Décrocher ou renouveler son titre de séjour en France devient de plus en plus compliqué. Alors que ce problème concernait surtout les premières demandes, il s’étend désormais aux renouvellements, ce qui peut faire sombrer dans l’illégalité des étrangers résidant régulièrement depuis plusieurs années en France.
Les demandeurs de titres de séjour sont confrontés aux retards de traitement de leurs dossiers au niveau de leurs préfectures, mais aussi à la complexité de la procédure dématérialisée qui leur est souvent imposée.
La Préfecture de l’Hérault pointée du doigt
A Montpellier (Préfecture de l’Hérault) de nombreux étrangers peinent à renouveler leurs titres de séjour. Outre les délais anormalement longs, ils sont aussi confrontés à un mur numérique. Sans titre de séjour valide, ils perdent leurs emplois et leurs droits sociaux.
Yves, 61 ans, vit en France depuis l’âge de 11 ans. Il a toujours renouvelé son titre de séjour de 10 ans sans problème. « Les deux fois précédentes, on m’envoyait même des formulaires de demande de naturalisation. Mais cette fois-ci, rien ne s’est passé », a-t-il confié au journal local Midi Libre.
Bien qu’il ait déposé sa dernière demande de renouvellement de titre de séjour à temps, ce ressortissant camerounais se retrouve désormais en situation irrégulière, ce qui lui a valu d’être radié de France Travail.
Julie Moulin, avocate, indique que la préfecture de l’Hérault « est saturée et qu’elle n’arrive plus à traiter les dossiers », ajoutant que la seule voie qui s’offre aux demandeurs est celle d’engager un avocat et de porter l’affaire devant le tribunal administratif.
Cela dit, elle souligne que « le tribunal administratif est aussi sous l’eau » et que certains demandeurs n’ont pas les moyens d’entamer de telles procédures judiciaires. « C’est dramatique pour ces personnes. Certaines n’ont plus de ressources. On se retrouve devant des situations iniques, de rupture de droits ».
L’avocate dénonce aussi les dysfonctionnements de la plateforme numérique de l’Administration numérique des étrangers de France (Anef), par laquelle les demandeurs de titres de séjour doivent passer depuis plusieurs mois. « A la moindre difficulté, si un document n’est pas lisible par exemple, cela clôture le dossier. Cela ne fonctionne pas bien » a-t-elle expliqué.
« On ne sait jamais sur quel site on doit faire la démarche »
Pour Thierry Lerch, bénévole à l’association Cimade qui aide les étrangers, les demandeurs sont confrontés à plusieurs problèmes, à commencer par la complexité de la procédure dématérialisée. « Même nous qui connaissons les procédures, on ne sait jamais sur quel site on doit faire la démarche », a-t-il noté.
Il y a aussi les retards enregistrés par le service de l’État. « La préfecture propose parfois des rendez-vous après l’échéance du titre », a-t-il ajouté, précisant que ce qui l’inquiète le plus est la difficulté que trouvent les personnes âgées à renouveler leurs titres de séjour de 10 ans.
De son côté, la préfecture de l’Hérault, contactée par le journal français, explique que la procédure dématérialisée est actuellement dans « une phase transitoire ». Les services de l’État confirment que cet outil numérique a bel et bien besoin « d’une réforme sur le moyen terme ».
En attendant que la préfecture règle ses outils informatiques et revoie sa politique de délivrance de titres de séjour, les recours contre les OQTF explosent au niveau du tribunal administratif. La Cour indique que les contentieux ont augmenté de 41,3 % depuis le début de l’année 2025.