La question complexe du pouvoir d’achat des Algériens a été évoquée par le président Abdelmadjid Tebboune jeudi soir lors de son intervention sur les médias publics.
Beaucoup attendaient des annonces d’augmentation de salaires conséquentes et tous azimuts à l’occasion de l’entretien du président de la République avec des représentants des médias nationaux, diffusé jeudi soir.
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Mais Abdelmadjid Tebboune a paru très mesuré dans ses propos. Même s’il a réitéré son engagement à préserver la dignité du citoyen par le renforcement de son pouvoir d’achat, il a reconnu toute la complexité de l’équation, d’où sa décision de procéder avec prudence et de décréter les augmentations « progressivement ».
Le renforcement du pouvoir d’achat des Algériens est l’un des engagements phares du président depuis son élection en 2019.
Jeudi, Abdelmadjid Tebboune a rappelé le constat que tout le monde fait de la situation sociale et des inégalités en Algérie.
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« Ce n’est pas pour remuer le couteau dans la plaie, mais c’est une réalité que tout le peuple connaît. Nous étions au bord du précipice, la situation allait exploser. Dans un pays pétrolier, un possède un jet privé, un autre doit se lever à 5h pour avoir un sachet de lait », dénonce-t-il.
C’est pourquoi, dit-il, il a entrepris des réformes et entamé le relèvement du pouvoir d’achat du citoyen pour préserver sa dignité. Parmi ses premières mesures, le relèvement du salaire minimum (SNMG) de 18.000 à 20.000 dinars algériens et la suppression de l’IRG (impôt sur le revenu global) pour les salaires de 30.000 dinars mensuels et moins.
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« Les prix ont flambé au nom de la liberté du commerce, le revenu du citoyen a stagné et la valeur du dinar a chuté, où allons-nous ? », s’est interrogé le président Tebboune.
« Le plus important c’est la dignité du citoyen. Il faut que le citoyen vive avec ses enfants dans la dignité. Il faut qu’il ait accès à ses besoins essentiels sans peine et sans toucher à sa dignité », insiste-t-il.
Pouvoir d’achat : une question indissociable de celle de la relance de l’économie
Sauf que l’équation de l’amélioration du pouvoir d’achat des Algériens, de son propre aveu, est plus complexe qu’elle ne paraît. Des propos du président de la République, il ressort qu’un meilleur pouvoir d’achat ne se décrète pas.
La hausse des salaires n’est qu’un segment d’un processus où interviennent plusieurs paramètres : le niveau des prix, la valeur du dinar, le volume de la production nationale, les subventions publiques et le poids des transferts sociaux sur les équilibres budgétaires de l’Etat.
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Actionner le seul levier des salaires c’est donner un coup d’épée dans l’eau, à cause de l’inflation inéluctable qui en découlerait. Le faire aussi brusquement, c’est-à-dire décréter d’un coup des hausses conséquentes, débouchera sur la même situation fâcheuse d’une inflation qui annihilerait les augmentations.
Impôt sur la fortune : ce qui bloque
Les salaires continueront donc à augmenter, y compris en 2023, mais ce sera par étapes jusqu’à atteindre un niveau qui permettra au citoyen de « vivre dignement ».
Renforcer la production nationale, lutter contre l’inflation, faire en sorte que les prix baissent, maintenir les subventions et les transferts sociaux, relever la valeur du dinar et augmenter les salaires progressivement, telle est la recette que propose Abdelmadjid Tebboune pour arriver à un renforcement réel et durable du pouvoir d’achat des Algériens.
Autrement dit, la question des salaires et du pouvoir d’achat ne peut pas être dissociée de celle, plus globale, de la relance de l’économie.
Selon Abdelmadjid Tebboune, les choses sont sur la bonne voie. L’économie algérienne se redresse, l’Etat mène une lutte implacable contre l’inflation, des efforts sont faits pour la maîtrise des prix et, « pour la première fois depuis longtemps », il y a « une lueur d’espoir » pour l’appréciation de la valeur de la monnaie nationale.
En plus des impératifs économiques, l’entreprise de renforcer le pouvoir d’achat et d’établir une meilleure équité entre les citoyens fait face à un autre écueil.
Et c’est le président lui-même qui le relève. Celui-ci explique que le déficit de numérisation empêche par exemple l’identification des familles qui ont un revenu unique, donc éligibles à l’aide de l’Etat. Et c’est cette même opacité, derrière laquelle il y a « des arrière-pensées », qui rend difficile l’application de l’impôt sur la fortune.