Économie

Réformes et gestion de l’économie : entre lenteurs et défaillances

Le ministère du Commerce a annoncé mercredi 20 avril le report de la mise en œuvre des dispositions relatives au code à barres sur les produits destinés à la consommation humaine.

Cette annonce illustre une certaine irrésolution dans la gestion des affaires publiques, un empressement parfois dans la prise de décisions et  une défaillance dans la maîtrise de la rédaction des textes réglementaires en Algérie.

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Et pas qu’au niveau du département de Kamel Rezig, même si ce ministère est parmi ceux qui collectionnent le plus les critiques à cause notamment de son incapacité à juguler la flambée généralisée des prix et les pénuries qui touchent certains produits de base.

Mercredi 20 avril, le ministère du Commerce a annoncé dans un communiqué le report, « jusqu’à nouvel ordre », de l’entrée en vigueur des dispositions de l’arrêté interministériel du 16 février 2021 portant règlement technique fixant les conditions et les modalités applicables à l’apposition du code à barres sur les produits destinés à la consommation humaine.

Comme le précise bien le communiqué, le texte a été promulgué depuis plus d’une année, en février 2021, ce qui laisse déduire que son élaboration a commencé logiquement bien avant cette date.

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La raison invoquée pour expliquer ce report est la non-réunion des conditions nécessaires à l’application des nouvelles dispositions. Quelles sont ces conditions et quels aspects empêchent l’entrée en vigueur du texte ?

Le ministère ne le précise pas, mais quoi qu’il en soit, 14 mois c’est en principe largement suffisant pour lever les entraves de toute nature. On ne peut pas reprocher au département, ses cadres et ses démembrements de ne rien faire mais on est en droit d’émettre des doutes quant à la maturité du texte avant de le promulguer.

Un projet pensé et décidé dans la précipitation ne peut déboucher que sur l’impossibilité de sa mise en œuvre ou sur des résultats en deçà des attentes, des situations compliquées, voire l’effet contraire de son objectif.

Il y a lieu aussi de s’interroger sur la maîtrise de la conduite des projets et la rédaction des textes de lois aux autres règlements au niveau des départements ministériels. Car il y a d’autres exemples, concernant parfois des textes cruciaux pour le pays.

Code des investissements : copie à revoir

 C’est le cas du nouveau code des investissements, l’une des pierres angulaires de la réforme de l’économie algérienne promise par le président Abdelmadjid Tebboune.

Le texte, appelé notamment à rendre plus attractif le marché algérien aux investissements étrangers, est attendu depuis plus de deux ans. En février dernier, c’est le chef de l’État en personne qui a annoncé lors d’une visite au Qatar sa publication, dans un délai d’un mois.

Le code a en effet été élaboré mais coup de théâtre lors de sa présentation devant le conseil des ministres, le 13 mars : le président Tebboune demande au ministre de l’Industrie de revoir sa copie, exigeant une loi qui repose sur « la consécration du principe de la liberté d’investissement et d’initiative » et qui restera au moins dix ans pour en finir avec l’instabilité juridique en matière de régulation de l’investissement qui rend l’Algérie peu attractive aux investisseurs étrangers.

Le président de la République a aussi demandé la simplification des procédures, la réduction du pouvoir discrétionnaire de l’administration, une meilleure orientation des avantages et incitations…

Ce qui veut dire que tout cela n’a pas été pris en charge dans le texte présenté. En presque deux ans, ceux qui ont été chargés d’élaborer un nouveau cadre pour les investissements ont reproduit une copie pas très différente de l’ancien code, avec quelques amendements sans grande incidence sur l’esprit de la loi et le changement de dénomination pour les instances déjà en place, comme l’ANDI.

Plus d’un mois après la demande du président, le nouveau code de l’investissement n’est pas encore prêt.

C’est encore le ministère de l’Industrie qui traine pour élaborer un nouveau cahier des charges pour l’activité de l’importation des véhicules neufs. Il en a été instruit par le chef de l’État à la fin de l’année dernière.

A sa décharge, le ministre en cours ne fait pas pire que ses prédécesseurs qui n’ont fait avancer aucun dossier important. Même les entraves qui bloquent des centaines d’usines prêtes à entrer en production, n’ont commencé à être levées qu’après le coup de gueule du président en décembre dernier. Depuis, la tâche est confiée au médiateur de la République qui en rend compte régulièrement devant le conseil des ministres.

Beaucoup de membres du gouvernement semblent maîtriser une activité plus que le reste : les visites de terrain fortement médiatisées.

Ces visites sont utiles quand elles viennent en appoint du travail fait au niveau central, pour suivre la mise en œuvre de stratégies, de politiques mûries et de décisions où inspecter l’état d’avancement de projets. Mais il est inconcevable qu’elles constituent l’essentiel de l’activité de certains ministres.

Si la volonté de réformer l’économie est affichée au plus haut sommet de l’Etat, force est de constater que l’administration, engluée dans les pratiques archaïques et faute d’ingénierie nécessaire, peine à suivre.

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