Économie

Liquidités : crise ou pas crise ?

La question de la disponibilité des liquidités dans les bureaux de poste et les agences bancaires revient sur le devant de la scène dans ce contexte de crise sanitaire qui touche l’Algérie.

De longues files d’attente sont signalées devant les bureaux de poste, notamment à l’occasion du virement des pensions de retraite, et beaucoup de témoignages partagés sur les réseaux sociaux attestent de l’existence d’une crise de liquidités. En tout cas, dans les agences, les retraits sont plafonnés à 50 000 Da.

Le problème ne pouvait pas plus mal tomber, la prévention et la lutte contre le Covid-19 imposant des règles strictes à observer et des comportements à éviter, dont justement les files d’attente, notamment de personnes âgées, les plus vulnérables à la maladie.

Il s’agit aussi d’une conjoncture où les citoyens ont besoin de disposer de leur argent pour faire face aux impératifs du confinement, en plus des fêtes de l’Aïd qui approchent.

Pour le ministre de la Poste et des Télécommunications, Brahim Boumzar, il n’y a pas de crise à proprement parler, du moins au niveau des bureaux de poste, qui sont sous sa tutelle. Il préfère parler de « perturbation » conjoncturelle due à la fois à la crise sanitaire et au virement simultané des pensions de retraites, vers le 20 de chaque mois.

Algérie Poste compte 27 millions de comptes, dont 22 millions actifs. Les retraités, eux, sont au nombre de plus de 3 millions. Durant les six premiers mois de l’année en cours, 84 000 retraits ont été effectués et les titulaires de comptes ont retiré 374 milliards Da rien que durant le dernier mois.

« Il n’y a pas de crise de liquidités. Les liquidités sont là. La Poste a répondu, le nombre d’opérations est resté le même, et a même augmenté. Aujourd’hui il y a une perturbation de la liquidité. Avec la conjoncture pandémique, les effectifs sont réduits, les déplacements aussi », défendait-il le 15 juillet sur les ondes de la radio nationale.

La solution passe par la numérisation

« On travaille en étroite collaboration avec nos collègues de la Banque d’Algérie, on a mis en place une cellule d’écoute, de veille et d’échange d’informations. On a observé des pics, à chaque fois les 20 ou 24 du mois. On doit arrêter de traiter les symptômes, il faut traiter les causes. Pour le cas de nos retraités, on a mis en place un groupe de travail avec la caisse des retraites afin d’aplanir cette courbe (…) On a plus de 3 millions de retraités, il est impossible qu’ils retirent tous leur pension en deux jours », a-t-il développé.

La solution adoptée, c’est donc d’établir un nouveau calendrier pour un virement des pensions étalé sur plusieurs jours. Le calendrier a été rendu public récemment et est entré en vigueur dès le virement de ce mois de juillet.

« C’est vrai que ce n’est pas évident pour nos retraités, reconnaît M. Boumzar, mais on va leur expliquer et les accompagner. Il y aura des SMS pour les informer sur les jours des virements et éviter, ainsi l’affluence de trois millions de retraités en 48 heures sur les bureaux de poste. »

Le ministre des Finances, lui, reconnaît qu’il y a bien crise de liquidités et préconise une solution radicale : le développement de la numérisation et des paiements électronique.

Aymen Benabderrahmane, qui s’exprimait sur la question le 4 juillet, a expliqué le manque de liquidités par « le ralentissement de la dynamique économique et financière du fait du coronavirus ».

« L’économie algérienne repose sur le versement en espèces, ce qui requiert une grande liquidité », a-t-il justifié, assurant toutefois que l’Algérie s’achemine vers la numérisation de l’économie et des transactions, ce qui « mettra fin au problème de liquidités ».

Le ministre de la Poste promet lui aussi comme solution durable le développement de l’Internet dans les bureaux de poste et la numérisation des opérations postales. Le problème, tout le problème se situe peut-être à ce niveau. L’Algérie a pris beaucoup de retard dans la numérisation de son système financier.

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