search-form-close
Rohingyas : Ankara et Tunis dénoncent « un génocide », Alger garde le silence

Rohingyas : Ankara et Tunis dénoncent « un génocide », Alger garde le silence

Ces dernières semaines, les médias internationaux évoquent davantage les souffrances subies par les Rohingyas, un peuple apatride et persécuté par les autorités birmanes.

Les Rohingyas, des immigrés illégaux bangladais selon la Birmanie 

La minorité musulmane sunnite formée par les Rohingyas est considérée par les autorités birmanes comme une menace. Le pays, à majorité bouddhiste, leur interdit l’accès aux soins, aux écoles ou encore au travail. Quand ils n’ont pas déjà fui vers les pays voisins, notamment le Bangladesh, les Rohingyas vivent dans des camps situés dans l’État de Rakhine (anciennement Arakan), à l’ouest de la Birmanie.

Les autorités birmanes, qui n’utilisent d’ailleurs pas le terme de « Rohingyas », refusent de les reconnaître comme citoyens birmans et les considèrent comme des immigrés illégaux bangladais. Pourtant les membres de cette minorité, estimée à un peu moins d’un million de personnes, se disent être des descendants de commerçants turcs, bengalis, mongols ou encore arabes dont la présence dans la région de l’Arakan remonterait à plusieurs siècles.

Apatrides et pourchassés, ils ont fait l’objet de plusieurs nettoyages ethniques ces dernières années sans que la communauté internationale ne réagisse. Considérée comme l’une des minorités les plus persécutés au monde par l’ONU, leur sort n’a jusqu’alors pas fait l’objet d’une couverture médiatique importante, notamment en Occident.

Le travail des ONG et les photos des exactions relayées sur les réseaux sociaux permettent de mettre davantage en lumière les souffrances subies depuis plusieurs décennies par cette population.

Comment les dernières violences ont-elles débuté ?

La dernière vague de violence contre les Rohingyas date du 25 août lorsque des militants de l’Armée du salut rohingya de l’Arakan (ARSA) ont attaqué et tué plusieurs membres des forces de sécurités locales.

Selon le Washington Post, les actions violentes gagnaient déjà en intensité ces derniers mois. En octobre 2016 des attaques avaient d’ailleurs été menées contre des postes frontières. À chaque fois, l’armée birmane y a répondu par une forte répression (y compris des viols et des exécutions sommaires), suivie d’un exode des Rohingyas vers le Bangladesh.

Après les violences de ces dernières semaines, l’armée birmane affirme avoir tué au moins 370 personnes, qu’elle considère comme « terroristes ».    

La Birmanie bloque l’aide humanitaire

En quelques jours, près de 125.000 musulmans Rohingyas ont quitté la Birmanie pour fuir vers le Bangladesh voisin, estime l’ONU. Ils font état d’exécutions sommaires, de coups de feu tirés par l’armée depuis des hélicoptères et rapportent que leurs villages ont été incendiés après leur départ.

Plusieurs des personnes en fuite ont aussi trouvé la mort lors de leur voyage, dont 46 qui se sont noyées lors du naufrage de leur bateau. Ce mouvement de population déstabilise la région, a déclaré Antonio Guterres, secrétaire général des Nations unies. Le responsable onusien appelle les autorités birmanes à en finir avec les attaques contre les Rohingyas et demande à ce que la minorité musulmane puisse vivre normalement.

Mais alors que la crise s’intensifie, la Birmanie refuse que les agences de l’ONU fournissent de l’aide humanitaire aux personnes qui se trouvent dans les camps situés dans l’État de Rakhine. L’Unicef se plaint de ne plus avoir accès à près de 28.000 enfants situés dans les zones de combats. Selon l’agence, 4.000 enfants étaient notamment traités pour malnutrition, rapporte RTL.

Par ailleurs, l’ONU avertit que les camps situés au sud-est du Bangladesh ont atteint leur point de saturation. Selon les Nations unies, « les nouveaux arrivants sont accueillis par des familles réfugiées, dans des écoles pour réfugiés, des centres communautaires, des écoles coraniques et des structures couvertes ». L’organisation indique qu’une aide de 18 millions de dollars est nécessaire pour accueillir les nouveaux réfugiés lors des trois prochains mois.

Les manifestations se multiplient, Alger garde le silence

Les manifestations pour dénoncer les persécutions contre les Rohingyas se multiplient à travers le monde. D’abord en Tchétchénie où un million de personnes se sont réunies sur une place de Grozny. Des milliers de personnes ont aussi défilé mercredi à Jakarta en Indonésie après l’appel lancé par des organisations musulmanes. Les manifestants se sont rassemblés devant l’ambassade de Birmanie munis de banderoles aux slogans appelant à la fin des violences. La veille, la ministre indonésienne des Affaires étrangères avait d’ailleurs rencontré Aung San Suu Kyi, cheffe du gouvernement birman, pour lui demander de résoudre le problème.

La femme politique birmane, qui est aussi prix Nobel de la Paix est largement critiquée pour son silence. Lors d’un entretien téléphonique avec le président turc ce mercredi, Recep Tayyip Erdogan l’a exhorté à mettre fin au « génocide », tandis que celle-ci persiste en dénonçant un « iceberg de désinformation », rapporte l’AFP.

Après cet entretien, les autorités turques ont annoncé l’envoi de 1.000 tonnes d’aides dont de la nourriture et des vêtements, aux Rohingyas. Au Maroc, des organisations des droits de l’Homme appellent à un sit-in vendredi 8 septembre à Rabat, indiquent plusieurs médias locaux.

En Tunisie, les autorités ont aussi dénoncé lundi le génocide subi par la minorité musulmane et en appellent à la communauté internationale. Des marches de protestation sont prévues, dimanche 10 septembre, dans la capitale Tunis. Selon le site Webdo les initiateurs espèrent répandre le mouvement de protestation aux autres pays du monde arabe. En Algérie, les autorités ne se sont toujours pas exprimées sur le sujet.

  • Les derniers articles

close