Économie

Le blé français concurrencé dans les moulins d’Algérie

Pour une consommation annuelle de dix millions de tonnes de blé l’Algérie n’en produit environ que quatre millions. Le déficit des six millions est couvert par l’importation pour le prix d’environ 180 euros la tonne sur le marché européen.

C’est une quantité difficile à comprimer parce que le blé est un produit stratégique, garant de la paix sociale dans le pays où la population augmente d’un million de personnes par an.

L’Algérie est le 3e importateur mondial de blé.

La semaine dernière, elle a lancé une commande de 120.000 tonnes. En mars, elle avait fait une commande de 450.000 tonnes pour livraison entre mi-avril et mi-mai Si l’origine n’est pas connue elle devrait être en partie française.

L’Hexagone exporte 40% de sa production de blé tendre vers l’Algérie, faisant de ce produit un élément important de la relation commerciale entre les deux pays. Pourtant, les parts de marché de la France se sont réduites. Elles ont été de 40% en 2017 contre 63% pour la période 2009 à 2016. Après un petit rebond en 2018, la tendance s’est encore inversée au premier trimestre 2019. Les perspectives sont plutôt sombres, selon une étude des Chambres de l’Agriculture, citée par pleinchamp.com.

« L’année 2019 s’annonce très incertaine pour les opérateurs français exportant du blé en Algérie », prévient l’étude.

A cela, plusieurs facteurs : une hausse de la production locale et le choix de nouveaux fournisseurs à l’instar de l’Argentine qui a conquis la deuxième place. S’y greffe aussi la situation économique induite par la maintien des prix du pétrole à un niveau bas. L’érosion des réserves de change, de la valeur du dinar et la baisse des dépenses publiques empêchent le pays d’augmenter ses importations.

Désormais, la France doit aussi composer avec un autre facteur: l’arrivée au rang des fournisseurs de la Russie dont le blé est réputé riche en protéines. Selon la presse spécialisée, plusieurs rencontres entre des délégations algériennes et russes ont eu lieu en 2018. De leur coté, les représentants du ministère de l’agriculture et de l’Office algérien interprofessionnel des céréales (OAIC) ont plusieurs fois déclaré être très intéressés par l’achat de blé russe. Un premier lot test de 40 tonnes de blé russe a d’ailleurs été importé début 2019, les autorités algériennes souhaitant d’abord expérimenter la qualité de ce blé avant de procéder à des achats de plus grande envergure.

Au regard de la force de frappe de Moscou sur le marché international du blé (37 millions de tonnes de blé exporté pour la campagne 2018/2019), l’Algérie apparaît comme un marché prometteur pour l’expansion de son activité commerciale céréalière.

Face à ses propres contraintes environnementales et à la concurrence des épis russes, la France a lancé le « plan protéines » en direction des marchés africains où la tenue de la pâte exige ds taux de protéines importants. Dans le monde, « il y a une hausse forte de la classe moyenne et cette classe moyenne est de plus en plus en attente de qualitatif, de sanitaire, ça va de soi, mais aussi de démarches respectueuses de l’environnement et de démarches sociétales », disait récemment Eric Thirouin, le nouveau président de l’Association générale des producteurs de lé (AGPB). « C’est valable en Orient, c’est valable en Asie, mais il y a aussi des attentes qui sont en train de pointer en Afrique. Sur tous ces marchés-là, on a certainement quelque chose à valoriser », a-t-il ajouté.

Lors du congrès où il a été élu le mois dernier, il a ainsi présenté un projet de label Haute Valeur Environnementale adapté à la filière céréalière. Une démarche qui semble vouloir séduire autant les marchés extérieurs que l’opinion publique française et notamment les leaders d’opinion: selon un sondage commandé par l’AGPB, seulement 53% des cadres ont une bonne image des céréaliers, contre 74% de la population française dans son ensemble.

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