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Message de Bouteflika et communiqué du MDN : de troublantes similitudes

Message de Bouteflika et communiqué du MDN : de troublantes similitudes

Dimanche 30 décembre, le ministère de la Défense nationale a surpris tout le monde en rendant public un communiqué d’une rare fermeté, dénonçant des prises de position politiques exprimées par des officiers supérieurs à la retraite dans les colonnes de la presse.

Même s’il n’est pas cité nommément, il n’y a pas de doute que la mise au point de l’armée est destinée au général-major Ali Ghediri qui, cinq jours auparavant, avait laissé entendre, dans un entretien accordé au journal El Watan, que l’ANP devait assumer ses responsabilité en empêchant la « transgression » de la Constitution par le report de l’élection présidentielle d’avril 2019.

Le communiqué du MDN, mis en ligne sur son site officiel, n’est pas sans rappeler le message du président Bouteflika aux walis il y a tout juste un mois. Au-delà du courroux de la présidence et de l’armée qu’ils expriment clairement, les deux textes ont aussi cette similitude d’avoir été rédigés dans la même conjoncture politique et d’avoir une même toile de fond : la présidentielle d’avril prochain.

« Les manœuvres politiciennes que nous observons à l’approche de chaque échéance cruciale pour le peuple algérien est la preuve tangible de ces intentions inavouées, qui s’éclipsent dès que notre valeureux peuple leur tourne le dos », écrivait le président dans son message du 28 novembre.

« À l’approche de l’échéance électorale présidentielle, certains individus mus par des ambitions démesurées et animés par des intentions sournoises tentent et par tous les moyens, notamment les médias, de préjuger des prises de positions de l’institution militaire vis-à-vis des élections présidentielles et s’arrogent même le droit de parler en son nom », dénonçait pour sa part le ministère de la Défense dans son communiqué du 30 décembre.

La similitude ne s’arrête pas à la toile de fond. La rhétorique utilisée dans les deux textes est aussi d’une frappante ressemblance, notamment par la violence du ton. Morceaux choisis. D’abord dans le message de Bouteflika : « Cercles de prédateurs, cellules dormantes, intentions inavouées, raisons obscures, aventuristes, faucilles du massacre, faire basculer le pays dans l’inconnu, thèses pessimistes et défaitistes, éléments dévoyés, funestes visées… ».

Ensuite dans le communiqué du MDN : « Ambitions démesurées, intentions sournoises, individus aigris et sans envergure, moyens les plus déloyaux, cercles occultes, esprit revanchard, affabulations débridées, narcissisme maladif, grave dérive, seuil inquiétant d’inconscience, ambition aveugle, cercles qui les commanditent, dicté par leurs mentors, approche maladroite, arguments fallacieux, indécence, seuil de l’intolérable… ».

Dans une conjoncture politique tendue et incertaine, un tel ton ne peut passer inaperçu. La présidence et l’armée semblent viser une « partie », qu’elles ne nomment pas, mais qui aurait donc des « intentions » et des « visées » « inavouées ».

C’est écrit noir sur blanc dans les deux textes où il est aussi précisé que tout cela est en lien avec la prochaine échéance électorale. Le président a parlé de « cercles occultes » et le MDN a abondé dans le même sens en suggérant que les propos du général Ghediri relèvent d’une « machination fomentée par des cercles occultes » et que sa « démarche ne saurait être individuelle » mais dictée par ses « mentors ».

S’il est aisé d’en déduire que la présidence et l’état-major de l’armée sont dans la même tranchée, il est en revanche difficile d’identifier à ce stade cette « partie » qui semble avoir d’autres plans que celui du clan présidentiel.

Qui est-elle, quelles sont ses intentions et surtout dans quelle mesure elle pourra influer sur le cours des événements ? Pour l’instant, personne n’apporte de réponse à ces questions.

On peut néanmoins être certains d’une chose : pour que la présidence et l’ANP, soit deux des plus importantes institutions du pays, sortent de leurs gonds et troquent leur rhétorique mesurée pour un discours cru, la menace doit être prise très au sérieux.


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