Économie

Sonatrach empêtré dans un « énorme scandale » au Liban : l’ombre de Farid Bedjaoui

La députée libanaise Paula Yacoubian a affirmé ce jeudi que le dossier du carburant défectueux livré par Sonatrach à Électricité du Liban (EDL) est un « énorme scandale », fustigeant « le secret » entourant le contrat signé entre la compagnie pétrolière nationale et l’État libanais, rapporte le média libanais l’Orient-Le-Jour.

« Le dossier du carburant défectueux est un énorme scandale, documenté par de nombreux rapports », a déclaré Paula Yacoubian lors d’une conférence de presse au Parlement, dénonçant que certaines parties « commencent à œuvrer pour l’enterrer ».

« Pourquoi le contrat avec Sonatrach est-il secret ? », s’est indignée par députée. « Des déchets pétroliers sont envoyés au Liban et il faut que l’enquête à ce sujet englobe la société qui fait fonctionner les navires-centrales », qui utilisent une partie du fuel controversé, a préconisé Mme Yacoubian, accusant en outre « des chefs communautaires et responsables politiques de haut rang » d’être impliqués dans ce scandale.

La députée a également affirmé qu’une des personnes qui étaient actuellement poursuivies dans le cadre de cette affaire avait été naturalisée libanaise dans le décret de naturalisation polémique publié en 2018, faisant explicitement référence à Farid Bedjaoui, impliqué dans plusieurs dossiers de corruption du groupe pétrolier public notamment dans le scandale Sonatrach – Saipem.

« Il y a un mandat d’arrêt qui a été lancé à son encontre. Il est poursuivi en Algérie et en Italie et je ne sais pas s’il l’est aussi dans d’autres pays. Il a bénéficié de la nationalité libanaise en 2018 et il se dit que la sûreté générale a informé la présidence de la République que cet homme est sous le coup de poursuites, qu’il y a un mandat d’arrêt lancé contre lui, et malgré cela on a insisté pour sa naturalisation », a déclaré Paula Yacoubian.

« Il est marié à une libanaise. On sait combien cette démarche obéit à des considérations diverses notamment ethniques, et figurez-vous que Noureddine Farid Bedjaoui a dépassé toutes ces considérations. Il a été naturalisé libanais en 2018 malgré les poursuites dont il fait l’objet pour des centaines de milliers de dollars dans l’affaire Sonatrach », rappelle la députée libanaise.

« En 2002 et 2003 il était ici au Liban ; était avec lui l’ancien ministre de l’Énergie algérien Chakib Khelil qui était lui aussi ici. En 2005 le contrat entre Sonatrach et VI a été signé, le contrat est resté secret », a précisé Mme Yacoubian.

Le même jour, la justice libanaise a émis deux mandats d’arrêt à l’encontre de la directrice générale du ministère de l’Énergie, Aurore Feghali, et de la directrice des laboratoires centraux, Khadija Noureddine, rapporte Libanews. Les deux individus seraient accusés d’avoir falsifié des rapports afin de permettre le déchargement de fioul frelaté au bénéfice de deux sociétés d’importations pétrolières, dont Sonatrach. L’autre société impliquée est la compagnie libanaise ZR Group.

La veille, les anciens ministres libanais de l’Énergie Nada Boustani (Courant patriotique libre) et Mohammad Fneich (Hezbollah) ont été entendus mercredi par la justice dans le cadre de l’affaire du carburant défectueux livré aux centrales libanaises ces dernières semaines et qui fait scandale, rapporte l’Orient-Le-Jour.

« J’ai donné ma déposition et fourni tous les documents nécessaires. Nous sommes ceux qui ont alerté au sujet du dossier du fuel avarié », a déclaré Mme Boustany. « Je n’ai pas obtenu de résultats d’analyses selon lesquels la qualité du carburant livré sous mon mandat était inférieure aux normes », a-t-elle affirmé en outre.

L’ex-ministre Mohammad Fneich a pour sa part indiqué que le contrat avec Sonatrach « avait été avalisé par le Conseil des ministres dans le cadre des conditions et standards requis au sein des centrales électriques », estimant que « les responsables doivent être poursuivis ».

Pour rappel, Électricité du Liban a signalé en avril à la justice que Sonatrach lui avait livrée du carburant défectueux un mois plus tôt. L’enquête ouverte a débouché sur l’émission de mandats d’arrêt visant plusieurs personnes, dont le représentant de Sonatrach au Liban, Tarek Faoual. Ces affaires ont poussé le ministre libanais de l’Énergie et de l’Eau, Raymond Ghajar, à s’entretenir lundi pour la première fois avec l’ambassadeur algérien au Liban, Abdelkrim el-Rakaybi, pour évoquer le dossier.

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