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Quand l’Algérie (re) découvre l’industrie des loisirs

Quand l’Algérie (re) découvre l’industrie des loisirs

Une bonne nouvelle se précise depuis quelques semaines dans la presse nationale. Un vaste chantier sera lancé au niveau du parc de Ben Aknoun à Alger pendant 30 mois afin d’en faire un parc de loisirs aux normes internationales.

Le parc a été, depuis peu, pris en main par la Société d’investissement hôtelier (SIH). Sans doute pour couper court aux spéculations, cette information a même été publiée très rapidement au Journal officiel.

Pour le reste, les informations disponibles à l’heure actuelle sont encore assez imprécises. En l’absence de communication officielle sur le dossier, certaines sources évoquent des travaux de réhabilitation d’un montant de 70 milliards de DA qui seront engagés en partenariat avec une entreprise espagnole spécialisée.

Le projet porterait notamment sur la réhabilitation des routes menant vers le parc, la construction d’un hôtel supplémentaire, d’une salle des fêtes et l’aménagement d’un lac ainsi que la rénovation du matériel de jeu et la relance du téléphérique et du train. Cette étude prévoit aussi la mise en place d’un poste de police et un autre de la protection civile ainsi que l’installation d’un grand nombre de caméras de surveillance.

Le site Maghreb Emergent a évoqué de son côté des contacts entre la SIH et le groupe Marriott Dubaï ainsi que le Parc français des Hautes-Alpes dans le but de bénéficier de leur expertise aussi bien dans le domaine de l’hôtellerie que dans la gestion des parcs naturels.

En attendant, une société chinoise a installé ses équipements au niveau du parc, et a commencé à mettre en place progressivement sa base de vie. Elle sera chargée de mettre en place une clôture de 22 km de long et de 6 mètres de hauteur pour entourer et sécuriser entièrement le parc.

Vers la fin de l’immense gâchis du parc de Ben Aknoun

Le parc zoologique et des loisirs de Ben Aknoun a été pendant longtemps la principale infrastructure de loisirs du centre du pays, attirant des visiteurs d’Alger mais aussi de toutes les wilayas environnantes.

Sa réalisation qui s’est poursuivie pendant toutes les années 70 a conduit à l’inauguration en 1981 d’un complexe de loisirs qui constituait à l’époque une infrastructure sans équivalent à l’échelle du Maghreb.

Un site unique sur les hauteurs d’Alger, une superficie immense de plus de 300 hectares desservie par des autoroutes et ceinturée de plusieurs parkings qui en facilitaient l’accès.

Le concept était original, fondé sur l’association d’un parc zoologique du coté de Ben Aknoun s’étendant jusqu’à Oued Romane et d’un parc de loisirs doté d’équipements très nombreux et très variés du côté d’Hydra- Birmandreis.

Les deux espaces étaient reliés, à l’intérieur même du parc, par une ligne ferroviaire, un téléphérique et des navettes routières. Pendant toutes les années 80, le parc de Ben Aknoun a constitué le pôle d’attraction majeur pour la population algéroise et plus largement pour la région centre du pays .

Cette infrastructure unique connaissait depuis près de 20 ans une descente aux enfers ininterrompue qui en fait aujourd’hui un espace malfamé, déserté par les familles et dont les équipements sont tombés en panne ou en ruine les uns après les autres sans être jamais remplacés.

Son assiette foncière, irremplaçable et prise d’assaut de toutes parts, par des constructions souvent hideuses, faisait en outre l’objet, dit on, de convoitises multiples… Il est en effet largement temps de sauver le parc zoologique et des loisirs de Ben Aknoun.

L’industrie des loisirs, parent pauvre du développement économique

Jusqu’à une date récente, les plans de développement concoctés par les fonctionnaires algériens avaient un curieux parfum de 19e siècle. Priorité à la route, au rail, au logement, aux barrages…

Quand à l’industrie des loisirs, dans un pays où 70% de la population a moins de 30 ans, elle restait carrément un ovni. Sous d’autres cieux, il s’agit pourtant d’un secteur économique à part entière qui peut représenter en moyenne jusqu’ à 8 à 10% du PIB et qui enregistre de surcroît des taux de croissance 2 à 3 fois supérieurs à ceux des autres secteurs.

