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Nadia Murad, une survivante de l’enfer de Moussoul

Nadia Murad, une survivante de l’enfer de Moussoul

L’irakienne Nadia Murad Basee Taha, 25 ans, a obtenu le prix Nobel de la paix 2018, partagé avec le congolais Denis Mukwege. A Oslo, le comité du Nobel a décidé d’attribuer le Nobel de la paix à Denis Mukwege et Nadia Murad pour leurs «efforts visant à mettre fin à l’utilisation de la violence sexuelle comme arme de guerre et de conflit armé ».

En août 2014, des hommes armés, appartenant à Daesh, attaquent le village de Kocho, dans la région de Sinjar à majorité kurde, dans le Nord-ouest de l’Irak, où vit la communauté Yézidie, une minorité religieuse non musulmane (qui compterait à peine 250.000 fidèles à travers le monde).

Les assaillants obligent les habitants à se convertir de force à l’islam. Après douze jours de pression, et face aux refus des yézidis, les partisans d’El Baghdadi engagent des représailles d’une rare sauvagerie. Ils tuent les hommes et les adolescents par balles ou à l’arme blanche avant de les enterrer dans les fosses communes.

Nadia Murad a perdu six de ses frères dans ce carnage. Les hommes en âge de combattre sont enrôlés de force dans les troupes de Daesh alors que les femmes sont conduites à Moussoul, qui était sous contrôle de la même organisation terroriste qui en a fait « une capitale », pour servir de domestiques aux chefs de guerre ou d’esclaves sexuelles.

 

 

Nadia Murad, ses sœurs et ses nièces connaissent alors l’horreur : elles sont frappées, humiliées, obligées à subir le viol. Selon son propre témoignage, devant le Conseil de Sécurité, en décembre 2015, Nadia Murad, captive d’un certain Salman, est forcée au viol collectif en raison de son refus de se convertir à l’islam. « Ils ont pris des photos de nous avant de les accrocher aux murs pour qu’on puisse nous vendre, nous acheter ou nous échanger contre d’autres filles », a-t-elle confié à la BBC.

« Esclaves sexuelles »

Après une tentative ratée de fuite, Nadia Murad est punie avant d’être « prêtée » à d’autres hommes qui l’utilisaient comme « un objet » de jouissance. Un jour, elle réussit à s’échapper d’un bus dont le chauffeur voulait « la vendre » dans un marché de Moussoul. Elle court dans les rues de la ville, déjà dévastée, pour se réfugier chez une famille musulmane qui l’aide à rejoindre le camp de réfugiés de Rwanga, situé dans ville de Dahuk, au Nord de l’Irak.

Nadia Murad s’est installée ensuite à Stuttgart, en Allemagne où vit sa sœur, grâce au soutien d’une organisation d’aide aux Yézidis. Elle a livré un premier témoignage sur son calvaire au quotidien la Libre Belgique.

Appuyée par l’avocate britannique d’origine libanaise, Amal Alamudin, épouse de l’acteur américain George Clooney, Nadia Murad ne cesse de raconter au monde entier son drame et celui des femmes de Sinjar. « Difficile pour les femmes du Moyen Orient de dire qu’elles étaient des esclaves sexuelles », a-t-elle confié après avoir appris l’obtention du prix Nobel de la paix.

 

 

Selon elle, Daesh a kidnappé plus de 6000 femmes Yézidies à partir de 2014. Près de 3000 femmes Yézidis sont encore portées disparues ou captives de Daesh en Irak et en Syrie, d’après un récent décompte de l’ONU. A National Geographic, Nadia Murad a parlé de « génocide » subi par les Yézidis par le passé « en raison de leur religion ». « Pour Daesh, nous sommes des gens impurs, nous ne sommes pas les gens du Livre. Nous n’avons donc pas le droit de vivre dans une région musulmane », a-t-elle dit.

Porter la parole des victimes

Depuis septembre 2016, Nadia Murad est ambassadrice de bonne volonté des Nations Unies pour la dignité des victimes du trafic d’êtres humains. Elle se dit décidé à « porter la parole des survivants » du cauchemar de Sinjar et de Moussoul. « Mon but est que justice soit faite », a-t-elle promis.

Elle veut que les crimes de Daesh commis contre les yézidis soient reconnus comme tels et que les Yézidis, qui vivent en Irak depuis longtemps, puissent revenir à « leurs terres natales ». Nadia Murad, qui a décroché le prix Sakharov en 2016 avec Lamia Haji Bachar, une autre Yézidie, a fait l’objet d’un documentaire de l’américaine Alexandria Bombach, « On her shoulders » (sur leurs épaules), primé au dernier festival de Sundance aux Etats Unis.

 

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