Économie

Plan d’action du gouvernement : des remèdes pour une économie malade

Sans surprise, le plan d’action du gouvernement du premier ministre Aïmene Benabderrahmane, nommé début juillet, est axé sur la relance et la réforme de l’économie.

Ses objectifs peuvent se résumer à la diversification de l’économie nationale en  réduisant la part des hydrocarbures et la réduction du déficit de la balance commerciale en rationalisant les importations et en encourageant les exportations hors hydrocarbures.

Pour soigner une économie malade, des actions sont prévues pour lever les contraintes qui bloquent l’investissement, avec une priorité accordée aux secteurs et filières à « fort potentiel » de croissance et dont les effets sur la santé financière du pays pourront se ressentir à moyen et même à court termes. La stratégie semble cohérente, pour peu que les mesures envisagées soient concrétisées sur le terrain.

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Le document contenant le plan d’action expose les actions à mener pour « moderniser le secteur bancaire et financier », un secteur dont le fonctionnement est régulièrement mis à l’index par les spécialistes comme étant un facteur de blocage.

Le gouvernement prévoit dans ce sens la densification du réseau bancaire et des assurances, le déploiement des banques algériennes à l’étranger, la digitalisation et l’internationalisation, la création d’une banque postale et la modernisation des systèmes de paiement.

Il prévoit aussi l’introduction en bourse de deux banques publiques, dans le cadre des réformes structurelles du marché financier, afin d’accroître la contribution de la bourse dans la mobilisation de l’épargne et le financement de l’économie. Le gouvernement ne révèle pas les noms des deux banques, et ne donne aucune échéance pour leur introduction en bourse.

Surtout, il promet la poursuite de la révision de la politique de change, « pour mieux répondre aux besoins des exportateurs et être au diapason du processus inévitable d’ouverture de l’économie nationale » et constituer « un stimulus pour un meilleur accompagnement des investisseurs dans leurs quêtes de parts de marchés à l’export ». Il s’agit là de l’une des principales revendications des exportateurs, à travers notamment leur association, Anexal.

Entreprises publiques : pas de révolution en vue

Le gouvernement compte dans un autre registre s’attaquer au lourd dossier des capitaux marchands de l’Etat. À défaut d’être des vecteurs de croissance, les entreprises publiques sont au contraire devenues un lourd fardeau pour la bourse publique.

Toutes les réformes, ou les restructurations, engagées jusque-là ont échoué.  C’est pour cela que dans le plan d’action, il est question de la mise en place d’une « nouvelle approche de gestion des participations de l’Etat ».

Même s’il est question d’engager « une restructuration du Secteur Public Marchand à la lumière des audits engagés et ouverture du capital des entreprises », il n’y a pas de révolution en vue, c’est-à-dire la privatisation pure et simple des entreprises en dehors de celles considérées comme stratégiques pour permettre à l’Etat de se consacrer à sa mission de régulation.

Preuve que l’Etat compte garder au moins une partie de ses entreprises, le gouvernement prévoit d’ « étudier les mesures financières pour la relance de l’activité de certaines entreprises exportatrices », entre autres mesures.

Tous les spécialistes s’accordent sur le fait que le climat des affaires en Algérie n’est pas attractif. Son amélioration constitue une priorité pour le président de la République depuis son élection, mais très peu d’actions ont été entreprises.

« Dans le cadre de l’amélioration de l’attractivité du climat d’investissement, le gouvernement s’engage à lever toutes les entraves à l’acte d’investir, par des mesures organisationnelles et financières », lit-on dans le plan d’action du gouvernement.

La principale action prévue est la réforme du code de l’investissement pour « donner davantage de visibilité et de stabilité juridique et institutionnelle aux investisseurs potentiels », ainsi que la lutte contre la bureaucratie, le renforcement de « la coordination entre les différents organismes » et la refonte du Guichet Unique.

Et pour rester en adéquation avec la politique en cours de préservation des réserves de change, il est question de « prioriser les entreprises dont le domaine d’activité ne sollicite pas de recours à la devise ».

Lutte contre l’informel

L’autre saignée de l’économie algérienne, connue de tous et dénoncée régulièrement, est la part importante de l’informel. Le gouvernement promet de s’y attaquer par la mise en place des mécanismes et outils nécessaires « à même de capter toutes les ressources de ce secteur et les ramener vers les circuits légaux de l’économie ».

Les actions qui permettront d’y parvenir sont, entre autres l’évaluation de l’étendue des activités informelles et des pertes fiscales, la mise en place de mesures d’intégration, d’incitation et de contrôle, la récupération des fonds disponibles dans le marché informel, la création du statut de l’auto-entrepreneur et le soutien à l’emploi des jeunes.

