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Rapprochement Arabie saoudite – Israël : comment Riyad teste (et prépare) l’opinion

La crainte de voir l’Iran -leur ennemi juré- s’imposer comme un leader régional et développer un programme nucléaire pourrait contraindre Riyad et Tel Aviv à devenir des alliés de circonstance. Mais un rapprochement trop marqué -même au nom de la « menace sécuritaire »– pourrait être mal perçu dans l’opinion. Ce qui pousse le royaume à sonder subtilement la population.

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La référence à Israël n’est pas explicite mais l’expression « les Saoudiens avec la normalisation » partagée sur Twitter ces dernières semaines fait pourtant bien référence aux relations entretenues avec l’État hébreu. Un article paru sur le site internet de l’hebdomadaire français Le Point cette semaine note que ce mot-clé a été partagé « plus d’un millier de fois entre le 3 et le 10 juillet », selon des calculs réalisés par l’outil de veille sur internet Talkwalker.

Un hashtag piloté par le Royaume 

Le fait que les Saoudiens soient les plus actifs au monde sur ce réseau social n’a certainement pas échappé au pouvoir. Pour Mujtahidd, célèbre twitto saoudien anonyme (considéré comme le Julian Assange saoudien), ce hashtag serait en réalité le fruit d’une campagne orchestrée par le Royaume sur le site de micro-blogging, rapporte The New Arab.

Si les porte-voix du gouvernement ont milité pour cette normalisation sur le réseau social, les opposants à un rapprochement entre les deux pays ont quant à eux répliqué avec un hashtag « contre ». Preuve que le sujet est très clivant dans l’opinion.

Repéré par l’hebdomadaire français, le compte Al Saudia Times suivi par plus de 17.000 personnes, a publié le 7 juillet une caricature présentant le roi Salmane comme serviteur du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu allongé sur un matelas et flottant sur une rivière de sang palestinien. On peut également voir une femme à côté d’un panneau « Palestine » qui porte un mort dans ses bras.

Les médias officiels préparent le terrain 

Pour les journaux du royaume wahhabite, la possible montée en puissance de l’Iran doit conduire Riyad à revoir sa politique. Ainsi, un éditorial paru le 6 juin dans l’un des principaux quotidiens officiels saoudiens Al-Riyadhtrès surveillé par le gouvernement, appelle à ne plus considérer Israël comme un pays hostile -sans pour autant en faire un ami.

« Existe-t-il un plus grand ennemi pour nous et nos pays que l’Iran et est-ce qu’Israël [nous] menace, nous influence ou nous préoccupe, ou sème le ressentiment et la haine comme le fait l’Iran ? Par conséquent, focalisons-nous sur notre ennemi véritable et ne transformons pas un autre [élément] en un démon qui inquiétera nos prochaines générations, lorsque ce n’est pas le cas », peut-on lire dans cet édito traduit par l’association MEMRI (Middle East Media Research Institute), créée par un ancien des services de renseignement israéliens.

En outre, cette tribune -publiée un jour seulement après la rupture des relations diplomatiques entre l’Arabie saoudite et le Qatar– appelle à une action contre les « éléments fourbes » du Golfe qui soutiennent l’Iran. « Nous devons faire tout notre possible pour vaincre cet ennemi [l’Iran] et la chose la plus importante est que nous ne restions pas passifs face à ceux qui sont fourbes [à savoir le Qatar], car l’ami de mon ennemi est mon ennemi, même si c’est un Arabe du Golfe. » 

Enfin, et non des moindres, le texte anticipe les critiques que pourraient formuler les Saoudiens sur l’occupation des territoires palestiniens. « En tant que citoyen saoudien, que puis-je faire à ce sujet, vu que les Palestiniens au pouvoir ont déclaré la paix avec Israël et que d’autres Palestiniens, qui continuent à s’élever contre Israël, sont retournés vivre à Gaza, sachant [parfaitement] qu’Israël les encercle de tous les côtés ? », écrit l’éditorialiste Musaid Al-Asimi.

La publication d’un tel texte dans un journal contrôlé par le Royaume n’a évidemment rien d’hasardeux. Pour les autorités, c’est une façon de tester l’opinion publique sur la question d’un éventuel rapprochement. Il ne faudrait toutefois pas laisser penser que la normalisation est actée.

Infos au compte-goutte 

Ainsi, il y a quelques jours, plusieurs médias israéliens ont rapporté que l’Arabie saoudite avait bloqué l’accès au site Arab48 (très critique vis-à-vis des politiques israéliennes) après la publication d’un article sur les relations entre Riyad et Tel Aviv.

L’ébruitement d’un rapprochement pourrait être extrêmement néfaste : il serait immédiatement critiqué dans l’opinion publique et vu comme une trahison de la cause palestinienne. Pire : comme la marque de l’affaiblissement du royaume saoudien.

« Il semble que nous ayons été bloqués en raison des articles sur les relations entre Israël et l’Arabie saoudite et Mohammed Ben Salmane », a ainsi indiqué Rami Mansour, le rédacteur en chef du site, à plusieurs médias. Ce journaliste a également publié un rapport affirmant que les Israéliens s’étaient félicités de la désignation de Mohammed Ben Salmane comme prince héritier fin juin.

Le conflit israélo-palestinien, pierre d’achoppement 

Toutefois, ces « sondages masqués » doivent être relativisés. Certes, la présence d’une délégation d’hommes d’affaires et d’universitaires saoudiens en Israël en juillet 2016 a donné à voir les prémices d’un flirt diplomatique. Mais en dépit de l’ennemi iranien qu’ils ont en commun, les divergences de points de vue sur le conflit israélo-palestinien bloquent toujours les relations entre Tel Aviv et Riyad.

L’initiative arabe de paix présentée en 2002 par l’Arabie saoudite (prévoyant la restitution aux Palestiniens des territoires occupés depuis 1967 pour qu’ils y installent leur État, et promettant en échange une normalisation totale des relations israélo-arabes avec la reconnaissance d’Israël par les pays de la Ligue arabe) n’a jamais reçu de réponse favorable de la part de l’État hébreu.

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