Politique

Plan d’action du gouvernement : une impression de déjà-vu

On connait désormais les grandes lignes du plan d’action du gouvernement d’Aïmene Benabderrahmane, examiné et adopté lundi 30 août au Conseil des ministres.

Le plan s’articule autour de cinq axes (État de droit, relance économique, développement humain, politique étrangère et défense nationale). Il vient en exécution du programme du président de la République composé de 54 points.

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Dans une conjoncture économique et sociale difficile, la priorité reste à la relance de l’économie et la réduction progressive de la forte dépendance de l’Algérie aux hydrocarbures, dont l’exportation constitue la principale source en devises du pays.

Le plan d’action, tout comme le programme présidentiel dont il s’inspire, cible les secteurs à fort potentiel de croissance et la levée des entraves qui empêchent l’investissement productif de décoller.

Il faudra peut-être attendre sa présentation devant le Parlement pour être mieux fixé, mais tel qu’il a été dévoilé jusque-là, le plan pèche par l’absence de prévisions et d’objectifs chiffrés qui permettront d’évaluer sa mise en œuvre. Ce plan comprend un seul chiffre : augmenter les capacités nationales de 10 à 12 milliards de m3, sans fixer de délai.

Il est vrai que certains objectifs ne peuvent être quantifiés, notamment ceux du volet « développement humain et politique sociale », comme l’amélioration de la qualité de l’enseignement, mais des perspectives précises et des délais pouvaient être fixés pour le développement de l’agriculture ou de certains secteurs de l’industrie.

Le gouvernement du Premier ministre, Aymane Benabderrahmane, nommé début juillet, ne fera que poursuivre l’exécution du programme du chef de l’État, entamée 18 mois plus tôt par celui d’Abdelaziz Djerad.

Les objectifs restent donc inchangés, mais il est établi que, au moins en matière de relance de l’investissement, il n’y a pas eu de grande avancée.

Djerad a certes géré le pays dans une conjoncture exceptionnelle marquée par la crise sanitaire du covid-19, qui a accaparé tous les efforts de l’État, la chute vertigineuse des prix du pétrole ainsi que la poursuite des marches du hirak, il n’en reste pas moins que certains textes décisifs pouvaient être adoptés, avec des mesures indispensables pour l’amélioration du climat des affaires et l’encouragement des investissements.

Dans le plan d’action du Gouvernement Benabderrahmane, il est encore question d’améliorer « l’attractivité du climat des affaires », « la garantie de la stabilité juridique et institutionnelle », « la réforme du guichet unique en élargissant ses prérogatives », « la consolidation de l’intégration du secteur informel », « l’amélioration de l’exploitation du foncier économique » et « la dépénalisation de l’acte de gestion afin d’encourager l’esprit d’initiative chez les gestionnaires ».

Amélioration du climat des affaires : un retard qui coûte cher

Un programme qui laisse une impression de déjà-vu, puisque cela fait au moins 18 mois qu’on en parle, et même des années, pour par exemple l’amélioration du climat des affaires ou l’intégration de l’informel.

En la matière, l’Algérie a besoin d’une révolution juridique et des mentalités qui peut s’étaler dans le temps, et c’est pour cela qu’il fallait entamer les réformes sans tarder. Les mois perdus depuis janvier 2020 ont coûté cher.

Le niveau des investissements, tant nationaux qu’étrangers, est au plus bas. En 2020, le flux des Investissements directs étrangers (IDE) vers l’Algérie a reculé de 19 %, passant de 1,382 milliard de dollars à seulement 1,1 milliard de dollars, selon un rapport de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced).

En dix ans, de 2010 à 2020, l’Algérie a capté seulement 13,55 milliards de dollars d’IDE, contre 54,01 milliards pour l’Égypte, 25,41 milliards pour le Maroc et 9,58 milliards de dollars pour la Tunisie.

Durant cette période, le Soudan qui faisait l’objet de sanctions américaines, avait attiré presque autant que l’Algérie, soit 12,5 milliards de dollars d’IDE, selon les chiffres contenus dans ce rapport.

Déjà que la situation était compliquée avant 2019, la multiplication des enquêtes contre la grande corruption a plombé davantage l’économie.

Le gouvernement vient de l’avouer de manière limpide.

Dans une correspondance aux walis et autres responsables des collectivités locales, le ministre de l’Intérieur a révélé la teneur d’une instruction présidentielle visant à lever l’épée de Damoclès qui pend au-dessus de la tête des gestionnaires, ce qui a négativement influé sur le climat général des affaires.

« Le climat des affaires dans notre pays enregistre ces derniers mois un recul de la cadence des investissements, qui se traduit par l’hésitation des investisseurs à entamer des projets à cause des lenteurs dans le traitement des dossiers relatifs à l’investissement local (…) Cette situation a grandement influé sur la relance de l’économie nationale et freiné son affranchissement progressif des hydrocarbures, ainsi que la création d’emplois pour les jeunes », a écrit le président de la République qui, entre autres mesures pour y remédier, a conditionné l’engagement d’enquêtes ou de poursuites à l’encontre de gestionnaires locaux par l’aval du ministre de l’Intérieur.

Le climat des affaires en Algérie était déjà loin d’être attractif avant le 22 février 2019, et les retombées du hirak, notamment l’engagement d’une vaste campagne anticorruption visant les figures de l’ancien régime, l’ont rendu encore plus incertain. Et c’est encore le chef de l’État qui reconnait dans son instruction que la réticence des responsables s’explique par « la peur de poursuites judiciaires ».

Ces derniers ont besoin de textes de lois clairs qui définissent clairement ce qui relève de la gestion, ou de la malversation, et surtout qui les protègent contre d’éventuels abus.

Le président a décrété la dépénalisation de l’acte de gestion en août 2020, au cours d’une rencontre justement sur la relance économique. Une année après, elle est assignée comme objectif à un nouveau gouvernement. Et en l’absence de deadline et d’actions concrètes à mener, il n’est pas sûr qu’on n’en reparlera pas.

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