs activités illicites passe par l’immobilier
Les produits issus de la fraude fiscale sont fréquemment blanchis via l’investissement immobilier, l’acquisition de biens de luxe ou le recours au marché parallèle pour convertir les fonds en devises, indique la banque d’Algérie.
Cette menace expose directement le secteur bancaire, “car les entreprises impliquées réalisent couramment des opérations bancaires, ce qui en fait un canal potentiel pour l’introduction de fonds illicites dans le circuit formel”.
Outre la corruption et la fraude fiscale, la Banque d’Algérie définit aussi comme vecteurs de risque le trafic de drogue, l’infraction douanière, la contrebande et le trafic de migrants.
Les revenus tirés du trafic de drogue sont partiellement blanchis localement à travers des investissements dans l’immobilier ou l’achat de biens de luxe et les transferts internationaux empruntent des circuits informels ou s’appuient sur des migrants.
Les infractions douanières sont présentées comme une menace “à risque moyen”, avec un impact direct sur le système bancaire algérien.
Il s’agit de manipulations de prix, telles que la sous-facturation ou la surfacturation, des fausses déclarations de devises, ainsi que la détention ou le transport de marchandises interdites ou soumises à réglementation.
Les principaux acteurs impliqués sont les personnes morales issues des secteurs de l’agroalimentaire, du textile, de l’électronique et de la pièce de rechange.
La Banque d’Algérie conclut dans son analyse que le système bancaire algérien n’est que partiellement impacté, puisque, des principales menaces susmentionnées, seules la fraude fiscale et l’infraction douanière affectent directement le secteur bancaire.
Algérie Poste est l’établissement qui enregistre le niveau de risque le plus élevé à cause de “l’étendue de son réseau, le volume important de ses opérations, et la diversité de sa clientèle”, en plus de “mécanismes de contrôle internes encore insuffisants”.