
Le 20 août 2025, les services agricoles de la wilaya de Bejaia ont inauguré aux côtés d’agriculteurs de la commune de Beni Maouche une exposition de figues. Celles-ci sont les seules à être labellisées en Algérie. Depuis 2016 elles possèdent en effet l’indication géographique « Figue sèche de Beni Maouche ». Avec les dattes Deglet Nour, il s’agit d’un cas unique.
L’exposition est située sur une place en hauteur du village et est réalisée en collaboration avec la commune de Beni Maouche. Sur des tables sont disposées les fameuses figues.
A lire aussi : Air Algérie casse les prix avec une nouvelle promotion
Des figues fraîches à peine récoltées aux couleurs vertes marbrées de violet. Symboliquement les représentants des services agricoles ont coupé le ruban marquant l’entrée de l’exposition. A côté des figues, des échantillons de la production de terroir ont été ajoutés : amandes, huile d’olive, figues de barbarie.
Une indication géographique
C’est à la demande de l’association des figuiculteurs de la commune de Beni Maouche que ce produit a obtenu ce label indication géographique (IG). Un partenariat avec des experts de l’Union Européenne a contribué à une mise en conformité pour l’obtention du précieux label.
A lire aussi : Algérie : la galère des importateurs de véhicules
Seules certaines variétés de figues sont concernées : Taamriwt, Azenjer et Taberkent. Les fruits doivent avoir été récoltés sur des figuiers plantés à une altitude dépassant 400 mètres et une fois secs répondre au calibre défini par un cahier des charges.
L’aire géographique de l’IG concerne 11 communes de la wilaya de Béjaïa et 10 de la wilaya de Sétif et a concerné 160 adhérents en 2016. Des producteurs qui s’engagent à respecter le cahier des charges pour une production annuelle estimée à 5.000 quintaux
A lire aussi : La France s’intéresse à la pomme de terre algérienne
L’association est chargée de la préservation du label et à ce titre peut saisir la justice face à d’éventuels contrevenants. Elle mène également des actions de promotion. C’est dans ce cadre qu’est organisée l’actuelle exposition de figues fraîches à Beni Maouche.
L’association doit également garantir la conformité des figues selon les clauses du cahier des charges.
En juin 2022, Omar Bekkouche, le secrétaire général de l’Association des producteurs de la figue sèche de Béni Maouche confiait au quotidien El Watan les actions en cours : « On essaye de faire en sorte que tous les producteurs de Béni Maouche vendent avec ce logo et faire la différence entre le produit labellisé et celui qui ne l’est pas ».
Outre le logo, ce professionnel insiste sur la présentation des produits : « Il reste à régler le problème de l’emballage et le conditionnement qui est à parfaire. Il nous faut un emballage spécifique pour une commercialisation plus fluide et efficace ». Pour cela, un partenariat a été passé avec l’université de Béjaia.
Ces dernières années, la production de figues est affectée par la sécheresse et les incendies qui ont détruit 7.000 figuiers. A cela s’ajoute l’âge avancé d’une partie des arbres aussi les producteurs souhaitent la mise en place d’un plan de régénération soutenu par les services agricoles.
Maîtrise du séchage et du conditionnement
En matière de commercialisation, la filière souffre du manque d’un centre de conditionnement et de « l’anarchie qui règne dans le marché informel », confiait en 2023 un agriculteur.
Le séchage au sol utilise des supports traditionnels confectionnés à partir de fibres locales. Une pratique qui illustre bien le lien de ces figues au terroir. Cependant, lors du séchage la poussière et les pontes d’insectes posent problème.
En Turquie, une partie des figues sèches sont traitées aux sulfites. Comme pour la conservation des abricots secs, les figues sont disposées dans un local où du soufre en poudre est enflammé dans un récipient à l’aide d’alcool. Les célèbres figues turques Baglama déclinent toute utilisation de sulfites de cette technique décriée par les associations de consommateurs européens.
Pour sa part, afin d’obtenir les fruits moelleux et à peau fine recherchés par les consommateurs, l’inspecteur phytosanitaire de la wilaya de Tizi-Ouzou, Boukhalfa Kaci, conseille un traitement en plusieurs étapes. Celui-ci passe par un bain d’eau bouillante additionnée de soude caustique qui permet d’éliminer les parasites puis par le passage dans une eau salée chaude. Répétée plusieurs fois, cette opération permet de nettoyer et de ramollir les fruits, confiait cet expert à l’agence APS en septembre 2023.
Hausse du revenu des agriculteurs
L’obtention d’un label a permis à la figue sèche de Béni Maouche de gagner en notoriété jusqu’en France où elles sont demandées au pavillon Algérie du Salon International de l’Agriculture de Paris. Les ventes ont connu un bel essor.
« Depuis la labellisation, la figue sèche s’est fait une place et obtient un bon prix de vente. L’agriculteur arrive à engranger de meilleurs bénéfices et la renommée du produit n’est plus à faire », confiait en juin 2022 Omar Bekkouche à El Watan.
A l’étranger, la demande en figue sèche est forte. En France, le kilo de figues sèches Baglama est vendu à 21,43 euros. La figue de Beni Maouche vise l’exportation, reste cependant à augmenter la production et à répondre à la demande locale.
Selon Aissa Manseur, consultant en agriculture et conseiller à l’export, de nombreux produits pourraient faire l’objet d’une IG : raisin de table du Titteri, abricots et grenades de Messaâd, cerises de Miliana, agneaux Ouled Djellel et Rembi nourris exclusivement en steppe. Nombreux sont les autres produits susceptibles d’être labellisés selon cet expert. Les figues de Beni Maouche et les dattes Deglet Nour montrent la voie.