Politique

Le hirak confirme son retour en force : les enseignements du 32e vendredi

Le hirak populaire revient bel et bien en force et rien désormais ne permet d’entrevoir son essoufflement, encore mois son extinction. C’est le principal enseignement à retenir de ce trente-deuxième vendredi.

Cela fait plus de sept mois que les Algériens sortent dans la rue chaque week-end, sans discontinuer, et cela fait deux vendredis de suite que la mobilisation retrouve presque ses niveaux du début de la contestation en mars-avril.

Ni le blocage de la capitale ni les arrestations qui se multiplient parmi les manifestants et les militants politiques ne semblent être de quelque utilité.

Le pouvoir a essayé presque toutes les recettes et c’est paradoxalement à chaque fois qu’il abat une carte supplémentaire que la mobilisation reprend et redouble de détermination à faire aboutir la principale revendication, exprimée par divers slogans depuis le 22 février mais qui reste inchangée dans sa substance, soit le démantèlement du système en place et l’établissement d’un Etat de droit et des libertés.

Outre les désormais habituels slogans exprimant le désir de changement et le rejet de toutes les figures du système, le mot d’ordre de ce quatrième vendredi après la rentrée a été le refus unanime de la présidentielle du 12 décembre, du moins dans les conditions dans lesquelles le pouvoir tente de l’imposer, et des premiers candidats qui ont fait part dans la semaine de leur intention d’entrer en course.

A propos de présidentielle, la machine est lancée irréversiblement, autant d’un point de vue légal que politique. Le corps électoral est dûment convoqué et les prétendants ont entamé la collecte de parrainages et même la pré-campagne pour certains.

Au lendemain de cette énième journée de grande mobilisation et à la lumière des événements qui l’ont précédée, le pays se réveille avec deux grosses interrogations : est-il possible de tenir un scrutin serein et crédible dans de telles conditions et de quel argument le pouvoir dispose-t-il encore à même de convaincre au moins une partie des manifestants de cesser de sortir et surtout de se rendre aux urnes le 12 décembre ?

Plus clairement, des mesures d’apaisement telles que la libération des détenus d’opinion dont le nombre ne cesse de grossir, le départ du gouvernement actuel ou encore l’ouverture des médias suffiront-elles pour sauver le scrutin ?

Déjà que rien dans le discours officiel et dans les faits ne permet d’espérer un tel assouplissement –on assiste au contraire à un durcissement du ton et à une escalade dans les atteintes aux libertés-, il n’est pas non plus certain que la rue, qui a placé la barre des revendications très haut, se contentera d’un lifting du plan du pouvoir sans réelles garanties que le scrutin débouchera sur le changement réclamé.

La garantie la plus à même de rassurer c’est de revoir, à l’issue d’un dialogue sérieux, la composante de l’autorité électorale indépendante. Or ni les délais ni les textes ne le permettent, à moins d’un énième report de la présidentielle. Une alternative impensable pour ceux qui ont fait la promotion de de l’élection comme unique voie de sortie de crise, après avoir échoué déjà par deux fois, le 18 avril puis le 4 juillet, à organiser le scrutin présidentiel.

En optant pour la stratégie du fait accompli par la convocation du corps électoral, le pouvoir a en quelque sorte brûlé ses vaisseaux et davantage enfoncé le pays dans l’impasse politique. Car non seulement l’essoufflement attendu des manifestations de rue ne s’est pas produit, il voit se développer une autre forme de résistance ingérable et que personne n’a vu venir : le refus de plusieurs dizaines de maires de contribuer à l’organisation du scrutin et la prise d’assaut des bureaux des élections par les citoyens dans certaines communes.

Les plus lus