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Les Marocains dans la rue contre la vie chère

Rien ne va plus au Maroc. Alors que le roi Mohamed VI, malade, a réduit au minimum ses apparitions publiques, le Front social est en ébullition à cause de la dégradation du pouvoir d’achat de la population, consécutivement à une hausse vertigineuse des prix des produits de base.

Samedi soir, de nombreux Marocains sont sortis dans la rue pour exprimer leur ras-le-bol de la situation. Les manifestations, qui ont eu lieu dans plusieurs villes du royaume, ont débordé sur des revendications politiques, comme la contestation du gouvernement, la réclamation de la libération des détenus politiques et le rejet de la normalisation des relations avec Israël.

Le Maroc est l’un des pays les plus touchés par les retombées économiques de la crise sanitaire et de la guerre en Ukraine. Selon les chiffres officiels, l’inflation a atteint 9,4% en 2022, contre 4% en 2021.

Les produits alimentaires de base et les carburants sont les plus concernés par la hausse des prix. Les produits alimentaires ont vu leur prix monter tout au long de ces derniers mois et ils se sont encore envolés depuis le début du Ramadan, avec une augmentation estimée à 18%.

 « Je n’en peux plus », déclare à l’AFP un manifestant qui a pris part à un rassemblement organisé samedi soir à la place Sraghna de Casablanca. D’autres rassemblements ont eu lieu simultanément dans d’autres villes du royaume, à Tanger, Marrakech et Rabat.

Les manifestants ont fustigé le gouvernement de Aziz Akhannouch auquel ils ont rappelé son engagement, non tenu, de mener une politique « sociale ». Au lieu d’être celui de « l’État social » qu’il a promis, le gouvernement, issu des législatives de 2021, est celui des « disparités sociales », a ironisé un autre manifestant.

Les disparités sociales sont endémiques au Maroc. Le rapport de l’année 2022 sur les inégalités (World Inequality Report), a fait ressortir que « les inégalités de richesse au Maroc sont extrêmes », classant le pays parmi les plus inégalitaires d’Afrique et du monde. 10% de la population du royaume détiennent la moitié des revenus.

Alors que le revenu moyen annuel au Maroc est de 7.800 euros, les 10% les plus riches touchent en moyenne 38.700 euros par an.

Le rapport évoque « une classe moyenne relativement pauvre ». Cela a toujours été le cas puisque les revenus de la minorité la plus riche ne sont jamais descendus sous 48% et ceux de la moitié de la population ont atteint dans le meilleur des cas 14%. La crise économique qui frappe le Maroc a accentué les inégalités et rendu la situation intenable pour la majorité de la population marocaine.

Les Marocains dans la rue contre la vie chère 

La crise est telle que le royaume a dû recourir de nouveau à l’endettement extérieur, alors qu’il comptait déjà parmi les pays les plus endettés d’Afrique.

Lundi 3 avril, le Conseil d’administration du Fonds monétaire international (FMI) a approuvé le déblocage d’une ligne de crédit de 5 milliards de dollars au profit du Maroc. C’est la quatrième ligne accordée au Maroc par l’institution de Bretton Woods depuis 2012, après trois financements similaires de 3 milliards de dollars chacun.

Outre la protestation contre la vie chère, les Marocains sortis dans la rue samedi soir ont aussi réclamé la libération des détenus d’opinion, nombreux dans le royaume. En janvier dernier, le Maroc a fait l’objet d’une résolution du Parlement européen condamnant les restrictions sur la liberté de la presse et le recours aux accusations de « délits sexuels » pour emprisonner des journalistes indépendants.

Les manifestants ont aussi réitéré leur rejet de la normalisation des relations avec Israël, officialisée en décembre 2020 en vertu d’un accord triangulaire qui prévoyait aussi la reconnaissance par les États-Unis de la souveraineté marocaine sur les territoires sahraouis occupés. Au moins sur le plan économique et social, le Maroc peine visiblement à récolter les dividendes de cette compromission.

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