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Louisa Hanoune met en garde contre un « embrasement incontrôlable »

Louisa Hanoune met en garde contre un « embrasement incontrôlable »

Un réquisitoire au vitriol suivi de quelques fleurs jetées aux autorités publiques. La secrétaire générale du Parti des Travailleurs a soufflé le chaud et le froid dans son évaluation de la situation politique, économique et sociale du pays lors d’une conférence de presse organisée ce mercredi au siège du parti à Alger.

D’abord la question de l’heure, le choléra. Louisa Hanoune n’y va pas par trente-six chemins pour désigner le coupable : la politique d’austérité adoptée depuis quelques années par les autorités. « L’épidémie de choléra était inéluctable dès lors que plus de 1000 communes vivent une situation d’asphyxie suite à la baisse de leurs budgets depuis 2015. Les responsables assurent que l’eau potable n’est pas incriminée dans l’apparition du choléra, mais le déficit en AEP ne pousse-t-il pas les citoyens à boire l’eau polluée des sources non contrôlées, même dans certaines communes d’Alger ? Les statistiques de l’OMS démontrent un recul du taux de couverture en AEP de 91,5% en 1990 à 83% en 2015. Même le coût des factures incite les citoyens à avoir recours à l’eau gratuite de sources. Aussi, la prolifération des décharges sauvages est le résultat de la cession de la gestion des déchets aux sociétés privées », explique-t-elle.

Mme Hanoune déborde alors sur le secteur de la santé que, accuse-t-elle, « l’ancien ministre a livré à des prédateurs qui n’ont rien à voir avec le secteur » à travers la nouvelle loi sur la santé. « Si ce texte est appliqué, il conduira à la mort inéluctable des hôpitaux publics qui seront privés du financement de l’État au nom d’un prétendu partenariat public-privé. Il faudra s’attendre à d’autres épidémies », met en garde la SG du PT.

La situation du pays est intenable, et pas qu’en matière de santé. « La moindre étincelle pourra conduire à un embrasement incontrôlable », redoute Mme Hanoune qui met en avant la paupérisation de larges franges de la population, conjuguée à une situation politique tendue et des atteintes aux libertés. « Même un médecin dans le secteur public perçoit 50.000 DA le mois, alors que le salaire nécessaire pour une famille moyenne se situe entre 73.000 et 80.000 DA. Aussi, les chiffres de l’inflation et du pouvoir d’achat avancés par les institutions internationales sont erroné ».

« Les institutions de l’État ont été Escobarisées »

La responsable du PT s’est aussi attardée sur le phénomène de la corruption : « L’affaire des 701 Kg de cocaïne a révélé l’escobarisation des institutions de l’État. La quantité s’est transformée en qualité en matière de détournement et de dilapidation des deniers publics. Le citoyen est acculé dans ses derniers retranchements et il pourrait avoir des comportements qui mèneront à l’irréparable. Nous avons déjà des signes à Djanet (…) Le système escobarisé ne peut pas se réformer ».

Poursuivant sur sa lancée, elle pointe du doigt les barons de l’import-import et révèle que 120.000 importateurs ont été blacklistés. Pour elle, la solution est toute indiquée : le retour, même de façon provisoire, au monopole de l’État sur le commerce extérieur et la réouverture des Galeries algériennes et des Aswak el Fellah.

Évoquant l’appel du président Bouteflika à la constitution d’un Front populaire contre la corruption et la drogue, Mme Hanoune a acquiescé qu’il s’agit en effet de deux fléaux qui menacent la nation, mais, souligne-t-elle, le peuple ne peut que dénoncer, il n’a aucun pouvoir d’agir alors que « tout le monde sait que les institutions de l’État sont gangrenées par la corruption ». L’occasion pour elle de remettre sur le tapis la vieille revendication de l’élection d’une assemblée constituante, révélant au passage que la lettre adressée au chef de l’État a été signée même par des élus du FLN.

« Seules des décisions courageuses pourront rendre espoir à la jeunesse », assène la chef du PT, estimant que le projet de Loi de finances 2019 peut être l’occasion pour redresser la situation et corriger les erreurs. Là, Louisa Hanoune change son fusil d’épaule et adopte un ton plus conciliant vis-à-vis des autorités.

D’abord, elle se félicite du fait que l’avant-projet de loi ne contienne aucune nouvelle taxe, « même si cela reste insuffisant car le pouvoir d’achat a été détruit et le recrutement gelé par le décret d’avril 2015. Il faut arrêter l’austérité et en finir avec l’injustice en matière d’impôts, puisque ce sont les plus démunis qui payent ».

« L’État algérien a résisté aux pressions en refusant d’engager son armée dans des conflits en dehors de ses frontières (…) Même dans le domaine économique, l’Algérie n’a pas plié devant les pressions extérieures, même si elle a fait quelques concessions. L’État a tenu à sauvegarder son autonomie de décision en maintenant par exemple la règle 51/49. L’Algérie a des spécificités qu’elle a refusé d’abandonner que ce soit en matière de politique étrangère ou dans le domaine économique. Même si nous ne sommes pas d’accord avec la politique d’austérité, nous avons enregistré des acquis. Aucun état au monde n’a une politique de logement comme celle de l’Algérie qui a construit 3 millions d’unités », reconnaît-elle.

Interpellée sur les questions politiques de l’heure, Mme Hanoune a laissé tout le monde sur sa faim en refusant d’émettre le moindre commentaire sur les derniers changements survenus au niveau de la hiérarchie de l’ANP ou encore sur le transfert du président de la République en Suisse pour des contrôles médicaux et même le cinquième mandat qu’elle qualifie de « faux débat ».

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