Économie

Pomme de terre : l’Algérie risque de « recourir à l’importation »

Le prix de la pomme de terre en Algérie n’est pas censé être ce qu’il est actuellement car on est en période de récolte. Si en période de récolte on en est à ces prix-là, qu’en sera-t-il lors de la période de soudure entre mi-mars et mi-avril ?

Le prix du kilo de pomme de terre est à 120 DA. Une augmentation qui s’inscrit dans un cycle de hausses qui touchent l’ensemble des produits agricoles.

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Alors qu’il se négociait au-dessous de 100 DA, le tubercule reprend le chemin de la hausse. Quelles en sont les raisons ? « On n’a pas suffisamment de données pour expliquer ce qui se passe. C’est aux pouvoirs publics de nous expliquer. Apparemment il n’y a pas eu assez de production. Mais même la production actuelle n’est pas totalement récoltée. Je pense que ce sont les deux raisons principales », analyse le président de l’Association de protection du consommateur (APOCE), Mustapha Zebdi.

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« Même dans le cadre du système Syrpalac, nos données vont toutes dans le sens qu’il n’y a pas de produits suffisants pour une période de récolte. Nous craignons qu’on soit dans l’obligation d’importer la pomme de terre », a lâché M. Zebdi, joint samedi 26 février par TSA.

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Il enchaine : « Les données réelles sont au niveau des pouvoirs publics. Il leur appartient de juger si on a une autosuffisance ou pas. S’il y a une importation qui doit se faire, c’est maintenant qu’il faut prendre la décision car on risque de payer le prix plus cher », alerte Mustapha Zebdi.

La pomme de terre victime de son succès ?

Selon le président de l’Association des commerçants et artisans algériens (ANCA), Hadj-Tahar Boulenouar, la production de ce tubercule n’arrive plus à satisfaire la demande de plus en plus importante.

« D’aucuns savent que nous sommes de gros consommateurs de pomme de terre. Sur une production moyenne annuelle de 6 millions de tonnes, 4 vont à la consommation. Cette quantité est devenue insuffisante pour satisfaire les besoins des consommateurs », a-t-il expliqué à TSA.

Face à cette offre insuffisante, l’importation pourrait-elle être envisagée ? Le président de l’Association des artisans et commerçants algériens (ANCA), Hadj-Tahar Boulenouar se montre sceptique.

Pour lui, cette solution peut se révéler comme « une arme à double tranchant ». « On peut importer une certaine quantité et les prix baisseront. Mais les producteurs qui vont cultiver la pomme de terre la saison prochaine risquent d’être échaudés en se disant qu’ils pourraient perdre beaucoup. À mon avis, il faut encourager davantage la production et les producteurs et non pas l’importation », exhorte Boulenouar.

Parmi les solutions que les agriculteurs attendent figure au premier chef la disponibilité de l’eau d’irrigation. « Il ne faut pas oublier aussi les conséquences de la sécheresse  (depuis les pluies du mois d’octobre, l’Algérie vit une véritable sécheresse, Ndlr), qui a un rôle dans la hausse des prix. Beaucoup d’agriculteurs souffrent que leurs puits soient à sec si bien qu’ils doivent acheter l’eau pour irriguer », déclare le président de l’ANCA.

L’autre problème à régler est celui de la semence jugée trop chère. Aussi, Boulenouar explique que nombre d’agriculteurs ne trouvent pas de lieux frigorifiés pour stocker la pomme de terre.

À ces problèmes s’ajoutent deux autres facteurs : l’usage de moyens rudimentaires voire usités dans l’agriculture ainsi que le manque flagrant de main d’œuvre notamment jeune.

« On n’est pas dans la fourchette des prix moyens qu’on a l’habitude d’avoir. Les prix vont-ils demeurer élevés ? C’est selon la réponse que vont apporter les pouvoirs publics », admet Mustapha Zebdi de l’APOCE.

« Cela fait des semaines que nous appelons à (fixer) des prix de référence. Il n’y a pas eu de réponse favorable à nos appels, or nous ne pouvons pas faire plus que cela », ajoute-il.

M. Zebdi ne s’explique pas la hausse des prix sur les marchés. « Si on a suffisamment de production, pourquoi le prix est encore si élevé ? On l’a vu avec les prix de gros : la pomme de terre du sud fait entre 85 et 90 DA/kg, un prix excessivement cher et qui n’est pas à la portée du consommateur algérien », poursuit-il.

De son côté, Hadj-Tahar Boulenouar prévoit une baisse des prix de la pomme de terre à partir du mois de mars avec la récolte dans les régions de l’Ouest (Mostaganem, Mascara…) et de la région d’Oued Souf. Le président de l’ANCA pointe aussi la faible organisation du réseau de stockage. « Ce sont des facteurs qui ont fait que la pomme de terre dépasse 100 DA le kilo ».

M. Boulenouar affirme que la pomme de terre sert en quelque sorte de « bourse » concernant les produits agricoles qui, eux aussi, connaissent une hausse des prix. « Quand le prix de la pomme de terre augmente, les autres produits augmentent. Et inversement », précise-t-il.

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