Décidément, au Maroc, sortir de l’unanimisme ambiant et tenir des propos apaisés à l’égard de l’Algérie est une entreprise très risquée. Nabila Mounib, ancienne secrétaire générale du Parti socialiste unifié (gauche), en a fait l’amère expérience.
La femme politique est traînée dans la boue pour avoir laissé entendre que les attaques sur les réseaux sociaux contre le Maroc, notamment au cours de la CAN 2023 en Côte d’Ivoire durant laquelle une vive polémique a éclaté sur les réseaux sociaux entre les supporters des deux pays, ne sont pas forcément l’œuvre d’Algériens.
Ce qui a fait sortir les relais du palais royal de Rabat de leurs gonds, c’est surtout ce qu’a dit Nabila Mounib à propos de l’origine des insultes qui visent l’Algérie et le Maroc qui n’entretiennent plus de relations diplomatiques depuis août 2021.
Dimanche 4 février, elle a fait état en marge d’une rencontre à Oujda de l’existence de « mouches électroniques sionistes » qui maîtrisent les dialectes de l’Algérie et du Maroc et qui cherchent à « raviver l’animosité et à attiser la guerre ».
La suite de ses propos tenus devant la presse est un plaidoyer pour le rapprochement, la fraternité et la coopération entre les deux voisins maghrébins pour lesquels, a-t-elle dit, « la guerre ne présente aucun intérêt ».
La militante de gauche a appelé à l’édification du grand Maghreb, pour faire « front commun au Sud de la Méditerranée », en mettant à profit les richesses « complémentaires » des deux pays.
« Nous ne sommes pas en confrontation avec l’Algérie », mais contre « le sous-développement et le nouveau colonialisme », a-t-elle insisté, tout en appelant les Marocains à « éviter les insultes ».
Un tel discours d’apaisement ne passe pas au Maroc, surtout que la femme politique a désigné directement le nouvel allié du royaume, Israël, comme étant la partie qui cherche à diviser et qui pousse à la confrontation entre deux peuples que rien en principe ne sépare.
Le Maroc a normalisé ses relations avec Israël en décembre 2020 sous l’égide des États-Unis de Donald Trump en contrepartie de la reconnaissance américaine de la « souveraineté » marocaine sur les territoires du Sahara occidental occupé.
L’initiative est largement rejetée par le peuple marocain qui l’a démontré à travers ses actions de soutien à la Palestine depuis le début de la guerre à Gaza le 7 octobre dernier.
Maroc – Algérie : une femme politique pointe le rôle néfaste d’Israël
De nombreux titres de la presse marocaine se sont déchaînés contre Nabila Mounib après ses propos. « Ne nous trompons pas d’ennemi : ce n’est pas Israël qui conteste la souveraineté du Maroc sur ses chères provinces sahariennes », écrit le Collimateur.ma qui qualifie la femme de « militante rouge ». Pour ce journal, l’ennemi est donc bien l’Algérie et non Israël.
Pour le 360.ma, un autre relais du Palais royal, Mounib a donné « libre cours à ses théories conspirationnistes » en évoquant une manipulation israélienne sur les réseaux sociaux.
Le site a carrément versé dans l’insulte en rappelant de précédents propos de la femme politique sur le vaccin anti-Covid, lui conseillant de « s’en administrer un salutaire pour sa santé mentale : le vaccin contre la bêtise ».
Pourtant, Nabila Mounib n’a fait que répéter ce que des experts étrangers ont révélé et prouvé à plusieurs reprises. En octobre 2023, la plateforme basée au Qatar EEKAD avait révélé l’existence de 22.000 comptes sur X portant de faux profils marocains.
Des comptes organisés qui utilisent la même rhétorique et interagissent avec les mêmes groupes. Marouane Harmach, spécialiste marocain de la communication digitale, avait alors directement accusé les services israéliens d’être derrière cette opération afin de « promouvoir l’idée que la normalisation était une tendance dominante ».
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