L’Algérie a décidé de suspendre l’importation des vaches et veaux vivants de France, selon un communiqué du ministère de l’Agriculture et du Développement rural publié samedi 23 septembre.
Il s’agit d’une mesure préventive à effet immédiat qui fait suite à l’apparition au sein du cheptel français de la maladie hémorragique épidémique (MHE). Cette maladie infectieuse qui touche essentiellement les veaux et les vaches ne se transmet pas à l’homme et a été officiellement déclarée par les autorités sanitaires françaises.
Le 21 septembre, un communiqué du ministère français de l’Agriculture a indiqué la présence des premiers cas de MHE dans trois élevages dans deux départements du Sud-Ouest.
C’est dès le 18 septembre que le laboratoire de l’Agence de santé animale (Anses) a confirmé la présence du virus responsable de cette maladie.
Ce virus est présent depuis la fin 2022 en Europe et a été signalé en Italie et en Espagne. Actuellement, il n’existe pas de vaccin. La maladie se traduit par de la fièvre, des lésions buccales et un amaigrissement des animaux sans forcément entraîner leur mort.
Le ministère français de l’Agriculture a rappelé dans un communiqué la réglementation européenne qui interdit « l’envoi, vers d’autres États membres de l’Union européenne à des fins d’élevage, de tout ruminant provenant des exploitations situées dans le rayon de 150 kilomètres autour de chaque foyer. (…). La même source indique que : « Les restrictions éventuelles à l’export dépendent des exigences à l’import prévues par chaque pays tiers. » Restrictions qu’a donc prises, à Alger, le ministère de l’Agriculture.
Importation de broutards français
Les importations de broutards à partir de la France se développent depuis plusieurs années. Ces jeunes veaux sont transportés par bateaux spécialisés et mis en quarantaine dans des lazarets après débarquement. Cette mesure qui s’ajoute aux nombreux contrôles des services vétérinaires permet de surveiller l’éventuelle apparition de maladies.
Les animaux sont ensuite achetés par des éleveurs qui peuvent bénéficier de l’exonération de TVA qui sont parfois accordées aux importateurs.
Les importations de broutards et de génisses sont particulièrement appréciées par le marché français. En avril 2022, une revue agricole française notait : « L’Algérie est revenue aux achats de broutards en 2022, et l’année s’est terminée avec un volume record de 69.000 animaux expédiés. »
Auparavant et pour sa part, l’institut français de l’élevage (EDELE) titrait dans une note de conjoncture : « Le marché algérien tire les prix des broutards lourds. » En 2018, cet institut notait : « Le Ramadan débutant le 6 mai, les opérateurs sont aux achats et pourraient même le rester pendant la période du jeûne d’habitude plus calme. »
780 taurillons interdits de débarquement
Ces importations d’animaux vivants de France font l’objet de contrôles sanitaires rigoureux de la part des autorités sanitaires algériennes. En septembre 2022, celles-ci avaient refusé le débarquement au port d’Alger de 780 taurillons suspectés de rhinotrachéite infectieuse bovine (IBR).
L’association française de défense des animaux d’élevage Welfarm avait expliqué que les taurillons conduits vers l’Algérie n’étaient « pas accompagnés des documents certifiants qu’ils ne sont pas porteurs de la rhinotrachéite infectieuse bovine » et que « le transport des taurillons n’aurait jamais dû être approuvé par les autorités françaises au port de Sète ».
Ces affirmations avaient été contestées par le ministère français de l’agriculture, selon lequel « il n’y a pas eu de manquement des autorités françaises sur le certificat export » et qui aurait donc autorisé leur départ.
L’association avait par ailleurs déploré l’état du bateau avec lequel avaient été transportés les animaux. Il s’agit le plus souvent de bateaux âgés appartenant à des armateurs Libanais ou Syriens.
C’est le cargo « Nader-A, » battant pavillon togolais et en activité depuis 45 ans qui avait servi au transport des animaux. Face au refus des services vétérinaires du port d’Alger, le bateau était reparti vers son port de départ et les animaux avaient finalement été euthanasiés au motif du risque de fièvre aphteuse.
Durant la période où le bateau avait stationné au port d’Alger, les animaux avaient été alimentés par du fourrage produit en Algérie. Et selon le quotidien Le Monde, les services vétérinaires français avaient affirmé craindre un risque de contamination des animaux par la fièvre aphteuse.
Le renvoi d’animaux n’est pas rare et met en exergue les difficultés de contrôle du transport par voie maritime d’animaux vivants. En 2020 et 2021 deux cargos l’Elbeik et le Karim Allah, vieux de 54 et 56 ans et transportant des animaux avaient fait l’objet d’interdiction d’accostage dans plusieurs ports méditerranéens en raison d’une suspicion de fièvre catarrhale. Après plusieurs semaines les animaux avaient été ramenés en Espagne et euthanasiés.
Peu d’effet sur les prix
Cette situation ne devrait pas avoir d’influence sur la récente décision des pouvoirs publics algériens d’importer de la viande blanche et rouge dans la mesure où, pour celle-ci, il ne s’agit pas d’animaux vivants mais de « bœuf frais, congelé et emballé sous vide, ainsi que de viande d’agneau fraîche, réfrigérée et congelée ».
Cependant, elle pourrait avoir des conséquences sur le programme laitier en cours dans la mesure où les nouveaux élevages ont besoins de génisses. Afin de limiter les importations, des élevages en Algérie se spécialisent dans la production de ce type d’animaux en développant des « pépinières de génisses ».
De leur côté les services agricoles ont rappelé l’interdiction formelle d’abattre de jeunes vaches laitières. Enfin à l’avenir, il devrait être possible de compter sur l’insémination artificielle. Une technique qui pourrait se développer à la suite des récents échanges organisés sous l’égide de l’ambassade des États-Unis à Alger entre le Centre National de l’Insémination artificielle et de l’amélioration génétique et des entreprises américaines.