Économie

L’endettement extérieur est-il préférable à la planche à billets pour l’Algérie ?

ENTRETIEN. Mokrane Nouad, consultant et expert en économie, commente dans cet entretien le dernier rapport du FMI sur l’Algérie et donne son avis sur le recours à l’endettement extérieur, les mesures prises par les autorités pour faire face à la crise…

Dans son dernier rapport publié vendredi dernier, le FMI a préconisé à l’Algérie le recours à l’emprunt extérieur au lieu de la planche à billets pour financer des projets d’investissement. Est-ce que l’endettement extérieur est meilleur que la planche à billets ?

Le Fond monétaire international (FMI) a préconisé à l’Algérie d’opter pour l’emprunt extérieur au lieu de la planche à billet pour réduire son déficit public. D’avis d’experts, la préconisation du FMI est recevable et que le recours à la planche à billets est risqué quand elle est gérée par les pouvoirs publics face à une dualité : sociale et économique. L’État doit renouer avec sa fonction régalienne et laisser l’initiative privée se développer. Si l’emprunt est imposé, ce secteur sait calculer et ses investissements sont ciblés, s’il est bien orienté avec une bonne étude du marché et de faisabilité on aura moins de risques et cet argent va à l’objectif visé c’est-à-dire à l’investissement productif.

L’expérience nous a montré que souvent cet argent véhiculé par les pouvoir publics génère toujours des risques du fait que le volet social prime sur le volet économique. La mondialisation c’est l’ouverture du marché à travers les flux commerciaux et ces échanges génèrent des passages obligés à travers des emprunts mais mesurés.

L’Algérie a une chance d’avoir une manne d’entrées qui peut lui permettre de gérer ces risques mais en revoyant le système de gouvernance actuel et en se basant sur la fonction régalienne de l’État et créer un climat des affaires pouvant mobiliser les ressources dormantes du pays : argent dormant, ressources sous exploitées, compétences délaissées, gain facile et spéculation.

Le FMI a aussi salué les mesures prises par les autorités algériennes pour faire face à la crise. Ces mesures sont-elles suffisantes pour stimuler l’économie nationale ?

La crise provoquée par le choc pétrolier a contraint notre pays à adopter une nouvelle démarche s’orientant vers un nouveau modèle économique à l’effet de trouver de nouvelles sources de revenus hors-hydrocarbures et cela par : une modernisation du système financier, amélioration du climat des affaires, nouvelle politique de l’emploi, réforme de la politique budgétaire, réaménagement des subventions de l’État, rôle du secteur privé, le Partenariat Public-Privé, restrictions temporaires aux importations et diversification de l’économie.

Ces mesures sont imposées du fait et si elles sont bien menées on aura moins de pression et une assise nouvelle pour amorcer la relance économique du pays et d’aller vers des emprunts souhaités et non imposés.

Aujourd’hui, le secteur de l’agroalimentaire renferme une marge de progrès importante pouvant réduire considérablement nos importations et développer des exportations générant ainsi une manne non négligeable de devises ce qui pourrait contribuer largement à l’amélioration de notre balance commerciale.

D’autres secteurs peuvent jouer ce même rôle telle que la valorisation de nos richesses autres qu’agricoles en s’inscrivant dans une chaîne de valeur tels que les hydrocarbures et d’autres minerais qui sont plus vendus à l’état brut que valorisés, d’où un gain considérable à tirer.

Après avoir épuisé toutes les potentialités dormantes, avoir recours à un emprunt pour développer ces activités oui c’est une solution. L’argent existe mais il n’est pas dans les caisses de l’État et le problème c’est comment mobiliser cette manne pour le développement et la diversification économique. L’objectif aujourd’hui, c’est d’inverser la tendance actuelle qui est « de dépenser plus et de produire moins par produire plus en dépensant moins ».

La baisse de la production d’hydrocarbures a pesé sur la croissance du PIB, selon le FMI. Sonatrach a démenti à plusieurs reprises les informations sur la baisse de la production. Un commentaire ?

Au lieu de polémiquer sur ces chiffres, il y a lieu de demander au FMI de nous accompagner dans nos efforts pour le rétablissement de notre équilibre financier et de nous aider à trouver de nouvelles sources de revenus hors-hydrocarbures au lieu de privilégier le recours à ce fond qui nous a coûté chèrement.

Cette institution a fait remarquer que ses administrateurs « prennent bonne note du dosage de mesures prévues par les autorités, à savoir une augmentation des dépenses budgétaires en 2018 suivie par la reprise de l’assainissement des finances publiques à moyen terme, le financement monétaire des déficits budgétaires, des restrictions temporaires aux importations, ainsi que des réformes structurelles visant à diversifier l’économie ».

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