Dans le but de lever les entraves liées au foncier économique, « qui constitue actuellement un frein à l’entreprenariat et au développement de l’investissement », reconnait le gouvernement, celui-ci  s’engage à réviser le dispositif lié à ce dossier avec notamment une mesure phare : « confier tout le dispositif (octroi, gestion, aménagement et création de zones) à un seul organisme (une agence). »

L’économie de la connaissance et l’encouragement des start-up constituent un volet important du programme du président de la République duquel émane le plan d’action du gouvernement.

Et c’est logiquement qu’on y trouve une série de mesures dans ce sens, dont l’élaboration d’une loi-cadre sur l’économie de la connaissance, la mise en place d’une stratégie nationale de transfert technologique et des incitations fiscales pour encourager les entreprises à investir dans la recherche et développement.

Grand intérêt pour l’énergie, peu d’espoirs sur l’industrie

Dans la stratégie gouvernementale, la relance de l’économie passe par l’accentuation des efforts sur les secteurs à fort potentiel de croissance.

Le premier est bien entendu celui de l’énergie et des mines avec l’objectif de « transformer plus de 50% de nos ressources naturelles contre 30% actuellement et augmenter les exportations des biens et services hors hydrocarbures (Pétrochimie, Phosphates, lubrifiants et services techniques) », la réalisation des projets stratégiques des mines  de fer de Gara Djebilet, de phosphate intégré et de Zinc d’Oued Amizour, mise en œuvre d’un plan national de l’hydrogène  et lancement d’un plan national de développement massif des énergies renouvelables et nouvelles.

Dans ce dernier segment, et contrairement aux autres actions envisagées, des objectifs chiffrés sont tracés et des deadlines fixées : la mise en place d’une capacité de 15.000 MWe, à l’horizon 2035, dont 1000 MWe, en 2021, le lancement en 2021 d’un appel aux investisseurs pour la réalisation de 1000 MWe en photovoltaïque.

L’Algérie ne semble pas trop tabler sur l’industrie. Seul un bref passage est consacré dans le plan d’action à certaines filières à développer. Il s’agit des industries mécaniques, électroniques et électroménagers.

Le gouvernement s’engage en outre à « orienter les investissements industriels vers les domaines disposant d’importants potentiels et procéder à l’identification des activités en régression ».

Agriculture, pêche et tourisme, des secteurs prioritaires

Par contre, une attention particulière est accordée au développement de l’agriculture « en tant que vecteur de la diversification et de la croissance économique », en axant sur les cultures stratégiques et industrielles (Céréales, Colza, Maïs, Betterave sucrière, etc.), soit le développement des cultures industrielles pour réduire les importations et la couverture totale ou partielle des besoins en huiles, en sucre et en aliment de bétail.

Il s’agit aussi d’améliorer la compétitivité des filières agricoles et agro-alimentaires et d’optimiser les plateformes logistiques, pour une meilleure valorisation et commercialisation des produits agricoles

La pêche et les ressources halieutiques revêtent aussi « un caractère stratégique » pour leur capacité à « contribuer à l’amélioration de la sécurité alimentaire du pays ».

Les principaux objectifs sont l’augmentation de l’offre nationale, la promotion de l’aquaculture à grande échelle, de la pêche de grand large ainsi que le « maintien des emplois existants et la création de nouveaux débouchés ».

L’industrie pharmaceutique figure aussi au chapitre des filières à encourager pour une meilleure sécurité sanitaire. La relance du secteur de l’Industrie Pharmaceutique a permis l’augmentation qualitative et quantitative de la production, ainsi que l’objectif de baisser la facture d’importation, avec une économie de 500 millions de dollars en 2021.

Enfin, le gouvernement compte sur le développement de l’activité touristique qui pourrait constituer une source importante de devises.  Dans une conjoncture de crise économique, le secteur peut offrir une alternative, du moins en attendant que les réformes appliquées à d’autres secteurs fassent leur effet.

L’avantage du tourisme est que l’infrastructure et les sites naturels et historiques sont existants et prêts à l’exploitation. Il suffit de savoir vendre la destination Algérie.

Ainsi, il est prévu de mettre en œuvre un « plan destination Algérie » par le soutien de l’action des agences de voyage et la facilitation des procédures de visas au profit des touristes étrangers, d’encourager le recours aux formules incitatives de voyage par le biais des vols charters et favoriser l’émergence de pôles touristiques d’excellence.

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