L’activité à en outre la particularité d’être fortement créatrice d’emplois, d’être particulièrement propice à l’emploi des jeunes et de favoriser l’insertion des femmes dans la vie professionnelle.

Un haut fonctionnaire au ministère de la Culture nous signale au passage que la conception « austère » du développement économique qui préside depuis un quart de siècle à l’allocation des ressources de l’État n’était absolument pas celle de l’« âge d’or » de la planification algérienne : «  Les principaux équipements de loisirs et de tourisme dont dispose aujourd’hui les Algériens ont été réalisés dès les années 60 et dans le courant des années 70. Le cas d’Alger est significatif. Qu’est-ce qui a été réalisé de notable depuis la construction de centres touristiques de Sidi Fredj, de Zeralda, du Club des Pins ou de Tipaza ? Le parc zoologique et des loisirs d’Alger inauguré en 1981 date aussi de cette époque tout comme le complexe sportif du 5-Juillet ou le théâtre de verdure de l’hôtel Aurassi. Même Riadh el Feth, livré en 1985, a été lancé à cette époque. »

Des besoins immenses

Pendant presque 30 ans, pratiquement plus rien. Bien sûr la « décennie noire » est passée par là .Elle a plongé l’ensemble de la population algérienne dans une crise du vivre ensemble et a transformé le pays en désert culturel.

Aujourd’hui, les besoins accumulés dans le domaine des loisirs sont immenses. À Alger, la capitale étant dans ce domine la mieux lotie, les foules qui se pressent dans les centres commerciaux de Bab ezzouar ou à  Ardis sur le front de mer, qui font office, faute de mieux, d’espace de loisirs, renseignent sur l’étendue de la frustration ressentie par les Algérois qui ne sont pas les plus à plaindre dans ce domaine.

Le week-end, en dehors de la saison estivale, dans une agglomération qui compte maintenant largement plus de 5 millions d’habitants, les seuls espaces de détente disponibles étaient voici encore peu de temps la forêt de Bouchaoui transformée en fourmilière et un parc d’attraction des Pins Maritimes aux dimensions d’un timbre poste et dont on refuse l’entrée aux jeunes .

Le ballon d’oxygène des nouveaux projets

L’étendue des besoins a fait face jusqu’à une date récente à une prise de conscience insuffisante des enjeux et à un manque d’ambition flagrants de la plupart du gouvernement pendant près de 2 décennies.

Des projets annoncés ou mis en œuvre récemment constituent cependant une lueur d’espoir pour l’avenir et une véritable bouffée d’oxygène non seulement pour l’agglomération d’Alger qui prend des proportions géantes mais également pour d’autres régions du pays.

Dans la capitale, on avait d’abord fondé beaucoup d’espoirs sur un « parc des grands vents » doté de plus de 1.000 hectares et destiné  à accueillir un « parc paysager et de loisirs » si on en croit le cahier des charges initial.

Chemin faisant et après plusieurs années de tractations, le projet du fonds d’investissement émirati EIIC semble, aux dernières nouvelles, battre de l’aile et malgré son ouverture récente au public, en l’absence d’équipements de loisirs capables d’en faire un pôle d’attraction, il court toujours le risque de s’orienter de plus en plus vers la construction d’un complexe immobilier de luxe.

La baie d’Alger

En fait, pour l’heure, c’est surtout l’aménagement de la baie d’Alger qui constitue le principal acquis dans ce domaine. Au départ, la construction d’un hypermarché doté d’un parking géant sur le site ainsi que le mur des tours d’affaires du projet « Alger Médina » avait de quoi provoquer quelques inquiétudes.

Chemin faisant, la déclinaison du reste du projet avec l’aménagement sur près de 5 km de la promenade des Sablettes ainsi que l’assainissement en cours de Oued El Harrach a commencé à drainer des foules importantes depuis près de 2 ans et en fait déjà le principal pôle d’attraction familial pour une population d’Alger en mal d’espaces de détente.

Dans le même temps, l’ambition des projets et le montant des investissements annoncés à Ben Aknoun, ainsi que dans d’autres régions du pays, semblent traduire enfin une prise de conscience bienvenue de l’étendue des besoins mais aussi du potentiel considérable de ce qui constitue un secteur économique à part entière.

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