La règle du 51/49 relative à l’investissement étranger en Algérie pose problème. Après Jean-Louis Levet, responsable français en charge de la coopération technologique et industrielle entre la France et l’Algérie, c’est au tour d’un haut responsable du patronat français de critiquer le climat des affaires en Algérie.
Pour Jean-Louis Chaussade, directeur général du Groupe Suez et président du conseil de chefs d’entreprise France-Algérie du Medef International (patronat français), la règle 49/51 profite aux pays voisins de l’Algérie. « Il y a une pente naturelle vers les pays où vous pouvez avoir la majorité dans les joint-ventures », soutient-il.
En plus de donner l’avantage aux pays voisins de l’Algérie, en « freinant les investissements par effet comparatif », la règle 49/51 complique le transfert de technologies. « Je peux comprendre que pour certaines entreprises françaises, cela soit difficile de faire des transferts de technologies dans ce contexte », ajoute-t-il.
Les restrictions sur les importations, autre obstacle aux investissements
Dans les relations économiques entre l’Algérie et la France, « il y a parfois des difficultés » dont la plupart sont d’ordre administratif, qui sont, selon lui, « surtout liées à la crise pétrolière « , explique Jean-Louis Chaussade.
Les restrictions imposées par l’Algérie sur l’importation de nombreuses matières premières et équipements dans le but de ralentir le flux de devises fortes vers l’étranger font partie des « difficultés administratives » qui compliquent l’arrivée d’investissements français en Algérie.
« Il y a certains freins notamment administratifs concernant l’importation d’équipements pour produire en Algérie », a déploré Jean-Louis Chaussade mercredi à Paris. « La façon dont les douanes algériennes sont établies peut parfois complexifier l’importation de certaines pièces et produits », a-t-il ajouté.
« Si on veut algérianiser une partie de la production, il faut faciliter les importations », a préconisé le patron français qui se réjouit toutefois de la présence « de beaucoup d’entreprises françaises en Algérie », du « climat des affaires apaisé » et des relations entre l’Algérie et la France qui sont « très positives ».
Outre la règle 49/51, la réglementation de change de la Banque d’Algérie notamment le transfert à l’étranger de dividendes pose également problème aux entreprises françaises. « Quand vous avez des contrats en Algérie, vous avez une part qui est payée en euro et une part en dinar et pour certaines entreprises françaises cela peut être difficile d’être payé en devise forte « , a-t-il expliqué, ajoutant qu’il « peut être difficile de rapatrier des parts de bénéfices en devises ».
Pour améliorer le climat des affaires, la réglementation concernant les transferts des devises doit être assouplie, plaide M. Chaussade pour qui « si on veut faciliter les choses, il faut faciliter les paiements et les transferts ».
Le patron de Suez s’est montré optimiste quant à la levée de ces obstacles administratifs. « Les prix du pétrole remontent et des améliorations administratives devraient faciliter encore plus le climat des affaires », a-t-il déclaré.
Quant aux rumeurs faisant état de la volonté de certaines entreprises de quitter l’Algérie à cause de ces difficultés, M. Chaussade les a formellement réfutées.
» Que je sache, il n’y a pas de retrait prévu des entreprises françaises en Algérie à cause des problèmes déjà cités », a-t-il déclaré tout en reconnaissant les difficultés rencontrées par les petites et moyennes entreprises françaises à s’installer en Algérie, car « elles ont de petits moyens et n’ont pas le droit à l’échec ».
« Elles ont peut-être plus de réticences à investir dans un pays où les règles ne sont pas nettes », justifie-t-il.
La France recule devant la Chine sur le marché algérien
Le recul de la France sur le marché algérien au profit d’autres pays comme la Chine, premier fournisseur de l’Algérie n’inquiète pas outre mesure Jean-Louis Chaussade même s’il reconnaît un recul de 19% des exportations françaises vers l’Algérie en 2016.
« Quand je vois les liens complexes entre la France et l’Algérie, je pense que la Chine mettra beaucoup de temps pour arriver au même niveau de complicité « , a expliqué le patron français.
« La fabrication automobile difficile en Algérie »
L’existence d’une réelle industrie automobile en Algérie qui fasse de la fabrication de voitures et non pas seulement du montage est difficile pour Jean-Louis Chaussade.
« Le secteur de l’automobile est certes en difficulté notamment à cause du fait que les constructeurs ne peuvent pas fabriquer de moteurs en Algérie. En effet, une telle usine ne peut être construite que pour des volumes de l’ordre de millions d’unités par an », a expliqué Chaussade pour qui « il paraît difficile, dans ce contexte, de faire des usines de fabrication automobile en Algérie ».