
Le marché algérien représente des opportunités indéniables pour les entreprises et exportateurs français, mais ces derniers doivent à faire attention notamment à la surfacturation ou la sous-facturation quand ils traitent avec l’Algérie.
Avec un régime douanier algérien strict et une rigueur croissante des contrôles, les entreprises françaises qui exportent vers l’Algérie sont exposées à des risques juridiques significatifs en cas de non-conformité, délibérée ou involontaire, aux réglementations en vigueur.
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L’Algérie, « un marché d’exportation stratégique » pour les entreprises françaises
Dans une contribution parue ce lundi 23 juin sur Village de la Justice, l’avocat Ilyès Dogheche a passé en revue les principaux risques auxquels sont confrontés les opérateurs français lorsqu’ils exportent vers l’Algérie.
D’emblée, le juriste rappelle que de nombreuses entreprises françaises considèrent « l’Algérie comme un marché d’exportation stratégique ». En 2022, les exportations françaises vers l’Algérie ont atteint au total 3,7 milliards d’euros.
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D’ailleurs, même dans le contexte de la crise politique et diplomatique entre les deux pays, les opérateurs français ne comptent pas lâcher le marché algérien, en témoigne, entre autres, le déplacement d’une vingtaine d’entreprises françaises à Alger le 17 juin pour participer aux Journées de l’industrie.
Pour Michel Bisac, président de la Chambre de commerce et d’industrie algéro-française, organisateur de la rencontre, les chefs d’entreprises peuvent sauver la relation franco-algérienne. « Nous devons séparer l’économie de la politique. C’est extrêmement important », a-t-il assuré dans une déclaration à TSA.
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Et selon des données de la Direction générale du Trésor français, citées par l’avocat, la « France figure parmi les principaux fournisseurs de l’Algérie, se positionnant régulièrement dans le trio de tête ».
Exportations françaises en Algérie : les principales infractions pouvant être relevées
Au cours des opérations d’exportation, la fraude douanière peut prendre de multiples formes : de simples erreurs de déclaration à des méthodes complexes délibérées, a expliqué l’intervenant.
Parmi les principales infractions pouvant être relevées au niveau des douanes algériennes, il cite en premier « la sous-évaluation des marchandises », une pratique consistant à déclarer une valeur inférieure à la valeur réelle des produits pour réduire les droits de douane et les taxes à payer par l’importateur.
À cela s’ajoute « la fausse déclaration d’espèce tarifaire », qui se fait à travers la déclaration des marchandises sous une position tarifaire erronée pour bénéficier de droits de douane inférieurs, ainsi que « la falsification de l’origine des marchandises », toujours pour bénéficier de taux réduits.
« Les transferts financiers illicites », à travers le contournement de la réglementation algérienne des changes par la surfacturation de services ou prestations fictives, fait aussi partie des potentielles infractions des réglementations douanières par les opérateurs français.
Et en fin, Me Dogheche cite « les infractions documentaires », qui se traduisent par la présentation de documents falsifiés ou inexacts aux agents des douanes lors des contrôles.
Les sanctions prévues par le régime douanier algérien en cas de tentative de fraude
Face à ces pratiques de fraude qui ont pris de l’ampleur des dernières années, l’Algérie s’appuie sur un régime douanier « caractérisé par sa complexité et sa rigueur », note l’avocat. Il est notamment marqué par des droits de douanes très élevés (jusqu’à 60 % pour certains produits), des restrictions quantitatives sur certains produits et des procédures de dédouanement complexes et parfois imprévisibles.
Le régime douanier algérien se caractérise aussi par des exigences documentaires strictes, incluant des certificats de conformité spécifiques, et par un contrôle des changes rigoureux limitant les transferts de devises, énumère encore le juriste.
Lorsqu’une tentative de fraude est démasquée, la réglementation algérienne prévoit des sanctions dissuasives, à travers des amendes pouvant atteindre quatre fois la valeur des marchandises et des peines de prison de 2 à 5, voire jusqu’à 10 ans en cas de circonstances aggravantes.
Les opérateurs contrevenants risquent aussi la confiscation systématique des marchandises et des moyens de transport utilisés, l’interdiction d’exercer des activités commerciales en Algérie et une inscription sur une liste noire des opérateurs économiques.
Et grâce à l’extraterritorialité du droit pénal français, les réfractaires, parmi les opérateurs français, risquent aussi de doubles poursuites, en Algérie et en France. Dans le cadre du renforcement de la coopération juridique entre les deux pays, « les preuves recueillies en Algérie peuvent être transmises rapidement aux autorités françaises ».