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Algérie – France : la crise franchit le seuil de l’inconnu

Algérie – France : la crise franchit le seuil de l’inconnu

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France - Algérie

Avec les accusations proférées en France à l’égard de l’Algérie depuis quelques semaines, les dernières lignes rouges ont peut-être été franchies. Il est difficile de concevoir, du moins dans l’immédiat, un retour à la normale de la relation bilatérale après un tel flot d’attaques débridées. Tout est décidément inédit dans cette crise dont on tarde à voir le bout du tunnel. 

Début avril dernier, Alger et Paris ont entrepris un processus de rapprochement après huit mois de crise. La brouille était qualifiée de plus grave depuis 1962, mais elle était surmontable tant que la discorde portait sur des dossiers bien déterminés qui pouvaient être surmontés par la discussion, comme les OQTF, l’affaire Boualem Sansal, les extraditions, l’économie ou même la mémoire. Hormis l’insistance du ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau d’aller au « rapport de force », la France officielle s’est gardée de brûler ses vaisseaux avec l’Algérie, d’où le très éphémère réchauffement du début du mois dernier. 

Depuis la mi-avril, les tensions entre les deux pays sont passées à un autre stade après la décision des autorités françaises d’arrêter et d’incarcérer un agent consulaire algérien, accusé d’être impliqué dans une présumée tentative d’enlèvement d’un cyberactiviste algérien. 

La gravité de l’acte, qui est l’emprisonnement d’un fonctionnaire diplomatique, a fait déduire à l’Algérie qu’il y a une volonté manifeste de saper les efforts de rapprochement en cours, la partie française n’ignorant pas qu’aucun État souverain au monde ne peut accepter un tel affront. 

Dans sa communication, la diplomatie algérienne a désigné nommément Bruno Retailleau comme l’artisan de cette manœuvre. Les retombées de cet acte sont tout aussi inédites. L’Algérie a expulsé 12 agents consulaires français parmi ceux placés sous l’autorité du ministre de l’Intérieur. Paris a pris une mesure similaire, expulsant 12 agents consulaires algériens et rappelant « pour consultations » l’ambassadeur de France en Algérie. 

 

Algérie – France : une succession d’actes sans précédent 

 

Trois semaines après, l’Algérie dénonce une tentative d’introduire sur son territoire, sous couvert de passeport diplomatique, des agents du ministère de l’Intérieur et ordonné leur rapatriement immédiat. La France n’a pas encore fait connaître sa réaction mais elle a annoncé par la voix de son ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot qu’il y aura une réponse « immédiate, ferme et proportionnée ». Évidemment, les deux pays n’ont pas connu pareille escalade depuis 60 ans. 

Pendant ce temps, les accusations françaises à l’origine de tout cela n’ont pas cessé. Au contraire, l’État algérien continue à être gravement accusé à travers ses agents diplomatiques et ses responsables. Certains médias du courant anti-algérien en France usent à l’égard de l’Algérie d’un langage inacceptable et inadapté pour évoquer un état étranger souverain. 

La crise en cours ne se distingue pas des précédentes que par la gravité des attaques et des accusations proférées à l’égard de l’Etat algérien et l’emprisonnement d’un de ses agents diplomatiques. 

L’expulsion réciproque d’un tel nombre de de fonctionnaires diplomatiques est tout aussi inédite. En moins de deux mois, ce sont plusieurs dizaines d’agents consulaires qui ont été priés de quitter l’une ou l’autre capitale. Du jamais vu. 

La vacance, pendant près de neuf mois déjà, du poste d’ambassadeur d’Algérie en France est un autre fait sans précédent. L’Algérie a procédé au retrait de l’ambassadeur Saïd Moussi fin juillet 2024. En octobre, il a été nommé à Lisbonne. Le 16 avril, c’est Paris qui a rappelé Stéphane Romatet pour « consultations » après l’expulsion de 12 agents français. Ce geste rarissime, que la France n’avait pas fait pendant les huit premiers mois de la crise, dénote de la gravité inégalée de la brouille en cours entre les deux pays. 

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